« Ni Kim, ni Justine »

La meilleure joueuse belge ne veut imiter personne. Simplement tirer le meilleur d’elle-même.

Jusqu’au 14 mai 2008, Yanina Wickmayer vivait relativement paisiblement dans l’ombre de Justine Henin, alors numéro 1 mondiale. Ce n’est que lorsque cette dernière a décidé de quitter le circuit international que les médias se sont enfin intéressés à l’Anversoise. Laquelle devenait comme par enchantement la meilleure tenniswoman du Royaume…

Un statut pas simple à endosser puisque (faut-il le rappeler ?) notre pays comptait il y a encore deux ans deux des trois meilleures compétitrices du monde : Kim Clijsters et, précisément, Henin. Dans leurs pas, Wickmayer avait la possibilité de faire ses armes en toute discrétion.

Le nombre de caméras et de journalistes présents à la conférence de presse qu’elle a tenue à Limelette avant son départ pour l’Australie témoigne d’ailleurs de la pression énorme qui repose désormais sur ses épaules. Les médias belges s’intéressant généralement assez peu aux joueuses classées au-delà de la 70e position mondiale mais cette pression, Yanina prétend ne pas la ressentir :  » Je suis bien consciente que Kim et Justine ne sont plus là et qu’on attend dé-sormais des résultats des autres joueuses belges. Mais j’ai toujours dit que je n’étais ni Kim, ni Justine. Tout le monde sait qu’elles ont réussi des exploits incroyables que personne n’oubliera jamais. Mon objectif n’est pas de les imiter mais de tirer le maximum de mon propre potentiel. D’arriver aussi haut que je le peux… La suite, on verra bien. « 

Et c’est précisément pour tirer le maximum de ses qualités que Yanina a décidé de rejoindre l’Académie de… Justine Henin et Carlos Rodriguez après avoir tenté, deux mois durant seulement, une expérience avec le Néerlandais Glen Schaap dont elle disait le plus grand bien il y a encore un trimestre et qui avait déjà géré la carrière de plusieurs championnes dont Dinara Safina (WTA 3) et Nadia Petrova (WTA 11).

Wickmayer :  » Je ne vais pas entrer dans les détails et vous dire ce qui n’a pas fonctionné entre Glen et moi, mais on peut très vite sentir si la sauce prendra entre deux personnes…  »

D’où sa demande d’intégrer le Sixième Sens :  » C’est un honneur énorme de m’entraîner dans l’académie de Carlos. Il est l’un des coaches qui a le plus d’expérience. Je sais ce qu’il a réussi à faire avec Justine et je suis certaine que ses compétences me permettront de progresser. Il n’y a encore que quelques semaines que je m’entraîne sous sa direction et, déjà, je me sens beaucoup plus sereine, plus détendue. J’adore cette manière hyper professionnelle de travailler. « 

Précisons tout de même que Carlos ne sera pas le coach à temps plein de Wickmayer. C’est Philippe Dehaes, ex-coach de Xavier Malisse (ATP 162) et Kristof Vliegen (ATP 84), qui travaillera le plus souvent avec elle et qui, précision importante, voyagera en sa compagnie.

 » Je pense que cela peut fonctionner « , poursuit Yanina.  » Philippe me met en confiance, il est aussi professionnel que Carlos. A trois, nous pouvons, je pense, faire du bon boulot. « 

A condition que l’Anversoise accepte le caractère de Rodriguez. Lequel, on le sait, a l’habitude de dire les choses franchement, que sa joueuse soit 73e ou 1re mondiale. On se souvient par exemple de ses sorties pas piquées des hannetons concernant certaines faiblesses de Justine :  » Je suis consciente que Carlos est quelqu’un de franc qui n’hésite jamais à dire ses quatre vérités à sa joueuse. Mais s’il agit de la sorte, c’est uniquement pour qu’elle progresse. Je n’aurai aucun souci à accepter ses critiques car elles seront forcément constructives. Je n’ai vraiment pas besoin d’entendre tout le temps ce que je fais de bien sur le terrain, mais plutôt ce que je ne réussis pas. Ses conseils devront me permettre d’encore progresser. « 

Vers le Top 50 ?

 » Je me fixe le Top 50 comme objectif de l’année 2009. En 2008, j’avais dit que je voulais intégrer le Top 100, ce que j’ai réalisé. La différence entre mon classement et les cinquante premières repose sur des détails. Et, en deux semaines, Carlos et Philippe en ont déjà réglés quelques-uns. « 

Dont elle pourra aussi parler avec… Henin :  » Carlos m’a dit que Justine était très heureuse de me voir intégrer l’Académie et qu’elle passerait de temps en temps me voir pour me donner des conseils. C’est un plus incroyable. « 

Reste maintenant à savoir quel est le potentiel réel de Wickmayer.  » Je ne sais pas. Je préfère y aller progressivement. Je ne vais pas me fixer d’objectif précis à long terme. D’abord le Top 50 et, après, on verra. « 

Mais aussi, l’espoir de pouvoir défier son idole du moment, une certaine Venus Williams (WTA 6) :  » J’adore son jeu, son style très agressif me séduit.  » Il est vrai qu’avec son 1,82m, Yanina n’a rien à craindre…

Rodriguez :  » Yanina, c’est un super cadeau de Noël « 

Voici comment Rodriguez a réagi lorsque Yanina lui a demandé d’intégrer sa structure :  » J’ai pensé qu’il s’agissait d’un super cadeau de Noël, d’une marque de confiance certaine. Cela dit, si nous sommes contents, nous sommes aussi conscients que nous avons une responsabilité énorme. Nous devons l’aider à tirer le maximum de son potentiel. C’est une joueuse de très haut niveau dont nous devrons lui permettre de confirmer sa valeur. Nous allons travailler à trois, puisque c’est Philippe qui voyagera avec elle. Je ne serai pas souvent sur les tournois et je ferai en sorte de ne pas m’imposer, de ne pas perturber un duo qui aura l’habitude de fonctionner ensemble. Je pense avoir suffisamment d’expérience pour y arriver, d’autant que je connais très bien Philippe. Est-ce compliqué au niveau de la hiérarchie et de la prise de décisions ? Non, car les décisions finales, c’est la joueuse qui doit les prendre. Philippe et moi, nous devons proposer des clés, des chemins à suivre mais c’est Yanina qui devra définir les meilleures pistes pour elle. Le calendrier et les approches tactiques seront définis à trois : Philippe, Yanina et moi. « 

Elément important : Carlos a commencé à travailler avec Justine lorsque son jeu était encore modifiable. Ici, il va s’occuper d’une joueuse nettement plus aboutie, techniquement parlant.  » Ce n’est pas plus compliqué « , dit Carlos.  » Quand on forme une joueuse, on prend des directions sans être certain qu’elles mèneront vers les bons résultats. Avec une joueuse déjà formée qui a déjà un certain classement, on sait que les résultats sont possibles et on peut éventuellement revenir en arrière. « 

Comment Justine a-t-elle réagi lorsqu’elle a appris la nouvelle ? Rodriguez :  » Franchement, elle était très heureuse. Ce qui n’avait pas toujours été le cas lorsque d’autres joueuses avaient fait la même démarche…  » Dont Ana Chakvetadze (WTA 18) !

par patrick haumont – photos: reporters

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