Modèle technique

L’ex-star hollandaise du Standard est devenu un des deux coordinateurs des équipes d’âge du club campinois.

Le 15 janvier 1994, Frans Van Rooij disputait son dernier match sous le maillot du Standard (défaite 1-0 au RWDM). Moins d’un an après la victoire en Coupe de Belgique, c’était non seulement le début d’une nouvelle période sombre pour le club de Sclessin (qui allait consommer 11 entraîneurs par la suite), mais aussi la fin de carrière d’un joueur extrêmement talentueux,…même s’il joua encore deux fois quelques mois au PAOK Salonique et à Westerlo.

Huit ans plus tard, Lommel lui a confié un poste de coordinateur des équipes d’âge. Il habité à un kilomètre du stade : « Je m’occupe des plus jeunes (-7 à 11 ans), ce qui est logique car c’est en bas âge qu’il faut leur apprendre un maximum de choses sur le plan technique. Nous allons revoir les plans d’entraînement pour travailler le dribble, le toucher de balle, la frappe intérieur et extérieur du pied et, surtout, le placement ».

Confier la technique à un Hollandais n’est certainement pas une mauvaise idée. Ces gens-là ont plus d’expérience que nous en la matière et, généralement, une vision plus globale du football. Van Rooij reconnaît pourtant qu’il ne sait pas très bien lui-même où il va : « Le club a connu des problèmes au niveau des jeunes. Il a même dû disputer certains matches avec huit joueurs seulement. Il faut donc rendre une image à cette école ».

Il n’a jamais entraîné

En place depuis le premier janvier, Van Rooij a déjà pu constater que la masse de travail à réaliser était importante : « J’ai reçu un tas de documents mais je veux d’abord faire une évaluation des gens en place et me rendre compte, progressivement, de ce qu’on pourrait éventuellement modifier si le club a l’intention de continuer avec moi la saison prochaine. Intensifier la collaboration avec les clubs de la région, par exemple. D’après mes renseignements, elle n’était pas suffisamment importante. Or, avoir de bonnes relations, c’est important, d’autant que Geel et Westerlo forment aussi des jeunes. Mais tout cela est très nouveau pour moi, je n’ai jamais entraîné. Il faudra me laisser le temps de trouver ma voie. Je ne possède pas de diplôme d’entraîneur mais je ne pense pas que ce soit absolument nécessaire car j’ai tout de même pas mal d’expérience et j’ai travaillé avec de grands noms, comme Kessler ou Haan. J’ai également connu le centre de formation du PSV, mais ce n’était pas aussi perfectionné que maintenant. A l’époque, on lançait seulement l’internat. Evidemment, j’ai encore pas mal de connaissances là-bas et je compte bien aller y prendre quelques renseignements ».

Même s’il regarde toujours aussi peu de matches à la télévision et ne se rend que très rarement au stade le week-end, Van Rooij reconnaît qu’il attendait de plus en plus impatiemment qu’une opportunité pareille se présente à lui. Sa fille a déjà 12 ans et voudrait jouer au football mais il n’y a pas de club féminin dans la région.

Lui ne joue plus depuis bien longtemps : « On est vite oublié. Voici deux ou trois ans, un club amateur m’a contacté pour y devenir joueur-entraîneur mais j’étais blessé, je pouvais à peine courir. Pour le reste, je n’ai plus eu aucune offre. Peut-être que, maintenant qu’on reparle de moi, on va me demander de jouer ici ou là, en Amateurs ».

Van Rooij ne s’en cache pas: sa fin de carrière lui laisse un goût amer : « Sans mes ennuis au Standard, j’aurais certainement pu jouer cinq ou six ans de plus. Le club de Sclessin m’a bloqué. La première année, j’ai trouvé du boulot au PAOK Salonique, avec Haan. Ce fut une saison formidable et j’avais trouvé un accord pour une ou deux saisons supplémentaires mais le Standard voulait me vendre, pas me louer. Ou alors, très cher… Je suis donc à nouveau resté quelques mois sans rien faire. En décembre, j’ai pu partir à Westerlo, qui luttait pour son maintien en D2 et je n’en garderai pas un souvenir fantastique: mon père était alors très malade et je n’avais plus la tête au football. Il s’est d’ailleurs éteint à la fin de la saison tandis que Westerlo se sauvait. Moi j’étais blessé. Par la suite, plus personne n’a jamais appelé ».

Les sornettes de Henrotay

On ne saura jamais exactement quelle fut la première raison des ennuis de Van Rooij au Standard. Les versions diffèrent car à l’époque, Sclessin était divisé entre deux investisseurs ( Lesman et Duchêne) et plusieurs groupes de joueurs.

Au bout du compte, le clan des Hollandais ( Haan, Vos, Van Roij mais aussi Pister, Asselman et même Bettagno) fut mis en minorité. Notamment à la suite d’une interview dans le magazine hollandais Voetbal International où Van Rooij lança une phrase restée célèbre: -Henrotay raconte des sornettes et ces imbéciles de Wallons le croient.

Van Rooij : « J’étais à bout de nerfs, attaqué de toutes parts sans trop savoir me défendre parce que ce n’était pas dans mon tempérament et que je ne maniais pas le français. Mais quand j’ai parlé d’imbéciles, je ne visais pas les supporters. Je me sentais parfaitement bien à Liège et j’ai d’ailleurs continué à habiter Neupré pendant quelques années. J’en voulais surtout aux joueurs qui se laissaient manipuler par Henrotay. Pour moi, il est le principal responsable de tous mes ennuis au Standard. Il ne faisait que diviser pour régner et il a semé la zizanie dans un groupe qui, au départ, s’entendait bien. J’ai sans doute des torts également mais je trouve quand même bizarre qu’à l’époque, cinq ou six joueurs qui avaient mené le Standard au succès en Coupe de Belgique l’année précédente ont dû faire leurs valises. Je n’ai jamais bien compris les motivations de cet homme mais la direction lui faisait confiance. Plus tard, on a quand même fini par le pousser vers la sortie ».

A Liège, quand on parle des Hollandais, on évoque souvent leur discipline librement consentie… Van Rooij n’hésitait jamais à se montrer cigarette au bec et verre de bière à la main. Cela lui fut évidemment reproché lorsque le Standard se mit à accumuler les contre-performances.

« Pourtant, je fumais aussi lorsque nous avons gagné la Coupe », sourit-il. « Mais je dois être très prudent car je m’occupe à présent de gamins et il est évident que je ne peux que les avertir des dangers du tabac. Mais quand on a 24 ans, on est quand même apte à décider soi-même si on fume ou pas. Et tous les joueurs de foot aiment boire un verre. Pour moi, la discipline ne s’arrête d’ailleurs pas à cela. On a dit, par exemple, que j’arrivais en retard à l’entraînement. J’attends qu’on me dise où et quand. Je suis certain à 150% que ce n’est jamais arrivé. Et faire le maximum pour revenir rapidement dans le coup après une blessure, c’est aussi de la discipline. Là non plus, je ne crois pas qu’on puisse me reprocher quoi que ce soit. Pour moi, la véritable cause des ennuis du Standard, c’est la mauvaise ambiance qu’Henrotay injectait dans le vestiaire. Dès le mois de septembre, octobre, on parlait d’arrivées, de départs, de prolongation de contrat. Tout le monde craignait pour son avenir et tirait la couverture à soi ».

Il est resté en Belgique

Depuis, hormis son escapade grecque, Van Rooij n’a jamais quitté la Belgique : « J’y suis depuis 18 ans et j’ai senti, dès le premier jour, que j’y resterais toute ma vie. J’ai habité à Anvers, à Liège et, maintenant, à Lommel, où j’ai trouvé le bon équilibre. Par rapport au Standard, j’avais pris un avocat et tout s’est arrangé à l’amiable. Mais je n’avais plus envie de retourner à Sclessin, d’être confronté à la page la plus noire de ma carrière après cinq belles années à Anvers et deux bonnes saisons au Standard ».

Ses nouvelles fonctions pourraient pourtant l’y ramener un jour mais cela ne l’inquiète pas : « Il faut savoir tourner la page, ne pas ressasser sa rancune pendant dix ans. Je suppose aussi que le football va me permettre de retrouver certains copains perdus de vue car je n’ai pratiquement plus de contacts réguliers qu’avec Henk Vos« .

Patrice Sintzen

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