Mouscron 12 POINTS

Le club hurlu comptait 11 points après cinq journées de championnat. Depuis lors, il n’en a plus pris qu’un seul. Pourquoi ?

Lors de la première journée de championnat, l’Excelsior Mouscron avait surpris tout le monde en battant Anderlecht 2-0 de façon tout à fait méritée. Son nouvel entraîneur, PhilippeSaintJean, était porté sur un piédestal. Sa science tactique et sa gestion des ressources humaines avaient, déjà, fait merveille. Les matches suivants allaient confirmer cette bonne entrée, du moins dans les chiffres : après cinq matches, les Hurlus comptaient 11 points sur 15. Depuis lors, la machine s’est enrayée. Trois défaites d’affilée (à La Louvière, contre La Gantoise et au Standard), suivies d’un partage peu glorieux concédé samedi contre la lanterne rouge ostendaise, ont remis les Hurlus les pieds sur terre. Quelles sont les raisons de cette baisse de régime ? Et quelle est la vraie valeur de l’Excel ? Comme toujours, entre l’euphorie du début de saison et la mini-crise de ces dernières semaines, la vérité se trouve probablement au milieu. En 12 points (autant que ceux comptabilisés au classement), on peut comprendre la situation.

A-t-on surestimé le potentiel des Hurlus ?

1. LA VALEUR DE L’ÉQUIPE. La victoire contre Anderlecht, qui fut suivie d’autres prestations très encourageantes, a sans doute donné une fausse idée de la valeur réelle de l’Excel. Car û on l’avait presque oublié û le club a perdu, durant l’intersaison, quatre pions essentiels : la tour de la défense ( StephenLaybutt), le moteur de l’entrejeu ( SteveDugardein) et les deux attaquants les plus prolifiques ( MboMpenza et LuigiPieroni). Soit toute la colonne vertébrale de la formation qui avait terminé cinquième du championnat précédent. Aucune équipe ne se remettrait d’une telle saignée. D’autant que, pour remplacer ces joueurs majeurs, on a surtout puisé dans les divisions inférieures. Et, à ce niveau-là, il n’y a pas de miracles.

2. LES AMBITIONS. Les belles prestations du début de saison ont laissé croire que l’Excel pouvait être un candidat à l’Europe. Jamais Philippe Saint-Jean, ni la direction, n’ont évoqué cette perspective. L’ambition de départ a toujours été de reconstruire une équipe, de veiller à la pérennité du club et d’éviter d’être mêlé à la lutte contre la relégation. Au soir de la quatrième journée, alors que l’Excel avait concédé un partage douloureux à Lokeren, Saint-Jean avait déclaré à l’écoute des autres résultats :  » La victoire du FC Brussels au Standard est une mauvaise chose pour nous, car elle a offert trois points inattendus à un concurrent direct « .

A l’époque, on avait souri de cette déclaration. Aujourd’hui, force est de constater qu’elle était empreinte de beaucoup de réalisme.

3. LE PROGRAMME. Le calendrier du début de saison n’était, certes, pas facile. Mais la suite l’était encore moins. Philippe Saint-Jean craignait la deuxième période de quatre matches.  » C’était le mois de la confirmation, et on l’a complètement loupé « . Dans l’absolu, perdre à La Louvière et au Standard entre dans la logique des choses. Etre battu à domicile contre La Gantoise n’a rien d’anormal non plus.  » Gand est une équipe du Top 5 « , rappelle Philippe Saint-Jean.  » Et la perspective, pour beaucoup de joueurs, de rencontrer leur ancien entraîneur rendait le contexte de cette rencontre très spécial. Cela les a bloqués « .

La suite du programme est, théoriquement, plus facile.  » A l’exception de Bruges et de Charleroi, on a déjà joué contre toutes les équipes qui nous précèdent « , constate Philippe Saint-Jean.  » Les adversaires qui se présenteront à nous prochainement, à savoir Westerlo en déplacement, le Lierse à domicile, le Germinal Beerschot à l’extérieur et Charleroi au Canonnier, seront plus abordables et il faudra se mettre la pression pour gagner un match sur deux « . Le problème, c’est qu’entre-temps, la confiance qui animait les Hurlus s’est étiolée.

La stabilité était la clef des succès

4. LE DÉROULEMENT DES MATCHES. Les nombreux points obtenus en début de championnat ont peut-être également donné une fausse idée de la valeur réelle de l’équipe. Car, à y regarder de plus près, on constatera que les partages ramenés de Genk et de Lokeren étaient flattés, et que la victoire conquise face à Beveren l’était tout autant. Pour le même prix, les Hurlus auraient pu compter quatre points de moins et le doute se serait alors installé bien plus tôt. Au stade Fenix, il a fallu un grand FranckyVandendriessche pour garder les filets inviolés. A Daknam, l’équipe waeslandienne aurait pu mener 2-0 après 20 minutes et s’est désunie lorsqu’elle a perdu sur blessure ses deux éléments les plus dangereux, RunarKristinsson et Tailson. Contre Beveren, les Hurlus ont longtemps subi la domination des visiteurs et leur victoire a été facilitée par l’exclusion du gardien CopaBoubacar. Philippe Saint-Jean n’était, d’ailleurs, pas content de la prestation de ses troupes ce jour-là.

5. LA COMPOSITION DE L’ÉQUIPE. Ce n’est pas un hasard si la première défaite de la saison, subie à La Louvière, a coïncidé avec les premières modifications apportées à l’équipe. Lors des cinq premiers matches, le 11 de départ avait toujours été rigoureusement identique. A savoir : Vandendriessche û Charlet, Teklak, Beloufa, Lorenzi û De Vleeschauwer, Noukeu, Martic û Grégoire, Dimbala, Zewlakow.  » Ce n’étaient peut-être pas les 11 meilleurs joueurs, individuellement parlant, mais l’équipe était bien équilibrée « , estime Philippe Saint-Jean.  » Lorsque j’ai dû pourvoir au remplacement de PatriceNoukeu et de KoenDeVleeschauwer, suspendus pour le déplacement à La Louvière, l’équipe a été privée de deux pions essentiels de l’entrejeu. C’était aussi, et même surtout, la première fois que l’on touchait à l’équilibre de l’équipe « .

Ensuite est survenue la blessure de MarcinZewlakow. L’absence de l’attaquant polonais a aussi été lourdement ressentie. Car, si celui-ci loupe parfois des occasions et accuse des lacunes sur le plan technique, il pèse de tout son poids sur la défense adverse et travaille énormément.  » En outre, il libère Patrick Dimbala « , ajoute Philippe Saint-Jean. Le manque de punch dont l’attaque mouscronnoise a pâti est directement lié à l’absence de Marcin Zewlakow, devenu un élément indispensable au même titre que Koen De Vleeschauwer en milieu de terrain.

6. L’ABSENCE D’UN PATRON. Steve Dugardein l’était-il, un patron ? Lui-même affirmait que non. En réalité, il l’était, mais à sa manière. Il occupait une position centrale, se dépensait sans compter, se démarquait et offrait des solutions à ses partenaires.  » Mais il est parti et pleurer ne sert à rien « , confesse Philippe Saint-Jean. Patrice Noukeu a, souvent, pris le relais avec bonheur jusqu’ici.  » Il a montré des possibilités, et je suis certain qu’avec lui, l’Excel aura un patron dans deux ans « , estime son entraîneur.  » Mais, pour l’instant, on ne peut pas encore lui demander d’être un leader « . Par conséquent, des anciens qui n’avaient pas eu l’habitude d’assumer ce rôle ont dû s’improviser leaders et se sont efforcés, avec la meilleure volonté du monde, de guider les jeunes. Mais peut-on s’improviser patron, lorsqu’on ne l’est pas naturellement ?  » Un autre problème auquel j’ai été confronté, c’est le fait que tous ces anciens ont été victimes d’un problème physique en fin de saison passée ou au début de cette saison-ci « , regrette Philippe Saint-Jean. Que ce soit Francky Vandendriessche, Koen De Vleeschauwer, MarcSchaessens, SamirBeloufa, TonciMartic ou Marcin Zewlakow, ils doivent tous faire attention au risque de rechute. Et les deux anciens qui n’ont pas eu de problème physique, à savoir Geoffrey Claeys et Alex Teklak, ont eu un problème mental. Le premier, en perdant son entraîneur fétiche. Le second, en étant sur le côté pendant tout un temps. C’est sur tous ces gens-là qu’on se repose pour reconstruire, en plaçant des joueurs moins expérimentés à côté d’eux, mais ils doivent déjà gérer leurs propres problèmes et ne peuvent donc pas tirer l’équipe comme ils le souhaiteraient. C’est là qu’on voit à quel point un Steve Dugardein, qui n’était jamais blessé et n’avait jamais de problème dans la tête, était important « .

Il n’y a plus de Pieroni

7. L’ABSENCE D’UN VRAI BUTEUR. Les quatre buts inscrits très rapidement par Patrick Dimbala ont donné une image trompeuse : l’ancien international Espoir n’est pas un buteur. Mouscron ne l’a d’ailleurs pas engagé pour succéder à Luigi Pieroni : il évolue plutôt dans le rôle de Mbo Mpenza.  » Ricardo Magro peut devenir le buteur que l’on recherche, mais il n’est pas encore prêt pour exploser « , estime Philippe Saint-Jean. Il faut énormément d’occasions à l’Excel pour inscrire un but. Chacun a encore en tête l’occasion 18 carats manquée à Lokeren par Patrick Dimbala, seul à cinq mètres du but vide. Samedi, contre Ostende, AlexandreLecomte s’est retrouvé dans une situation presque identique et le ballon lui est passé entre les jambes. Sans vouloir accabler ces joueurs, ces deux loupés ont coûté quatre points. Lorsqu’on sait que les équipes qui réalisent un bon championnat sont généralement celles qui possèdent un véritable finisseur dans leurs rangs, c’est inquiétant pour l’Excel.

8. LES DOUTES. Selon Philippe Saint-Jean, ils étaient perceptibles dès le début de la saison.  » Les joueurs qui sont restés au club ont assisté au départ de quatre pions importants et ont vu arriver un nouvel entraîneur avec d’autres méthodes. Ils ont senti que le club se dirigeait vers une autre voie et le scepticisme était de mise. La confiance est un peu revenue avec les bons résultats, et ce fut surtout perceptible lors du match à domicile contre St-Trond, mais elle est très vite repartie, parce qu’elle n’était pas ancrée. Aujourd’hui, le moindre tir au but de l’adversaire, et a fortiori le moindre but encaissé, provoque un doute « .

9. LA NERVOSITÉ. Elle est une conséquence des doutes.  » Lorsque mes joueurs sont en difficulté, ils n’osent plus combiner et essayent de procéder par de longs ballons « , constate Philippe Saint-Jean.  » Ils se disent : -Puisque Patrick Dimbala est rapide, on va vite lui donner le ballon. Ce n’est pas la solution : notre attaquant a besoin de recevoir le ballon dans les pieds, et de pouvoir combiner « . En outre, les joueurs perdent facilement les pédales.  » Au Standard, alors qu’on ne pouvait plus rien espérer du match, on a encore pris des cartons jaunes inutiles qui mettront l’équipe en difficulté plus tard, en raison des suspensions qu’ils vont engendrer « .

Moins d’enthousiasme, moins de punch

10. L’ENGAGEMENT. Lorsqu’on est intrinsèquement moins fort, il faut compenser cette lacune par une plus grande volonté. Ce fut la clef du succès initial contre Anderlecht : les Hurlus avaient témoigné d’un grand enthousiasme et remporté une majorité de duels. Cet enthousiasme est moins perceptible depuis quelques semaines.

11. LE TRAVAIL DÉFENSIF DES ATTAQUANTS. Lors du premier match contre Anderlecht, Tonci Martic avait loué le fait que les attaquants avaient énormément travaillé défensivement et soulagé, ainsi, le travail des autres lignes. Ce pressing très haut est aussi moins perceptible depuis quelques semaines.  » Nos attaquants veulent peut-être économiser leurs forces pour être plus frais en zone de conclusion « , pense Philippe Saint-Jean.  » Mais ce n’est pas la bonne méthode. Pour que l’Excel soit performant, il faut que tous les joueurs accomplissent leur mission défensive. J’estime qu’on a disputé… six matches d’affilée sans encaisser de but. Dans cette série, j’inclus le match amical contre Caen, gagné 2-0, et celui à Lokeren, où nous avons partagé 1-1 mais où je considère que nous n’avons pas encaissé un but normal. L’imperméabilité de notre défense était due au collectif et pas uniquement à l’intransigeance des défenseurs. Grâce au travail défensif des attaquants et des médians, les défenseurs ne ramassaient que les miettes laissées par les autres secteurs. Si les avants exercent un pressing moins efficace, les occasions deviennent plus nombreuses pour l’adversaire et, forcément, les buts tombent dans nos filets. On l’a vu au Standard, où Eric Deflandre a eu tout le loisir de monter dans son couloir et de centrer. On ne voyait pas cela en début de saison « .

12. LES ERREURS INDIVIDUELLES DES DÉFENSEURS.  » Elles se sont payées cash parce que, devant, les attaquants ne conservent pas le ballon et manquent de punch « , affirme Philippe Saint-Jean.  » Les mêmes phases, aujourd’hui, engendrent des buts adverses alors que ce n’était pas le cas en début de saison « . A La Louvière, une faute inutile fut commise à l’entrée du rectangle et a engendré le coup franc égalisateur de MarioEspartero. Contre La Gantoise, une passe latérale de JeanPhilippeCharlet, couplée à une glissade de Samir Beloufa, fut à l’origine du deuxième but des Buffalos. Toutes ces imperfections doivent être gommées si l’Excel veut prendre des points, a fortiori si l’on tient compte du fait qu’inscrire un but se révèle une tâche très ardue.

Daniel Devos

PAS DE FINISSEUR : c’est inquiétant

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