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Le médian défensif des Rouches reconnaît avoir sous-estimé le championnat belge.

De tous les joueurs qui sont arrivés sur le tard cette saison à Sclessin, Fredrik Söderström aura été, jusqu’ici, le plus régulier. Avec lui, pas de toiles comme Fabian Carini ou d’approximations, comme dans le chef de l’infortuné Aleksandar Mutavdzic mais une constance de tous les instants qui font de ce milieu suédois, bientôt trentenaire, l’un des rouages essentiels du Standard d’aujourd’hui.

« A défaut d’être spectaculaire, je me suis toujours efforcé d’être précieux pour mon équipe », dit-il. « Et, jusqu’à présent, cela ne m’a pas trop mal réussi puisqu’à deux reprises, 97-98 et 99-2000, j’a été désigné meilleur étranger du championnat portugais. Ce qui n’est quand même pas mal quand on sait que j’ai devancé une véritable star comme le Brésilien Mario Jardel dans ce referendum ».

Fredrik Söderström a passé six ans dans le sud de l’Europe. Un chiffre qui fait figure de symbole, pour lui, puisque sa carrière a toujours été divisée en tranches qui englobaient une telle période: débuts à Ostausbo (Suède) en 1983, passage à Brage (Suède) en ’89 et grand saut à Guimaraes (Portugal) en ’95 avant d’aboutir à Porto en 2001. Un club qui l’a cédé sur base locative aux Rouches cette saison et qui reste maître de son avenir.

« Jusqu’à mon transfert là-bas, ma carrière s’était déroulée de manière linéaire », observe le médian scandinave. « J’avais fait mes premiers pas chez des amateurs de ma ville natale, Ludvika, après quoi je m’étais signalé à Brage, qui évoluait en D2. Lassé de ne pas rejoindre l’élite, j’avais fini par solliciter mon transfert à la fin des eighties. Je voulais jouer au plus haut niveau. Et ce voeu a été finalement exaucé au Portugal ».

Avec Paas à Guimaraes

L’intérêt des cercles lusitaniens pour les footballeurs nordiques ne s’est jamais démenti depuis de longues années. En débarquant à Benfica aux prémices des eighties, l’entraîneur suédois Sven-Göran Eriksson avait donné le signal de départ d’une véritable invasion de joueurs de son pays dont les plus connus auront été Stefan Schwartz et Jonas Thern. Fredrik Söderström aura suivi le même mouvement.

« A priori, je rêvais essentiellement de Göteborg et de Malmö, les deux grands noms dans mon pays », précise-t-il. « Mais, à près de 23 ans, une aventure à l’étranger n’était pas pour me déplaire. La plupart de mes compatriotes qui avaient tenté le grand saut au Portugal ne s’en étaient pas repentis. Au contraire, ils avaient même éclaté là-bas. Dès lors, j’étais tout à fait disposé à m’inspirer de leur bon exemple ».

Fredrik Söderström aboutit à Vitoria Guimaraes, une formation du sub-top derrière les trois monstres sacrés que sont Porto, Benfica et le Sporting. En l’espace d’une demi-douzaine d’années, le Suédois décrocha par deux fois, avec ses couleurs, la troisième place, qualificative pour une place en Coupe de l’UEFA avec, en prime, les deux consécrations individuelles précitées.

« L’étranger, c’est toujours un point d’interrogation », souligne-t-il. « Mais dans mon cas, je n’ai jamais eu qu’à me féliciter de mon choix. J’ai vécu plusieurs saisons en tous points merveilleuses, au même titre que David Paas, qui fut l’espace de quelques mois mon coéquipier au Vitoria. Comme il était mon voisin, nous avons-nous vécu quelques moments mémorables ensemble. Et pas seulement sur le terrain (il rit)« .

Sportivement, le Suédois range au rayon de ses meilleurs souvenirs une double rencontre européenne contre le Celtic Glasgow. Non seulement parce que Guimaraes tint la dragée haute aux Ecossais, en 1998-99, mais aussi parce qu’il sauva l’honneur (2-1) lors du retour à Parkhead. Ces mêmes Vert et Blanc qu’il retrouva d’ailleurs sur son chemin la saison passée. Mais avec Porto et dans le cadre de la Ligue des Champions, cette fois.

« Après toutes ces années, j’avais l’impression d’avoir fait le tour de la question au Vitoria Guimaraes », avoue-t-il. « Je n’étais donc pas insensible du tout à l’offre de Porto. Depuis des années, ce club est un des ténors au Portugal. En signant là-bas, j’avais non seulement l’occasion de côtoyer des éléments aussi réputés que Capucho, Juan Esnaider ou Costinha mais aussi de disputer la plus prestigieuse des compétitions européennes. Je ne pouvais pas laisser passer cette chance ».

Zidane, Beckham et Nesta

Pour une première en Ligue des Champions en 2001-2002, ce fut un coup dans le mille. Après avoir écarté les modestes Gallois de Barry Town et les Suisses du Grasshoppers Zurich lors des tours préliminaires, Porto réussit au-delà des espérances en accédant au deuxième tour de l’épreuve alors que ses adversaires, au premier, avaient pour noms le Celtic, la Juventus et Rosenborg, excusez du peu.

« L’ambition était de viser la troisième place, synonyme de repêchage en Coupe de l’UEFA », se rappelle-t-il. « Mais en réalisant le maximum face aux Norvégiens et en prenant un point contre les Turinois à domicile, nous étions parvenus à devancer les Ecossais. Par la suite, le Real et Panathinaïkos s’avérèrent des adversaires trop coriaces et notre aventure s’arrêta à ce stade ».

Pour Fredrik Söderström, la saison s’était fort bien déroulée jusqu’à cette date. Mais elle finit toutefois en eau de boudin. Alors que depuis son arrivée au stade das Anstas, il avait été associé avec le médian paraguayen Carlos Paredes, l’entraîneur José Mourinho le délogea de sa place de pare-chocs devant la défense pour l’aligner au back gauche.

« Je n’avais encore jamais évolué à ce poste », précise-t-il. « Mais comme il manquait de gauchers dans l’effectif, j’ai accepté cette mission de dépannage. C’est sans doute la plus mauvaise décision que j’ai prise dans ma carrière car je n’étais pas moi-même sur cette portion du terrain et je ne m’y suis donc guère signalé sous mon meilleur jour. Un malheur ne venant jamais seul, j’ai également perdu, dans la foulée, mon statut d’international ».

Fredrik Söderström totalise cinq sélections jusqu’à présent, obtenues contre des petits poucets, comme la Jamaïque et la Suisse mais également contre des grandes nations du football, comme l’Italie et l’Angleterre. La page d’entrée de son site Internet est d’ailleurs illustrée d’une photo où on le voit prendre le meilleur sur le Transalpin Alessandro Nesta.

« C’est l’un des trois adversaires qui m’a le plus marqué, avec David Beckham et Zinedine Zidane« , remarque-t-il. « Ces derniers mois, je n’ai plus croisé de grands noms sur ma route dans la mesure où le coach Tommy Söderberg et son alter ego Lars Lagerbäck ne m’ont pas retenu sous prétexte que je n’occupais plus mes fonctions habituelles en formation de club. C’est à cause de cela que j’ai quitté temporairement Porto pour retrouver mon rôle de prédilection au Standard ».

Standard oui, Liège non

Depuis ses débuts contre Mons, le Suédois s’est affirmé de semaine en semaine comme l’un des pions majeurs chez les Rouches. Efficace à la récupération et précis à la relance, jamais économe de ses efforts et solide comme l’airain, Fredrik Söderström a trouvé sa place dans la ligne médiane d’une phalange liégeoise avec laquelle il espère bien arracher une qualification européenne cette saison par le biais de la Coupe de Belgique. En championnat, le Standard a sans doute concédé un retard quasi insurmontable sur le peloton de tête à l’approche de la mi-saison.

« J’avoue avoir sous-estimé quelque peu la valeur du championnat de Belgique », observe Fredrik Söderström. « J’imaginais qu’à l’image de ce qui se passe généralement au Portugal, trois équipes tenaient le haut du pavé ici, à distance respectable des autres. Je m’étais donc trompé car des formations comme le Lierse, Lokeren et St-Trond font réellement figure de giant-killers. Au Portugal, seul Boavista a rempli ce rôle ces dernières années. Mais, pour le reste, tout y est franchement prévisible ».

S’il apprécie le Standard où, selon ses propres dires, il a découvert de bons joueurs comme Ole-Martin Aarst, et Johan Walem, sans oublier cette ancienne connaissance du championnat portugais qu’est Almani Moreira, le Suédois est tombé nettement moins sous le charme de la Cité Ardente.

« J’ai troqué une ville industrielle pour une autre et, sur le fond, cela ne change pas grand-chose pour moi », dit-il. « Porto n’en était pas moins beaucoup plus propre que Liège. Toutes ces crottes de chiens sur les trottoirs, c’est répugnant. Quelle différence avec la Suède, où l’on peut pour ainsi dire manger par terre, tant tout y est net. Cet aspect-là me manque. Mais je ne suis pas pressé de rentrer pour autant. Je veux encore jouer quelques années. Et je suis ouvert à toute proposition. Comme rester plus longtemps au Standard, pourquoi pas? »

Preuve de sa bonne volonté, Fredrik Söderström s’est mis à l’apprentissage du français en attendant d’en faire de même en ce qui concerne le néerlandais. Les langues, pour tout dire, c’est son dada. Outre le suédois, notre homme parle également le danois, le norvégien, l’anglais, l’allemand, le portugais, l’espagnol et des bribes d’italien.

« J’ai toujours eu des facilités pour apprendre une langue étrangère », sourit-il. « Sauf pour le finlandais qui s’écarte complètement de la norme. J’espère qu’un jour je pourrai mettre à profit toutes ces connaissances. Comme traducteur par exemple. Car ma vie ne se limite pas qu’au seul football. Un bon livre ou un bon film me régalent tout autant qu’un bon match de foot ».

Bruno Govers

« J’ai été préféré à Mario Jardel »

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