N° 1 Joseph Akpala (Club Bruges)

L’ex-Carolo est considéré comme la meilleure pioche de l’été. Au contraire du Néerlandais Arnold Kruiswijk…

Arrivé cet été de Charleroi avec une étiquette de meilleur buteur du championnat, le Nigérian était pourtant attendu au tournant. D’abord parce que son faible ratio pour un meilleur buteur (18 buts) n’en faisait pas un renard des surfaces confirmé. Ensuite parce qu’Akpala avait connu un gros passage à vide la saison passée, signe qu’il devait encore apprendre à conjuguer rentabilité avec régularité. Enfin, parce qu’il quittait un club où il n’avait pas beaucoup de pression pour un des grands cercles belges.

Le passage est réussi puisque, après 11 journées, le Nigérian se trouve en bonne position au classement des buteurs. Son duo avec Wesley Sonck fonctionne à merveille. D’un côte la roublardise, l’expérience et le sens du but pour notre international ; de l’autre la vitesse, un physique de déménageur et du poids sur les défenses adverses. Depuis qu’il est arrivé en Belgique, Akpala progresse chaque saison. A ce rythme-là, on ne voit pas qui pourrait lui contester la place de meilleur buteur.

Un matin à Bruges. NabilDirar, ElrioVan Heerden et LaurentCiman plaisantent, après l’entraînement. Ils s’adressent à JosephAkpala en français ou en anglais. Akpala :  » Nous utilisons généralement l’anglais. Les hispanophones tentent de le parler, les joueurs flamands aussi et avec les francophones qui peinent davantage en anglais, je m’exprime en français. Les Flamands m’apprennent leur langue. Je ne suis pas de cours organisés comme à Charleroi car notre programme est trop chargé mais j’essaie d’apprendre quelque chose tous les jours.  »

Après la douche et une partie de billard avec Dirar, il arrive, de bonne humeur :  » Je suis satisfait puisque tout va bien. Je marque régulièrement mais ce n’est pas l’essentiel, vraiment. Deux choses comptent à mes yeux : marquer et participer au jeu, aider l’équipe. Je n’attends pas dans le rectangle. Si je ne marque pas dans le premier quart d’heure, j’essaie d’aider l’équipe autrement. Tout devient plus aisé quand le premier but est inscrit. L’équipe passe certainement avant moi. « 

 » La sieste pour tenir sur le terrain « 

La vie parmi l’élite est tellement confortable ?  » Le football est plus facile ici car je suis entouré de plus de talents « , explique Akpala.  » Les joueurs gèrent mieux les différentes situations, je dois simplement veiller à hausser mon niveau technique. Ensuite, j’observe les images de mes matches afin de voir comment progresser. Ce n’est pas un sacrifice. L’essentiel, à quelque niveau que ce soit, est d’aimer ce qu’on fait. Et j’aime mon métier. Quand on éprouve du plaisir à travailler, on ne voit que les avantages de son métier. Je ne suis pas à un effort près, même si parfois, je ne tiens que 50 ou 60 minutes, quand les matches se succèdent rapidement, mais je suis incapable de me dissimuler dans une partie pour récupérer. De toute façon, l’énergie que j’insuffle à mon jeu facilite la tâche des autres et me profite également. « 

Son agenda est plus chargé mais il s’en accommode.  » A Charleroi, j’avais pris l’habitude de faire une sieste l’après-midi. Une demi-heure, une heure. Un power nap. Je garde ces bonnes vieilles habitudes.  »

 » La tristesse nuit à la santé « 

Pas de chaînes en or ni de bling bling, pas de gsm sur la table, comme c’est si souvent le cas des footballeurs.  » Les choses matérielles ne peuvent nous influencer. Je gagne évidemment davantage maintenant, parce que j’ai un don et que je suis privilégié, mais l’argent et la prospérité ne peuvent influencer un caractère. Vous devez rester vous-même. Sinon, vous perdez pied, votre personnalité, votre talent et vous galvaudez votre carrière. On peut soigner sa présentation, évidemment ; cela ne devient problématique que quand celle-ci détermine votre comportement et vos émotions.  »

Les Belges sont-ils trop tristes ? Akpala éclate de rire :  » Quelque part oui. On oublie que le simple fait d’être en vie est une raison d’être heureux. Si je suis triste aujourd’hui, par exemple parce que je n’ai pas d’argent, mais que je suis en vie, je dois tirer de la force de ce constat : cela ne peut qu’aller mieux. Il faut donc rire. La philosophie africaine… La tristesse nuit à la santé. Même quand les choses ont l’air d’aller mal, ce n’est pas le cas car on vit. Je peux me fâcher mais ces colères ne durent jamais. « 

Pour Joseph, on forme soi-même sa personnalité. Elle ne dépend pas de l’école ni de l’éducation.  » Des gens ont longtemps fréquenté l’école sans avoir de bonnes manières. Mais on peut s’auto-influencer. Quand on ne vit pas correctement, on peut apprendre auprès des autres comment se comporter. « 

 » J’ai toujours été contre les groupies « 

Akpala ne dépensera jamais son argent en femmes :  » C’est aussi une question de discipline. Je ne me vois pas sortir avec une fille une semaine puis une autre la semaine suivante. Ce n’est pas une vie équilibrée. Peut-être sort-on avec des femmes qui ont envie d’être vues à vos côtés ou qui aiment la vie nocturne. Il est alors impossible de se reposer… A onze ou douze ans, je savais déjà que je ne voulais pas être entouré de groupies. « 

Il a une amie au Nigeria et communique par internet. Mais leur relation n’est pas assez avancée pour qu’il la fasse venir en Belgique :  » Avoir une amie est une chose, se marier en est une autre. La distance qui nous sépare ne me dérange pas. « 

 » Pourquoi boire de l’alcool ? »

Akpala ne boit jamais d’alcool. Le Standardman Dante (qu’il a connu à Charleroi où ils sont arrivés en même temps en janvier 2006 et ont passé un an ensemble) , avait organisé une fête d’anniversaire surprise pour lui, à son domicile. Il a honoré la fête de sa présence, puisqu’il était le premier concerné mais il n’a pas bu une goutte d’alcool. Par principe, un choix que les autres ont respecté.

 » Pourquoi boire de l’alcool ? Je ne veux pas. Je ne veux pas goûter car si je le fais, je ne boirai peut-être pas le mois suivant mais la tentation reviendra peut-être. Et elle pourrait alors se muer en habitude. Ce n’est pas bon pour moi, donc je m’abstiens. « 

 » L’argent rend fainéant « 

Il s’investit aussi d’une mission sociale.  » Je suis encore trop jeune pour mettre sur pied une £uvre mais je le ferai plus tard. C’est la meilleure façon d’atteindre les jeunes et d’aider ma communauté. Je pense à une aide sous forme de kits, d’équipements ou à l’enseignement. Beaucoup d’enfants veulent aller à l’école mais n’en ont pas les moyens. Donner de l’argent ne constitue pas une solution et je ne le ferai pas. Il faut mettre sur pied des structures, éventuellement des bâtiments, des choses concrètes. L’argent est une aide à court terme mais il rend les gens fainéants, dépendants de la prochaine enveloppe. Nous avons une devise, au Nigeria : – Ne me donnez pas de poisson, apprenez-moi à pêcher.

 » Dans le choc avec Bailly, j’ai respecté l’arbitre « 

Joseph est extrêmement religieux. Il est pratiquant et fréquente une église américaine à Bruxelles. L’étude de la Bible est une occupation quotidienne pour le Brugeois d’adoption.

 » Mais il est interdit d’imposer son dieu à un autre. Chaque individu est libre de faire ce qu’il veut. Je n’essaie pas de vous convertir. Plusieurs voies mènent à dieu, chacun choisit la sienne. La religion n’est ni de la politique ni du commerce. Il ne faut jamais demander de l’argent au nom de dieu… « 

Et sa réputation de killer sur le terrain ? Il sourit :  » Je respecte ceux qui voient les choses sous un autre angle, comme l’arbitre.  » Il fait référence à l’incident avec Logan Bailly : après leur choc malencontreux, il a été exclu.  » Sur le terrain, je n’ai pas compris pourquoi je recevais la carte rouge. En revoyant les images, je pense que jamais l’arbitre ne l’aurait sortie s’il les avait vues. Mais je respecte sa décision…  »

dossier de stéphane vande velde (texte akpala : Peter ‘t kint)

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire