Mini Santi terrasse Maxi Yaya

Aller à Manchester est toujours un régal. Il s’y passe toujours quelque chose. Pas toujours ce qu’on attend. Premier  » Super Sunday  » de la saison. Liverpool-Man U puis Man City-Arsenal. Je suis à City. La salle de presse est bondée trois heures avant le match. Les journalistes veulent absolument voir le match du souvenir et de la vérité mais qui reste tout de même celui des ennemis historiques du foot anglais. Stupéfaction ! Pas de match sur les télés. Seulement le tiercé. Le club le plus riche du monde peut dépenser 1.000.000.000 de livres mais ne sait pas se payer un abonnement à 35 livres. A moins que le rouge de United ne soit interdit dans ce stade, même à la télé. Ça ricane jaune. À défaut de voir les Red’s, on voit rouge. Et on discute. Notre confrère de L’Equipe nous congratule :  » Hey, vos Belges, c’est du tout bon. Nous Français, on n’a plus droit au chapitre en Angleterre. Je ne l’aurais jamais cru.  » Nous non plus. Celui de Canal+ ne peut s’empêcher :  » Faudrait peut-être qu’un jour ils gagnent un vrai match avec leur équipe nationale.  » On ne peut s’empêcher de sourire en pensant qu’il n’a pas vraiment tort. Cela dit on se réjouit quand même. Pour ce match au sommet du le plus grand championnat du monde, ce seront deux belges qui mèneront les équipes sur le terrain. Deux petits belges capitaines. Eh bien non ! ThomasVermaelen a la grippe. Damned. Pas grave, on va se régaler avec un P’tit espagnol. 63e minute de Manchester City-Arsenal, Santi Cazorla 1m68 et 70 kg mal rasé balance Yaya Touré 1m90m, 90kg même rasé. Voilà résumé en une action les débuts de l’Espagnol en Premier League. Mini terrasse Maxi. Le monde à l’envers. On lui prédisait l’essorage à l’anglaise ; vite secoué, vite séché. On lui prédisait le baston, c’est lui qui donne la leçon. Trop rapide, trop malin, trop bon. C’est ça le talent, il permet d’être celui qui décide comment les choses se passent.  » Quand un gars de 90 kg parle, celui de 70 l’écoute « , disait Michel Audiard. Avec Cazorla, les colosses ont juste le temps d’entendre son souffle dans leur cou. Trop court, trop tard, la tornade est passée.  » Mon jeu est parfait pour l’Angleterre. Ma vitesse et ma technique font que je suis souvent en avance.  » En fait, Arsène Wenger a vu en lui un autre Cesc Fabregas. Intelligent, lecture du jeu exceptionnelle, deux pieds. En une passe, il punit d’un torticolis toute une défense, en un dribble d’un lumbago n’importe quel défenseur.

Manuel Pellegrini, son coach à Villarreal et Malaga le surnommait : el desatascador (le déboucheur). Genre débloqueur, piston à injection. Bien vu. Ni l’intensité ni le rythme de la Premier League n’y changeront quoi que ce soit. Surtout pas à Arsenal. Le jeu le plus continental des îles. Même si :  » J’ai été très surpris de commencer la saison dans l’axe. J’étais plus un joueur de flanc qui y rentrait balle au pied, pas qui y recevait le ballon.  » Un peu le chemin inverse d’un Fabregas qui, d’ailleurs, lui a refilé son prof d’anglais. Certainement un amateur de foot à voire l’adaptation supersonique de la puce atomique. Sa première grosse émotion avec le foot de haut niveau date de 2000. Dernière journée de championnat. Oviedo (son club formateur) joue contre l’Atlético Madrid. Dans les dernières secondes, l’Atlético reçoit un penalty. Si Jimmy Floyd Hasselbaink le marque, les Madrilènes sauvent leur peau en Liga. Il le rate, ils descendent. Santi Cazorla est stupéfait, pétrifié. Il a 15 ans ! Et est ramasseur de balle !  » Je me suis rendu compte de ce qu’était la vie de footballeur. Qu’un aussi grand joueur que Hasselbaink rate le penalty du maintien m’a bouleversé. Une émotion incroyable. Ça m ‘a ouvert les yeux. Je n’oublierais jamais ce moment. Maintenant, j’ai l’habitude de toujours regarder les ramasseurs de balle dans les yeux quand ils me rendent un ballon. Je me dis qu’un jour, l’un d’eux sera peut-être un grand footballeur.  » En attendant, ce sont les adversaires qui ramassent les poussières d’étoiles que laisse Santi sur son passage.

Avec Cazorla, les colosses ont juste le temps d’entendre son souffle dans leur cou.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire