Mozart vous salue bien

Comment se portent les joueurs belges en Premier League ? Entre deux matches internationaux, nous avons fait un saut jusqu’à Manchester, où un musicien a fait le show.

Nous ne sommes pas seuls à nous rendre à Manchester pour y assister au match entre City et Tottenham. Vital Borkelmans entame un périple qui, en une semaine, le mènera ensuite à Liverpool, Lokeren, Birmingham, Rome, Anderlecht et Glasgow. A l’Union Belge, on ne badine pas avec le scouting. Borkelmans a promis à sa famille qu’après le 16 novembre, il aurait un peu plus de temps à lui consacrer.

La saison dernière, les matches opposant VincentKompany au trio Nacer Chadli-Moussa Dembélé-Jan Vertonghen avaient engendré beaucoup de buts : 6-0 à l’Etihad, 1-5 à Londres. Trente buts avaient été inscrits lors des six dernières confrontations. Ce dimanche, c’est la troisième fois que ManuelPellegrini affronte les Spurs, qui ont chaque fois un entraîneur différent : d’abord André Villas-Boas, puis Tim Sherwood et enfin Mauricio Pochettino, deuxième coach argentin de l’histoire de la Premier League après Ossie Ardiles.

Pochettino, c’est l’école Marcelo Bielsa : exigeant, amateur de pressing haut, de spectacle et de football offensif. C’est l’actuel entraîneur de l’OM (v.p. 59sqq) qui a lancé jadis cet ancien défenseur central à Newell’s Old Boys avant qu’il ne débarque en Espagne (Espanyol) et en France (PSG et Bordeaux).

Généralement, les Argentins retournent chez eux pour effectuer leurs débuts en tant qu’entraîneurs. Pochettino n’est pas passé par là. C’est pour ça qu’en Argentine, on dit qu’il entraîne à l’européenne. Son truc, c’est l’engagement, la reconversion, la verticalité. Cela lui a permis de gagner au Camp Nou avec l’Espanyol, qu’il a sorti des profondeurs du classement avant de tenter sa chance à Southampton, en janvier 2013.

Il s’y est fait remarquer au point d’être acclamé par Sir Alex Ferguson. Les journalistes, eux, le trouvaient bizarre parce qu’il emmenait toujours un traducteur avec lui aux conférences de presse, histoire d’éviter les questions dérangeantes.  » Bobby Robson et DavidBeckham faisaient la même chose en Espagne « , dit-il.

Fin mai, il est devenu le dixième entraîneur engagé par Tottenham depuis 2001. Ses deux missions : ramener le club en Ligue des Champions et améliorer le rendement de Roberto Soldado et Eric Lamela.

Chargés de faire oublier Gareth Bale, ces deux joueurs ont connu une première saison difficile. Soldado (29) ne rapportera plus grand-chose mais la valeur marchande de Lamela (22), arrivé de Rome, peut encore progresser. Mais pour cela, il faut qu’il s’intègre. Pas facile avec un staff pratiquement entièrement latin. C’est pourquoi le président Levy a ordonné que désormais, tout le monde s’exprime en anglais.

Courants d’air

En descendant du taxi, on aperçoit au loin le tout nouveau complexe d’entraînement de City : 17 terrains, une salle de fitness, un restaurant, des chambres… Pour la première fois, c’est là que le club a préparé son match.  » Quand on est là, on a du mal à rentrer chez soi « , dit Bacary Sagna, qui remplace Pablo Zabaleta au poste d’arrière droit.

Le stade est nettement moins impressionnant. Pas étonnant qu’on veuille le moderniser et l’agrandir. Comme toujours en Angleterre, il y a des portes partout. La salle de presse est bien trop petite et la sono ne fonctionne pas. On comprend à peine ce que dit l’entraîneur visiteur.

Le commentateur de Telenet est placé tout en haut du stade, en plein courant d’air. Le vent prend dans son micro. On nous explique que ces ouvertures sont nécessaires pour protéger la pelouse. Aujourd’hui, il ne fait pas froid mais en février… L’an dernier, nous avons vu Gérard Houllier claquer des dents.

Le match débute à 12 h 45, dans les odeurs de nourriture. Le stade est encore pratiquement vide au moment où les joueurs entament leur échauffement. Les 45.000 spectateurs n’arriveront que peu avant le coup d’envoi, juste à temps pour chanter Blue Moon. Le score étant déjà acquis (4-1), ils quitteront aussi le stade cinq minutes plus tôt. L’ambiance des stades anglais n’est plus ce qu’elle était.

A Tottenham, qui n’a gagné qu’un match sur six avant le coup d’envoi, Nacer Chadli est le seul Belge titularisé. Il est impliqué dans cinq des neuf buts inscrits par son équipe jusqu’ici : quatre inscrits et un assist.

Les Spurs jouent en 4-2-3-1, Soldado étant soutenu par trois numéros dix. Chadli démarre à gauche mais il doit constamment switcher avec Christian Eriksen et Lamela. Tottenham se crée la première occasion mais Ryan Mason (23) la manque.

Il a été préféré à Dembélé, à qui Villas-Boas faisait confiance. Pochettino aime lancer des jeunes et prône un jeu plus vertical. La saison s’annonce donc difficile pour l’Anversois. D’autant que Pochettino aime les battants. Dembélé entrera cependant au jeu en deuxième période et ne perdra pratiquement aucun ballon mais les Spurs manqueront un penalty et City en transformera un.

Agüero force 4

L’absence de Vertonghen est plus surprenante, même si c’est pas la première fois. Pochettino lui avait déjà retiré le brassard de capitaine en début de saison pour le confier à YounesKaboul. Vertonghen n’est même plus vice-capitaine puisque ce rôle a été dévolu à Hugo Lloris et Emmanuel Adebayor.

Dans l’équipe, il a dû céder sa place à l’Argentin Federico Fazio, ex-Séville, titularisé pour la première fois. Ni lui ni Kaboul n’ont cependant trouvé la solution face à Sergio Agüero, sans doute le meilleur attaquant du moment en Angleterre, avec Diego Costa. Vertonghen entrera au jeu en deuxième mi-temps après l’exclusion de Fazio mais il ne fera guère mieux et Agüero inscrira trop facilement son quatrième but de la journée.

Dembélé et Vertonghen, formés à l’école hollandaise, aiment anticiper et jouer sur leur placement. Ils risquent d’en souffrir. Chadli, pour sa part, s’est montré plus discret que d’habitude tandis qu’en face, Vincent Kompany s’est contenté de jouer très sobrement.

Si City compte cinq points de retard sur Chelsea, c’est dû au départ difficile de Yaya Touré dans l’entrejeu et à la blessure de Sergio Agüero, qui avait aussi hypothéqué les chances de succès de l’Argentine en Coupe du monde. Edin Dzeko constitue certes une alternative en pointe mais Agüero est bien meilleur à la finition. Le voici désormais meilleur buteur (9 buts) à égalité avec Diego Costa. Et il a encore manqué un penalty.

Avant le match, Pochettino l’avait comparé à Mozart. Pas à Beethoven, trop désordonné selon lui. L’an dernier, Pellegrini l’alignait aux côtés de Dzeko. Maintenant, il joue avec David Silva en pointe et Jésus Navas pour fournisseur sur le flanc. Le nombre de joueurs de talent en Premier League est impressionnant. Reste à voir si ce sera suffisant sur le plan européen car City, qui n’a pris qu’un point sur six en Ligue des Champions, est déjà obligé de s’imposer à Moscou pour rester dans le coup. La semaine prochaine, Manchester United affronte Chelsea et la semaine suivante, c’est le derby mancunien. On saura alors si la lutte pour le titre se jouera à deux ou à trois. Les journalistes anglais, eux, aiment opposer les entraîneurs. Ce fut longtemps Ferguson vs Arsène Wenger puis JoséMourinho contre tous les autres. Maintenant, c’est Pellegrini-Mourinho. L’Argentin passe pour un gentleman mais à l’intérieur, c’est un volcan que les Anglais veulent voir exploser.

Petite équipe

Avant City-Chelsea, le 21 septembre, ils y sont arrivés. Mourinho avait alors appelé son rival Pellegrino (comme l’eau). Après le match (1-1), celui-ci affirma que Chelsea était « une petite équipe » qui ne faisait que défendre, la comparant à Stoke City. Ce qui, en Angleterre, constitue une insulte.

Dans les autres matches, pourtant, Chelsea joue l’attaque. Mourinho osera-t-il le faire face à Louis van Gaal ? Nul doute que Mozart et Cie suivront cela de très près.

PAR PETER T’KINT, ENVOYÉ SPÉCIAL À MANCHESTER – PHOTO: BELGAIMAGE

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