NFL vs corona et Trump

La nouvelle saison de NFL, la National Football League, débute jeudi soir aux États-Unis. Jürgen Nijs, commentateur chez Eleven Sports, suit le football américain depuis 36 ans. Il aborde trois thèmes qui risquent de jouer un rôle central.

L’impact du Coronavirus

JÜRGEN NIJS :  » La pandémie de Covid-19, encore très active aux États-Unis, a des répercussions importantes sur la NFL. Les 32 équipes ont toutes dû se préparer dans une bulle : les joueurs ont dû séjourner dans un hôtel et s’entraîner dans les installations du club. Tous les joueurs (2.747 personnes) et membres du personnel (5.992) ont été testés quotidiennement, ce qui représente 60.000 tests par semaine. Dans la dernière semaine d’août, ces tests ont révélé dix cas positifs. C’est relativement peu, mais cela signifie également que même dans les bulles, le risque zéro n’existe pas. Un joueur a tenté de faire entrer une petite amie, déguisée en membre de l’équipe, dans sa chambre d’hôtel, mais a été pris sur le fait.

Passé aux Tampa Bay Buccaneers, Tom Brady est-il capable de rééditer ses exploits, alors qu’il a déjà 43 ans ?

Lorsque la saison aura commencé, les joueurs pourront rentrer chez eux et les bulles seront supprimées. Elles ne sont en effet pas tenables lorsque l’on doit se déplacer chaque semaine dans une autre ville pour disputer un match. Les règles d’hygiène et de distanciation sociale resteront cependant d’application. Les joueurs continueront probablement à être testés quotidiennement, car la suppression de la bulle et les contacts souvent rapprochés pendant un match favorisent la propagation du virus. Un masque de protection spécial a été conçu, destiné à être placé sous le casque, mais les joueurs ne sont pas obligés de le porter.

Le nombre de spectateurs dans les stades sera limité, en fonction des États. Cela peut aller du huis clos à une occupation de 20%. Certaines équipes évoquent une concurrence déloyale, mais le patron de la NFL, Roger Goodell, ne veut pas s’immiscer dans le débat :  » Ce sont des décisions politiques « . Les mesures qui seront en vigueur lors du Superbowl, prévu le 7 février à Tampa, n’ont pas encore été déterminées, même si le stade a été réservé pour le mois entier, afin de pouvoir éventuellement reporter la finale si nécessaire.

Quoi qu’il en soit, les clubs perdront beaucoup d’argent. Mais si tous les matches peuvent être disputés, l’impact financier restera relativement limité. La principale source de revenus, en NFL également, réside en effet dans les droits TV, qui se chiffrent en milliards de dollars. Ces contrats arrivent à échéance en 2021 et 2022, il est donc impératif de jouer.

Les joueurs ont le droit de se désister : pour raisons médicales – ils perçoivent alors un salaire de 350.000 dollars – ou pour raisons personnelles, auquel cas ils perçoivent un salaire de 150.000 dollars. Laurent Duvernay-Tardif, le Canadien de Kansas City, ne jouera pas cette saison, car il veut se concentrer sur sa formation d’urgentiste spécialisé dans le traitement des patients atteints du coronavirus. Au total, 69 joueurs ont déclaré forfait, ce qui représente 4%, mais aucune grande vedette ne figure parmi eux. »

Black Lives Matter

 » Comme en NBA et en WNBA, le slogan sera omniprésent en NFL. Durant la première semaine, par exemple, l’hymne des Noirs, Lift Every Voice and Sing, sera joué. De nombreux joueurs, probablement des équipes entières, s’agenouilleront avant les matches, quatre ans après que le pionnier Colin Kaepernick ait été critiqué pour cela. La NFL a revu ses positions dans ce domaine. Les joueurs et les coaches sont par exemple autorisés à afficher les inscriptions Stop Hate et Black Lives Matter sur leurs chaussures, leur casquette ou leur casque. Et sur le terrain, des slogans End Racism et It Takes All of Us apparaissent.

Les Washington Redskins ont même modifié leur nom en Washington Football Team en raison de sa connotation raciste, dans l’attente d’une nouvelle appellation. Impensable jusqu’il y a peu, mais c’est désormais une réalité. Dans le même ordre d’idées, les supporters des Kansas City Chiefs ne réaliseront plus le Tomahawk Chop, une sorte de danse tribale, avant le match. Tout cela ne plaît guère à Donald Trump, qui a déjà envoyé de nombreux tweets colériques, en particulier pour le genou à terre pendant l’hymne national. Mais aujourd’hui, la NFL elle-même soutient ces initiatives. »

Jürgen Nijs
Jürgen Nijs

Deux nouvelles vedettes

 » Le transfert de l’été est incontestablement celui de la superstar Tom Brady (43 ans). Il est passé des New England Patriots, avec lesquels il a remporté six Superbowls, aux Tampa Bay Buccaneers. Il quitte donc Bill Belichick, le coach avec lequel il a dominé la NFL pendant près de deux décennies avec les Patriots. La question qui se pose est : le mérite de ces titres revient-il principalement à Brady ? Et est-il capable de rééditer ces exploits sans Belichick, alors qu’il a déjà 43 ans ? Chez les Buccaneers, il sera en tout cas mieux entouré que la saison dernière chez les Patriots. Même son ancien complice de New England, Rob Gronkowski, est sorti de sa retraite pour l’assister à Tampa. Je m’attends à ce que les Buccaneers atteignent les play-offs pour la première fois depuis 2007, mais le Superbowl, ce sera compliqué.

Dans la NFC ( l’une des deux conférences de la NFL, ndlr), les New Orleans Saints et les San Francisco 49’ers semblent au-dessus du lot. Une finale avant la lettre devrait opposer, dans l’AFC Championship Game ( la demi-finale qui précède le Superbowl, ndlr), les Kansas City Chiefs aux Baltimore Ravens. Soit les équipes des deux jeunes superstars Patrick Mahomes (24 ans) et Lamar Jackson (23 ans), élus respectivement Most Valuable Players en 2018 et 2019. Deux quarterbacks à la base d’une révolution en NFL. Pas des distributeurs tradtionnels, comme Brady, qui restent dans leur zone et font circuler le ballon, mais des gaillards athlétiques qui courent beaucoup avec le ballon et servent leurs receivers – ce qui les expose aux blessures.

En dehors du terrain également, ils font office de modèles. En particulier Mahomes, fils d’une mère blanche et d’un père noir (ancien joueur de baseball). Il est très accessible, sans caprice de vedette. Aux États-Unis, et plus encore à Kansas City, il est extrêmement populaire. Ce n’est pas un hasard s’il a prolongé son contrat cet été pour… dix années supplémentaires. Ce qui lui rapportera, bonus inclus, 445 millions d’euros : le contrat le plus lucratif de l’histoire du sport. »

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