Le joueur marocain, quinzième joueur mondial l’année dernière, retrouve la Belgique, où il a vécu durant trois ans.

Younes El Ayanaoui est l’un des quatre joueurs marocains qui disputera ce week-end la rencontre de barrage contre la Belgique, pour le maintien dans le groupe mondial de la Coupe Davis. Ancien quinzième joueur mondial (l’année dernière, notamment grâce à un excellent résultat réussi à l’Open d’Australie, où il se qualifia pour les quarts de finale), actuellement classé 49e à l’ATP (entry system), le sympathique Marocain constituera, avec Hicham Arazi (ATP 28), Karim Alami (ATP 125, mais ancien N°1 mondial junior) et Medhi Tahiri (ATP 341), une solide opposition pour la bande à Xavier Malisse. Ayant habité durant trois années à Bruxelles, où il disputa les interclubs pour le compte du Primerose, Younes El Aynaoui constitue un interlocuteur privilégié pour évoquer ce match capital entre Belges et Marocains, ces 21, 22 et 23 septembre au Country Hall du Sart Tilman, à Angleur.

Younes El Aynaoui, où vivez-vous désormais?

Je suis un peu sans domicile fixe. Je suis tout le temps en voyage. Sinon, je vis parfois chez mes beaux-parents, à Nancy, ou chez mes parents, à Rabbat.

Avant cela, vous avez vécu trois ans (de 1997 à 1999) en Belgique. Comment aviez-vous atterri chez nous?

Je connaissais très bien Pascal Collard du BATD (Belgian Academy for Tennis Development) et des joueurs belges comme Filip Dewulf et Christophe Van Garsse pour les avoir croisés souvent sur le circuit. Et puis, Pascal Collard m’a proposé de bénéficier de la structure du BATD tout au long de l’année, en échange de jouer les interclubs au Primerose. J’ai trouvé que c’était sympa et vu que je n’avais jamais pu jouir de pareilles structures, je suis resté pendant trois ans là-bas. Cela m’a beaucoup aidé.

Avec qui jouiez-vous au Primerose?

Notre équipe était surtout destinée à jouer contre la difficile équipe de Diest, avec Dewulf, Van Garsse, Van Herck. Dans notre équipe, il y avait Arnaud Fontaine, Réginald Willems, Bart Wuyts. C’était un très haut niveau de compétition, quand on pense que moi, en tant que N°1, je jouais contre un gars comme Filip Dewulf, qui était dans les cinquante meilleurs mondiaux. Et la formule belge des interclubs, très concentrée dans le temps, me convenait très bien. L’ambiance était très sympa et nous étions très bien entouré notamment par Thierry Van Cleemput, l’actuel coach d’Olivier Rochus, ou Julien Hofferlin, celui de son frère Christophe; des gens qui avaient l’habitude de suivre des joueurs professionnels sur le circuit. Koen Gonnissen était aussi de la bande.

La Belgique, c’était un passage

Pourquoi cette belle expérience en Belgique a-t-elle pris fin?

Vu que je ne savais pas encore où j’allais me fixer après ma carrière nous nous sommes dit avec ma femme que ce serait bien de voyager, de visiter, d’aller passer deux ou trois ans dans chaque ville. Aujourd’hui, je ne ressens pas le besoin d’avoir un chez-moi. Mes bureaux sont aux quatre coins du monde. J’ai vécu à Vienne. Je vais aller bientôt à Paris et puis après on verra.

Cette vie de bohême n’est-elle pas trop difficile?

Non, un joueur de tennis est de toutes façons neuf mois par an dans les hôtels à travers le monde. Finalement, que je sois basé en Belgique, en Allemagne ou aux Etats-Unis, ça ne change pas grand-chose. Je suis habitué et on fait avec. Mais c’est certain que, pour un joueur de tennis, l’un des aspects les plus difficiles est de passer beaucoup de temps loin de la maison.

Vous étiez très intéressé par les structures tennistiques belges à votre arrivée. Cela veut-il dire qu’il n’existe pas l’équivalent au Maroc?

Actuellement, je ne suis plus très souvent au Maroc, mais j’entends souvent dire que les jeunes qui veulent percer dans le tennis doivent d’expatrier aux Etats-Unis, en France ou en Belgique. Ce qui est dommage car je pense que l’environnement le plus propice à l’éclosion d’un bon joueur de tennis se situe auprès de sa famille. La fédération marocaine ne peut s’offrir un centre d’entraînement national. C’est dommage car la motivation est réelle chez les jeunes, surtout après les résultats que nous avons obtenus, Karim Alami, Hicham Arazi et moi… Comme cela a été le cas avec l’athlétisme marocain. On a fait un beau boulot dans ce domaine, avec notamment un centre d’entraînement en altitude. La première médaille d’or de Saïd Aouita aux Jeux olympiques de Séoul en 1988 a constitué une locomotive. J’espère que, quand nous aurons fini de parcourir les quatre coins du monde, nous pourrons revenir dans notre pays pour donner un coup de main aux jeunes.

On rêve de Coupe Davis au Maroc

Justement, à propos de votre carrière professionnelle, quelles sont vos ambitions, après avoir connu déjà un beau parcours?

Il y a un grand défi que nous voudrions relever: la Coupe Davis. Pour la première fois, nous sommes montés dans le groupe mondial l’année dernière. Malheureusement, nous avons joué à l’extérieur contre le Brésil. Cette fois, nous jouons de nouveau en déplacement, mais notre rêve serait d’accueillir une grande équipe chez nous. Nous n’avons jamais reçu de grands joueurs au Maroc. Et si on pouvait battre cette équipe, ce serait fabuleux.

Que savez-vous de l’équipe belge? Vous connaissez très bien les anciens joueurs. Mais les joueurs actuels?

Oui, bien sûr. Je connais très bien les frères Rochus, pour avoir joué les interclubs dans le même club qu’eux en Allemagne. Nous avons d’ailleurs remporté le championnat la semaine dernière. Olivier est talentueux, impressionnant. Je crois que tous les joueurs du circuit, quand ils ont l’occasion de le voir jouer, vont jeter un coup d’oeil, parce qu’il a des coups invraisemblables. C’est vraiment un très bon joueur. Et Christophe aussi, même si je pense qu’Olivier est encore plus fort. Quant à Xavier Malisse, je l’ai déjà rencontré une fois. Je l’ai battu mais je suppose que maintenant qu’il a un nouvel entraîneur, il fait tout ce qu’il faut pour être à son meilleur niveau.

Olivier Rochus, c’est un peu le Hicham Arazi belge?

Oui, voilà. S’ils jouent l’un contre l’autre, cela va être un beau spectacle. Ils ont tous les deux des revers magnifiques et ils savent un peu tout faire.

La Belgique favorite en… double

Et Tom Van Houdt, vous le connaissez aussi?

Oui, très bien. Il a fait un très bon début d’année 2000, en même temps que moi, quand j’avais atteint les quarts de finale à l’Open d’Australie. Depuis, il confirme. Il a fait d’autres beaux résultats, notamment à Key Biscane. Cela fait à peu près un an qu’il fait partie des cinquante meilleurs joueurs mondiaux en double.

Quelles sont les principales qualités respectives de chacune des équipes, belge et marocaine?

Je crois que la Belgique aura un certain avantage au niveau du double, puisqu’elle dispose d’un véritable spécialiste en la matière en la personne de Tom Van Houdt. Pour notre part, nous misons principalement sur les simples. Je pense que la première journée sera cruciale: il faudra qu’on se défende bien en simple. Pour nous, le rêve serait de mener deux à zéro d’entrée, mais ce sera difficile. Ce seront des matches acharnés, dans une rencontre vraiment très équilibrée. J’ai du mal à prévoir ce qui va se passer.

Votre capitaine, Amine Ghissassi, serait contesté par l’un ou l’autre joueur de l’équipe. Quelle est votre opinion sur la question?

Après la dernière rencontre, le capitaine a été remplacé par la fédération, mais ce n’était pas du tout à cause des joueurs. S’il y avait des problèmes, c’était entre le capitaine d’équipe et la fédération. Et la fédération a décidé de nommer un nouveau capitaine, sans nous mettre au courant. Normalement, on va essayer de contacter la fédération pour voir qui sera le capitaine réellement. Actuellement, c’est donc Amine Ghissassi qui est en fonction et je pense donc que c’est lui qui va diriger l’équipe ce week-end, car nous, les joueurs n’avons aucun souci avec lui. Nous serons là-bas tous les quatre avec le capitaine et je pense qu’il n’y aura pas de problèmes au sein de notre groupe.

Pas besoin de capitaine?

Le nom de Karim Alami, actuel joueur, circule pour succéder à Amine Ghissassi comme capitaine de l’équipe. Qu’en pensez-vous?

Pourquoi pas. Mais normalement, vu que la fédération a pris une décision, je pense que ce sera Ghissassi le capitaine. Cependant, ça n’a pas beaucoup d’importance: nous avons l’habitude de jouer toute l’année tout seul. On sait ce qu’il faut faire sur le terrain. Et je ne pense pas que cette question sera un handicap pour l’équipe marocaine.

Quoi qu’il advienne, vous monterez sur le court ce week-end? Vous n’allez pas faire une grève pour obtenir l’une ou l’autre revendication?

Non, non. La rencontre est d’une telle importance pour le maintien dans le groupe mondial. On est tous bien au courant et on jouera cette rencontre, je l’espère, à 100% de nos capacités.

Cela doit être assez chouette pour vous de revenir en Belgique. Vous allez revoir beaucoup de monde?

Oui, bien sûr. D’ailleurs, je vais avoir des problèmes d’invitations à obtenir: il faut que j’en donne au moins une centaine. Ça fait plaisir de revenir, même si c’est dommage que la rencontre ne se déroule pas à Bruxelles. Là, j’aurais vraiment joué à la maison. Liège, c’est une ville que je connais très peu.

Allez-vous prolonger votre séjour en Belgique pour revoir vos amis?

J’aimerais bien mais malheureusement, je vais être obligé de repartir le plus vite possible pour participer la semaine prochaine au tournoi de Toulouse. Je ne vais pas avoir le temps de me balader, vu que cette semaine, il faut s’entraîner. Mais je vais quand même essayer de profiter un petit peu de ce beau pays qu’est la Belgique.

Laurent Gérard

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