Moussa Sow

Voici pourquoi l’international sénégalais explose et marque comme il respire à Lille… et pourquoi il ne faut pas encore le juger définitivement.

Moussa Sow est un attaquant possédant de grandes qualités physiques. Que ce soit sur les premiers pas ou sur 40 mètres, il se montre véritablement insaisissable pour les défenseurs adverses. Il dégage une certaine puissance, que ce soit avec ou sans ballon. Son explosivité se remarque également sur ses appuis qui font de lui un joueur aérien.

C’est un vrai guerrier. Il ne relâche jamais la pression sur les défenseurs adverses et se sent comme un poisson dans l’eau quand il est à la lutte avec son opposant direct. Il se sert remarquablement des bras et adore quand la situation impose d’utiliser la charge épaule contre épaule. Il est constamment à l’affût dans les 16 mètres et il émerge régulièrement d’une forêt de joueurs en zone de finition.

Le jeu de tête est certainement une de ses plus grandes qualités. Sa taille (1m80) n’est pas exceptionnelle pour un attaquant de pointe mais il peut compter sur un excellent timing et surtout une détente extraordinaire. Non seulement son jeu de tête offensif est excellent (c’est lui qui, généralement, va au duel avec le gardien qui sort) mais de plus, son coach lui demande de revenir sur phases arrêtées défensives.

Il possède une frappe de balle de bon niveau. Bien que droitier, il se débrouille également très bien du gauche. C’est surtout quelqu’un qui ne se pose pas trop de questions quand il est en situation pour tirer au but. Son audace et son envie de faire mal lui permettent d’imprimer beaucoup de puissance à ses envois.

Techniquement, il maîtrise tous les gestes basiques relatifs à son rôle d’attaquant de pointe. Ses contrôles et ses enchaînements sont réalisés dans le sens du jeu et, quand il doit évoluer en pivot, dos au but, sa couverture de balle lui permet de rejouer en appui sans trop de problème.

L’international sénégalais a un côté spectaculaire qui plaît beaucoup aux supporters. Ses retournés acrobatiques (le but marqué contre Lyon à Gerland en atteste parfaitement, même si il se trouvait en position hors-jeu) sont désormais une marque de fabrique du Nordiste. Son agilité est un atout indéniable quand il doit se sortir des situations les plus difficiles.

Moussa est typiquement un attaquant de rupture qui adore demander le ballon dans la profondeur. Ses appels sont tranchants et il aime évoluer à l’extrême limite du hors-jeu. Il se place à hauteur du dernier défenseur et il fait preuve d’un très bon feeling pour solliciter le ballon au bon moment. Il raffole aussi se mettre en position illicite derrière la défense pour ensuite se remettre en jeu en revenant en arrière. Cette attitude accroît la difficulté pour l’opposant à réaliser un marquage strict.

Il peut évoluer à toutes les positions de l’attaque. Ayant déjà presté comme joueur de flanc côté gauche, il est également capable de le faire à droite. Toutefois, c’est dans l’axe qu’il est le plus dangereux et cette propension à pouvoir changer de poste fait de lui un élément doté d’une certaine polyvalence.

A 25 ans, il possède encore une grande marge de progression lui : il n’explose que depuis le mois d’août 2010. Il a inscrit autant de buts cette saison que sur l’ensemble de sa carrière, c’est tout dire !

La remise en question de l’ancien joueur de Rennes va devoir être digne du top niveau qu’il a enfin atteint. La saison prochaine sera celle de la confirmation, la plus difficile pour un sportif professionnel. Et s’il décroche le titre de meilleur buteur du championnat de France, la pression sera encore plus grande sur ses frêles épaules. Si Lille se qualifie pour la Ligue des Champions, ils vont probablement renforcer le groupe, d’où une plus grande concurrence. Il faudra être fort dans la tête pour gérer tous ces paramètres.

Tactiquement, il a encore pas mal de pain sur la planche. Il évolue davantage de manière instinctive plutôt qu’en s’intégrant dans un schéma collectif précis. Son coach va devoir trouver le juste milieu, en l’intégrant davantage dans le projet d’équipe sans pour autant lui ôter sa part de créativité, un de ses atouts majeurs. L’analyse de la situation n’est pas toujours judicieuse. Par exemple, en débordement, si un centre du pied gauche s’impose, il va choisir l’extérieur du pied droit avec pas mal de déchets à la clé.

Le jeu en perte de balle fait manifestement partie de ses principales lacunes. Il se sent peu concerné par la reconquête du ballon et son positionnement pour couper les angles est loin d’être au point. Il réalise un press instinctif quand il se trouve tout près du porteur du ballon mais sur 90 minutes, il arrache très peu de ballons dans les pieds adverses.

L’ancien joueur de Sedan ne peut pas être répertorié dans la catégorie des grands dribbleurs. Ses crochets manquent de finesse et quand il élimine son adversaire en 1 contre 1, c’est plus grâce à sa puissance physique ou à l’utilisation de son corps et de ses bras, que par une trouvaille digne des plus grands techniciens. Eliminer trois adversaires sur quelques mètres carrés est pour lui mission impossible ou alors avec le concours de dame chance.

Le jeu en combinaisons, courtes ou longues, n’est pas sa plus grande spécialité, certainement dans les situations dos au but. Il préfère conserver le ballon pour attendre le soutien court du partenaire plutôt que de remiser ou de jouer en déviation, le tout en première intention. Par contre, en conduite de balle vers l’avant, il parvient à rechercher le 1-2 pour éliminer l’adversaire.

Bien que les stats de cette saison tendent à prouver le contraire, Moussa ne peut pas encore être catalogué comme vrai buteur. C’est quelqu’un qui a besoin de confiance (comme tous les attaquants d’ailleurs) pour donner la pleine mesure de son talent. Il va certainement connaître une période de moindre conjoncture (sinon il aurait explosé bien avant) et c’est à ce moment-là, que l’on va pouvoir juger si la période faste qu’il connaît actuellement va pouvoir se répéter. Si c’est le cas, on pourra revoir son jugement sur le joueur.

Bien qu’il soit capable d’évoluer dans tous les rôles offensifs, son volume de jeu pourrait être nettement plus consistant. Quand il décide de permuter sa position soit avec Gervinho soit avec Eden Hazard, il reste souvent scotché durant plusieurs minutes dans sa zone. Une plus grande variété dans les courses le rendrait plus imprévisible et peut-être encore plus performant.

NÉ EN 1963, ÉTIENNE DELANGRE JOUA COMME DÉFENSEUR AU STANDARD DE 1981 À 1992 (267M EN D1 ET 6B, CHAMPION EN 82 ET 83). EX-CHARGÉ DE COURS À L’ÉCOLE DU HEYSEL, IL COACHA DE LA P1 À LA D1 (CHARLEROI).

PAR ÉTIENNE DELANGRE

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