MICHEL PREUD’HOMME VA-T-IL TROP LOIN ?

Chaque semaine, Sport/Foot Magazine pose la question qui fait débat.

Champion avec le Standard en 2008 – le premier titre des Rouches depuis 1983 – et vainqueur de la coupe avec La Gantoise deux ans plus tard, MichelPreud’homme fait également forte impression le long de la ligne de touche. Explosions de colère, nombreuses discussions avec les arbitres, suspensions… Ce comportement entache un peu l’image de club sympathique et populaire véhiculée par le Club Bruges.

L’ex-gardien, engagé pour ramener le titre dans la Venise du Nord, va- t-il trop loin ?  » Il exagère parfois un peu et cela se retourne contre lui mais Michel Preud’homme doit aussi pouvoir rester lui-même : il est explosif et expressif. Sa personnalité fait aussi sa force dans le métier d’entraîneur « , dit Peter Vandenbempt, journaliste à la radio néerlandophone.

 » Si Preud’homme était aussi stoïque que Valeri Lobanovsky (ex-coach de l’équipe nationale russe et du Dinamo Kiev, ndlr) sur le banc, ça ne fonctionnerait pas non plus. La plupart du temps, ce n’est pas envers les arbitres qu’il réagit mais parce que son équipe a loupé une occasion, par exemple. Au cours des dernières semaines, il n’avait pas tort lorsqu’il protestait mais il devrait, tout comme les dirigeants et les joueurs, ne pas dépasser les bornes.

Shooter dans une bouteille et toucher la jambe du délégué de l’équipe, ce n’est pas beau et les caméras finissent par se braquer sur lui, au point que le réalisateur demande au cameraman de ne jamais le perdre de vue. Sur ce plan, il est victime de sa réputation mais c’est lui qui se l’est faite. Par contre, si on demande aux arbitres quel est le pire entraîneur le long de la ligne de touche, ils ne répondront jamais Michel Preud’homme mais quelqu’un qui, dès le début du match, commence à râler de façon plus subtile, sans faire de grands gestes. Et ça ne se voit pas parce que les caméras ne sont pas braquées en permanence sur lui.

 » Un passionné avant tout  »

Michel Preud’homme est un homme vrai, il ne fait pas ça pour le show. Un coach a le droit d’être fâché mais il ne peut pas donner dans l’escalade et j’ai le sentiment que c’est ce qui s’est passé contre le Cercle. On ne peut pas monter sur le terrain mais ce qu’a fait Diego Simeone (Atlético Madrid, ndlr) lors de la finale de la Ligue des Champions est bien pire encore : il a couru 30 mètres sur le terrain pour aller attaquer un joueur adverse. Et le week-end dernier, lors du match retour de la Super Coupe d’Espagne, il a donné un coup sur l’arrière de la tête du quatrième arbitre…  »

 » Michel est avant tout un passionné « , dit Michel Louwagie, manager de Gand, dont Preud’homme fut l’entraîneur de 2008 à 2010.  » Avec lui, nous avons été vice-champions et nous avons gagné la coupe : un grand cru. Son comportement le long de la ligne et la façon dont il motivait nos supporters nous ont apporté un élément essentiel : la rage de vaincre. Et en football, seule la victoire compte.

Il joue beaucoup sur le facteur émotionnel mais c’est nécessaire pour motiver les joueurs et tout l’entourage. C’est comme cela qu’il a réussi à tirer le maximum du groupe en un minimum de temps. Chaque entraîneur a ses méthodes mais il ne joue pas un rôle. Inutile d’essayer de le calmer, surtout immédiatement après un match. Par contre, pendant la semaine, lorsque nous nous réunissons, nous pouvons discuter calmement. Je ne pense pas qu’il changera encore mais j’ai quand même l’impression que, par moments, il est plus calme.  »

 » Je ne vois guère de différence entre le Preud’homme avec qui j’ai travaillé en Arabie Saoudite et celui du Club Bruges « , dit Yannick Ferrera qui, pendant une saison (2011-2012), a analysé des images vidéo pour son compte à Al-Shabab.  » C’est un bosseur, très exigeant envers les autres mais aussi envers lui-même. Sur les plans tactique et technique, il travaille différemment à Bruges, accorde davantage d’attention aux phases arrêtées, au mouvement et à l’animation du jeu. C’est un entraîneur offensif mais c’est aussi une question de moyens mis à sa disposition. Sur la ligne, il peut sembler nerveux mais il ne transmet pas cela à ses joueurs : il fait cela pour les garder en éveil et motivés. Je ne trouve pas cela négatif.  »

 » Pas des Caliméros  »

 » La question n’est pas de savoir s’il va trop loin mais de savoir si on l’observe et le traite de la même façon que les autres entraîneurs « , dit Vincent Mannaert, CEO du Club Bruges.  » Michel a une forte personnalité, il a du charisme et remplit un espace rien que par sa présence, sans rien faire pour attirer l’attention. Dans un vestiaire, c’est très positif. Il lui suffit de rentrer, sans rien dire, pour faire de l’effet à ses joueurs. Il a le même charisme pendant les matches. Dans ses clubs précédents, on estimait que cette passion et cette assiduité étaient des qualités mais maintenant, on met surtout l’accent sur son comportement sur le banc. Parce que nous n’avons encore rien gagné ?

Si on pouvait filmer les deux dug-out pendant tout un match, je vous conseillerais de regarder car l’entraîneur adverse réagit peut-être bien de la même façon, si pas pire. Avez-vous vu Francky Dury lors de Zulte Waregem – Club Bruges ou Lorenzo Staelens et, pire encore, son adjoint Arnar Vidarsson à l’occasion du derby ? Mais cela, on n’en parle jamais.

Nous ne sommes pas des Caliméros. Nous sommes partisans de règles strictes sur le banc, qu’il s’agisse des relations avec le coach adverse ou avec l’arbitre. Mais nous voulons qu’elles soient appliquées de la même façon pour tous et que la politique au niveau des sanctions soit claire également, de façon à ce que celui qui franchit les limites sache à quoi s’attendre. »

PAR CHRIS TETAERT

 » Michel Preud’homme est-il observé et traité de la même façon que les autres entraîneurs ?  » Vincent Mannaert, CEO du Club Bruges

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