Ne plus se voiler LA FACE

« Quand je jouais, si quelqu’un touchait un arbitre, il était suspendu pendant trois ans « , rappelle Ariel Jacobs dans notre Dossier sur l’arbitrage belge, qui commence en page 52. Aujourd’hui, les joueurs touchent les arbitres, leur crient dessus, les poussent même en faisant semblant qu’ils ont été eux-mêmes bousculés. Une chose est absolument sûre : les professionnels (joueurs et entraîneurs) utilisent tous les trucs pour essayer d’obtenir ce qu’ils veulent de l’arbitre Ce n’est pas qu’ils disjonctent, ils sont programmés pour être indisciplinés, non fair-play.

René Vandereycken ne s’est jamais caché pour dire qu’il fallait toujours critiquer les décisions de l’arbitre parce que ça finissait toujours par rapporter. Il le faisait sur le terrain quand il était le joueur le plus cynique de l’histoire du football belge et puis comme entraîneur.

Au temps où Jacobs jouait, on n’utilisait pas autant les bras non plus, mais LE FAIR-PLAY N’EST PLUS CE QU’IL ÉTAIT. Il existe encore dans le football professionnel, mais n’est l’apanage que des joueurs de classe, ceux qui considèrent encore le foot comme un sport technique. Ceux qui ne valent que par le physique voient les choses autrement. Des dizaines de joueurs exigent des arbitres qu’ils soient plus justes dans leurs décisions alors qu’eux-mêmes sont prêts à marcher sur un adversaire pour gagner.

Que ceux qui exigent l’apport de la technologie pour rectifier les erreurs d’arbitrage plaident donc aussi pour l’emploi de l’image pour punir a posteriori des gestes antisportifs.

Mais quand on passe au crible toutes les activités sportives professionnelles au monde, le football est sans conteste celle où règne le plus grand flou. En tennis, un appareil électronique signale si le service est bon ou non. En football américain, on arrête le jeu pour étudier une phase litigieuse sur vidéo. En NBA, les joueurs n’ont pas intérêt à donner des coups dans le dos de l’arbitre car il y aura toujours une image pour le prouver. En golf, les joueurs ne trichent pas car les spectateurs peuvent le rapporter à l’arbitre en chef. En athlétisme, un sprinter est exclu s’il réagit un micro millionième de seconde trop tôt car ses starting-blocks sont truffés de puces électroniques. Etc. En foot, on jette les équipes et les arbitres dans l’arène et on les laisse se débrouiller.

Il y a souvent de la casse parce que le football est arbitré de façon préhistorique û même à la Coupe du Monde û par rapport aux normes des autres sports et à la technologie disponible. Alors, ou bien on se targue d’être romantique et/ou philosophe quand on aime le football et on accepte que tout û dans un match, un tournoi, un championnat û finit par s’équilibrer, ou bien on se pose des questions fondamentales.

C’est toujours aux joueurs et aux fans qu’on demande de gérer leurs émotions. Comme lors du but de Marc Wilmots refusé contre le Brésil au dernier Mondial ou lors du penalty non sifflé sur Emile Mpenza à Gand. Les arbitres ont le droit de se tromper :  » C’était difficile à voir, ça allait trop vite, c’est facile quand on revoit tout à la télévision… « . Et blablabla, et blablabla. C’est vrai mais ça ne fait pas avancer les choses et les retouches réglementaires ne sont jamais que des sparadraps sur des ligaments croisés déchirés.

L’ International Board pue effectivement la naphtaline, mais le football n’est-il pas aussi le sport le plus injuste au monde dans son essence ? Dans aucun autre sport collectif ou de balle, l’adversaire faible qui défend avec les moyens du bord n’a plus de chances de gagner sur LA contre-attaque chanceuse. C’est cette injustice latente, propre au foot, qui fait dire froidement et avec paternalisme aux décideurs de la FIFA :  » C’est ça le football « . Oui mais, face à la modernité ambiante, c’est une notion dépassée. Ça nous fait penser à l’époque où ces mêmes bonzes disaient que le dopage n’existait pas en football.  » Parce que c’est un jeu de technique, de finesse « , disaient-ils. La FIFA a bien dû enlever ses £illères : le dopage existe dans le football et pour l’arbitrage, c’est la même chose. On ne peut plus se voiler la face.

par John Baete

 » Les problèmes d’arbitrage nous font penser au temps où la FIFA DISAIT QUE LE DOPAGE N’EXISTAIT PAS « 

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