Ne pas lire que le jeu !

La lecture. Un moyen de faire disparaître le temps. Le bonheur d’être coupé du monde. Voilà ma première addiction. «  C’est pas moi qui cause, c’est Frédéric Beigbeder, l’écrivain jet-setteur qui n’a pourtant pas qu’une addiction ! Mais il a raison, faut lire, impérativement, et faut même lire foot si l’on aime que le foot : ça permet d’aimer en prenant du recul, et Dieu sait que ça nous manque dans le monde du foot, le recul… à part sur le terrain quand on est enfoncé ! J’ai donc scouté pour vous cinq bouquins footeux pas dégueu : quelques livres en plus, pour quelques feux de bengale en moins, qui sait ? Faut s’accrocher, faut y croire… Et puis, les fêtes approchent, y’a pas que les sacs de sport, PES 2013 ou les vareuses floquées/Messi : un bouquin, c’est plus qu’un cadeau, c’est une offrande.

Si vous doutez parfois que nos stars soient clean par rapport au dopage, vous douterez encore un peu plus en lisant Dernier shoot pour l’enfer (1) : c’est un polar en même temps qu’un docu-fiction, par lequel l’auteur chamboule le mythe du Mondial 98. Mêlant les faits avérés et les rumeurs troublantes, Ludo Sterman, un ancien de L’Equipe, réécrit la victoire française via l’enquête d’un jeune journaliste tentant de comprendre la mort, dès 2006 peu après son célèbre coupde boule, d’Angel Novella, qui fut la star des Bleus : ce qui va engluer l’enquêteur dans le monde du foot-business, de la raison d’Etat et du dopage organisé. Est-ce de la fiction un peu, beaucoup… ou pas du tout ? Impossible en tout cas, après cela, d’encore voir Zizou et les autres, avec le même regard !

Si vous préférez les histoires courtes, à déguster durant les mi-temps, elles sont 30 par 30 jeunes auteurs ayant reçu carte blanche, dans le recueil Bordel Foot (2). C’est une mosaïque d’imaginaires à base de ballon rond, cela va des souvenirs d’enfance à la gonzesse qui kidnappe Eric Cantona, en passant par une figurine de baby-foot nous racontant sa vie solitaire de p’tit bonhomme en bois coincé dans sa barre métallique… Originalité, nombre de ces nouvelles sont l’£uvre de femmes et mettent en scène des passionnées autant que des irritées : à intégrer dans un grand débat sur la paix des ménages !

Si vous aimez le foot et les romans, plongez-vous dans Savoir perdre (3). David Trueba est un copain de Pep Guardiola, mais l’histoire qu’il raconte, douce-amère, se passe à Madrid : Sylvia y tombe amoureuse d’Ariel, jeune footballeur argentin plutôt paumé durant sa première saison au Real. La description du milieu pro est sans concession, mais le foot n’est que partie de l’intrigue : par la famille de Sylvia, Trueba déborde d’empathie pour le petit peuple, ses tristesses, ses emmerdes, ses désillusions. Magnifique, dense, et pas compliqué du tout. Coup de c£ur !

Si les thrillers vous détendent, vous dévorerez Tu ne marcheras jamais seul (4), pour lequel un journaliste de foot et un auteur de polars ont mixé leurs compétences. Ça rappelle les polars sportifs d’ Harlan Coben sans en atteindre toutefois le niveau, et le dénouement est ici un peu grand-guignolesque. Mais ça déménage, en grouillant de corruption, mafia russe, sex and drugs, meurtres, argent noir, foot bizness, dopage et même clonage !

Enfin, si vous êtes un footballeur amateur acharné, mais au sein d’une équipe du 36e dessous, ce depuis des années mais sans pouvoir vous passer de foot, vous boirez du petit lait à la lecture d’ Un footballeur (5) : Bruno Heckmann nous conte les aventures d’Antoine, petit fonctionnaire et joueur corpo de foot à 7 (ça existe en France, sur terrain à dimensions réduites, et avec autoarbitrage !) qui reste raide dingue de foot en dépit de résultats continuellement foireux. C’est une ode à tous les footballeurs anonymes, truffée d’humour et de dérision, dépeignant joliment les arcanes de la passion/foot. Adorable. A découvrir par tous les grands enfants que nous sommes restés, de par la magie de ce fichu ballon. Bonnes lectures.

(1) L. Sterman, éd. Fayard, 2012

(2) Collectif, éd.S. Million, 2012

(3) D. Trueba, éd. Flammarion, 2010

(4) K. Nedjari et E. Giacometti, éd.M. Lafon, 2009

(5) B. Heckmann, éd. Belfond, 2010

 » Quelques livres en plus pour quelques feux de bengale en moins, qui sait ? « 

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