Neil Warnock, ce poète

Si tous les chemins mènent à Rome, il y en a aussi beaucoup d’autres qui mènent au Graal du football. La Premier League. Pour un club gallois, le chemin est un peu plus long que pour les autres. Un peu plus âpre aussi mais l’essentiel est de savoir comment on veut y arriver et s’y tenir.

Cardiff City a employé sa méthode et s’y est tenu. Ça a marché. Pas vraiment joueurs, les Gallois. Dans ce sport de ballon, ils ont choisi de s’en priver au maximum pour un résultat maximum. Deuxième de Championship la saison dernière, ils accèdent directement à la cour des grands. Un accès direct. Comme leur jeu.

Des 24 équipes de D2, Cardiff est celle qui a réussi le moins de passes par match. Avec comme ambition première de dégager loin devant et de voir ce qui se… passe. C’est l’équipe qui a tenté le moins de passes dans son propre camp. L’abandon du ballon a pour conséquence de subir. Mis à part le 21e, Bolton, ce sont eux qui ont dû le plus défendre. En moyenne, sa défense devait protéger son rectangle 66 fois par…match.

Si, si. La solution est venue des phases arrêtées. Personne n’a fait mieux. 21 buts. Une vraie identité qui fait honneur au résultat et à l’objectif. Quoi d’autre quand l’entraîneur s’appelle Neil Warnock. Une sorte d’ovni qui maîtrise mieux le combat que le jeu. 69 ans. Cardiff est son 15e club.

Cet été, il a fêté sa 8e montée en division supérieure. Un record dans les ligues professionnelles anglaises. Sa 4e parmi l’élite. Record également partagé avec l’ex-gloire de Manchester United, Steve Bruce. Un autre poète du foot anglais. Une autre gueule cassée pour qui l’éloge du beau passe par le lifting du résultat.

Mais ce qui rend Warnock unique, c’est que chaque fois qu’il a fait monter une équipe au sommet du foot anglais, elle est redescendue directement. Avec ou sans lui car il n’a pas toujours fini la saison. Mais lui, on n’a pas fini d’en parler. Personnage hors norme. Il s’est pris la tête avec tout ce qui fait le foot depuis 35 ans. Ses joueurs, ses dirigeants, ses supporters et surtout les arbitres. Lui qui a sa licence… d’arbitre.

Il était le coach de Sheffield United quand un match contre WBA a dégénéré en boucherie et a dû être arrêté. Trois exclus, plus deux blessés. Reste six joueurs, pas assez. Après le match, il déclare que l’arbitre l’a sûrement pris pour Oussama Ben Laden.

Sa poésie verbale a certainement connu son ode la plus célèbre quand il traite El Hadji Diouf de rat d’égout. En s’excusant d’insulter les rats. Précisons que Diouf est l’un de ses joueurs. Le plus surréaliste, c’est que quelques saisons plus tard, quand il coache Leeds, il demande à Diouf de venir dans son équipe. Ce que le Sénégalais accepte.

Quand il quittera ce monde, il a déjà déclaré que, dans les stades, il ne veut pas avoir sa minute de silence en sa mémoire mais bien une minute d’insultes à son encontre de la part de tous les supporters avec qui il s’est pris la tête. Magnifique de cohérence. Une cohérence aussi qui se retrouve à Cardiff City.

Un club repris en 2010 par le milliardaire malaisien Vincent Tan. Lui aussi grand Maître dans l’art de se faire aimer. Alors que Cardiff joue en bleu depuis 104 ans, Tan décide que les nouvelles couleurs seront le rouge. Pour être sûr que l’incompréhension vire à la haine, il change aussi l’écusson du club. Rien de tel pour se faire aimer de ses propres supporters. Après trois saisons, il fera un geste, Cardiff jouera en bleu à domicile. Y a pas à dire, le foot est un sport formidable…

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