» MESSI DISAIT SOUVENT : C’EST VICTOR QUI FAIT LA DIFFÉRENCE, PAS MOI « 

Au vu de la saison qu’il est en train de livrer, le meneur de jeu brugeois est considéré comme l’un des prétendants au Soulier d’Or.  » Il aurait dû être un des dix meilleurs joueurs du monde « , dit-on de lui en Espagne.

Qui pourrait nous décrire VictorVazquez (27) mieux que les personnes qui l’ont côtoyé au début de sa carrière à Barcelone ? Nous avons pris contact avec deux de ses meilleurs amis, son agent, un ex-équipier et un journaliste qui suit le Barça depuis plus de quinze ans.

Pitu (ex-équipier au CF Damm et à Barcelone)

 » Pitu, c’est mon nom d’artiste. En fait, je m’appelle Eugenio Plazuelo. Je suis encore souvent en contact avec Victor et j’ai assisté à son mariage l’été dernier (Vazquez a épousé Andrea début juin, ndlr). A Barcelone, je faisais partie de la fameuse babydreamteam avec Gerard Piqué, Cesc Fabregas, Lionel Messi et Victor (tous nés en 1987, ndlr). J’ai aussi joué avec Vazquez à Damm, dès l’âge de neuf ans. On s’est vite aperçu qu’il était plus fort que les autres, qu’il faisait la différence. Je me rappelle un tournoi pour cadets avec Barcelone. Alors que nous montions sur le terrain pour nous échauffer, Victor a été piqué à l’oreille par une guêpe. Il a dû se faire soigner et a loupé l’échauffement mais il a quand même entamé le match et nous avons gagné 3-0… trois buts de Victor.

A l’époque, il était plus décisif que Messi. Il pouvait faire basculer un match d’un but ou d’un assist. Messi dribblait déjà beaucoup mais ce n’était pas encore la machine à marquer qu’il est devenu. Victor et moi nous trouvions les yeux fermés. Vazquez était notre leader. Pas tellement en paroles mais en actes. Ceux qui parlaient le plus, c’étaient Marc Valiente (aujourd’hui défenseur au Real Valladolid, ndlr) et Piqué mais sur le terrain, le patron, c’était Victor. Je suis même étonné qu’il ne soit pas devenu un leader au Club Bruges car c’est déjà sa quatrième saison en Belgique.

Notre équipe était homogène, nous formions une bande de copains. Une partie des joueurs, dont Victor, logeait à La Masia, ce qui ne faisait que renforcer les liens. Nous nous considérions un peu comme les princes héritiers car nous avions une équipe exceptionnelle. En semaine, la concurrence était très rude et le week-end, nous gagnions très souvent, même contre des équipes composées de joueurs plus grands et plus costauds.

S’il n’avait pas été aussi gravement blessé (fracture de la rotule et déchirure du ménisque début 2009, ndlr), vous ne seriez pas en train de me demander s’il peut gagner le Soulier d’Or mais un trophée européen bien plus important. Ceci dit, le Soulier d’Or, c’est déjà très bien hein. J’aimerais être à sa place…

Nous avons eu plusieurs bons entraîneurs : Rodolfo Borrell (aujourd’hui directeur technique à Manchester City, ndlr), Alex Garcia, Juan Carlos Perez Rojo (joueur de Barcelone de 1983 à 1987, ndlr), Tito Vilanova… Vous voulez savoir si Victor s’entendait particulièrement bien avec l’un d’entre eux ? C’était plutôt l’inverse : les entraîneurs l’adoraient parce que c’était un des meilleurs joueurs de l’équipe.

A l’époque, Victor avait des cheveux longs mais ce n’était pas un rebelle. Nous étions plusieurs à avoir les cheveux longs, dont moi. Disons que c’était à la mode. Aujourd’hui, il en a nettement moins, hein (il rit). Je me rappelle qu’après l’entraînement, nous jouions souvent futbolin (baby foot, ndlr). Et c’était toujours moi qui gagnais !  »

Miguel Ramos (son meilleur ami)

 » Je connais Victor depuis onze ans déjà, c’était l’époque où nous fréquentions la cantera du FC Barcelone. Aujourd’hui, je suis gardien à Rubi, un club catalan de D3. En dehors du terrain, Victor est un homme normal, très positif. Il est humble et n’a de problème avec personne. Quand il revient à Barcelone, nous allons souvent faire du sport avec les amis – du padel, par exemple – ou nous regardons du foot à la télé. On voit que lui et sa femme se sentent bien en Belgique. Ils sont heureux et je pense qu’ils veulent encore y rester des années. Leur fils s’appelle Leo mais ça n’a rien à voir avec Messi, hein. Nous en avons souvent rigolé mais Victor et Andrea disent que c’est un hasard, c’est juste un prénom qui leur plaisait depuis le début.

Lorsqu’il s’est blessé gravement, il a bien entendu connu des moments difficiles mais il a toujours été bien entouré par sa famille, Andrea et ses amis. Cela l’a aidé à s’en sortir. C’est un garçon assez gai de nature et cela lui a servi quand ses parents (Maribel et Juan Jesus, ndlr) se sont séparés. Aujourd’hui, d’ailleurs, ils s’entendent bien. Une séparation laisse toujours des traces mais pour Victor, ça s’est donc relativement bien passé.  »

Moises Llorens (journaliste à As)

 » Je suis Barcelone depuis plus de quinze ans et je place Victor dans le top 10 de tous les jeunes que j’ai vus passer à la cantera. C’est d’ailleurs un secret de polichinelle : à l’époque, les meilleurs amis de Messi, c’étaient Victor et Cesc. Je pense que Messi aurait beaucoup aimé jouer en équipe première avec Vazquez. D’ailleurs, Barcelone cherche toujours un élément qui soit parfaitement complémentaire à Messi…

Il me revient une anecdote : à l’époque, Piqué était très doué techniquement et très grand pour son âge. Lorsqu’il estimait que les choses n’allaient pas assez vite ou que l’équipe ne marquait pas, il quittait sa défense et partait à l’aventure pour tenter sa chance. A chaque fois qu’il le faisait, Vazquez le rappelait à l’ordre : Tu pars en excursion ? Et il renvoyait Piqué en défense.

Je ne suis pas étonné que Victor se débrouille aussi bien en Belgique. Ce qui me surprend, par contre, c’est qu’aucun club allemand ne soit encore venu le chercher. La Bundesliga n’est pas aussi physique que la Premier League et je pense que Vazquez s’adapterait très bien dans un club du subtop comme Leverkusen.

Vous voulez savoir s’il a laissé une partie de son talent dans sa blessure ? Il a perdu du potentiel physique mais il a gagné en intelligence de jeu. C’est aujourd’hui un joueur très mûr, il a la tête bien en place. Et il le doit peut-être aux ennuis qu’il a connus.  »

Javi Calvo (un ami)

 » Victor n’a pas changé d’un cheveu depuis que je l’ai rencontré il y a douze ans au cours des vacances d’été. Le fait qu’il ait joué au FC Barcelone ne lui est pas monté à la tête, au contraire : il s’est toujours considéré comme un joueur comme les autres. Bien sûr, il connaît ses qualités mais il n’est pas du genre à se vanter. Même si, à l’époque, beaucoup de gens étaient impressionnés par ce qu’il montrait sur le terrain. Vous voulez savoir s’il se sent plus Catalan qu’Espagnol ? A vrai dire, nous n’en avons jamais parlé. Je pense qu’il s’en fiche un peu.  »

Horacio Gaggioli (son agent)

 » Il avait quatorze ans lorsque je suis devenu son agent. En Espagne, c’est normal. Il y a peu, je me suis occupé du transfert de Marco Asensio au Real Madrid. Il a aujourd’hui dix-huit ans mais je m’occupe de lui depuis qu’il a dix ans. Il faut aider ses joueurs à choisir la bonne voie. Combien de footballeurs sombrent parce qu’on leur donne de mauvais conseils ?…

Victor a eu la chance de faire partie de ce qui est, à mon avis, la meilleure équipe que le Barça ait jamais eue. Dans les catégories d’âge, il jouait avec Piqué, Fabregas, Messi et Toni Calvo. Cette équipe ne perdait jamais. Jamais ! Qu’elle joue en Espagne, en France ou en Italie, elle gagnait tout. Parfois, Victor était élu meilleur joueur du tournoi. Parfois, c’était Messi.

On ne peut pas les comparer car ce sont des joueurs totalement différents mais, à l’époque, on avait tellement parlé du transfert de Leo à Barcelone – j’y ai d’ailleurs collaboré – que tous les projecteurs étaient logiquement braqués sur lui. A l’époque, Messi disait souvent : On parle beaucoup de moi mais le joueur qui, dans notre équipe, fait le plus la différence, c’est Victor, pas moi. Et ce n’était pas faux car tout tournait autour de Victor, tout le monde jouait en fonction de lui. C’était le leader.

Il existait également une saine rivalité entre Messi et Vazquez en ce qui concerne les buts. Je me souviens d’une saison exceptionnelle au cours de laquelle Messi avait marqué 34 fois et Vazquez, 29 mais la moitié des buts de Leo venaient d’assists de Victor. Un peu comme à Bruges il y a deux ans, avec Carlos Bacca. Il fut meilleur buteur avec 22 buts mais combien Victor lui en avait-il offert sur un plateau ?

Je pense que Victor a simplement joué de malchance. Il était prédestiné à devenir un des dix meilleurs joueurs d’Europe et donc du monde. Je me souviens d’un match de Ligue des Champions face à Rubin Kazan (saison 2010/2011, ndlr) au cours duquel Victor et Leo avaient réussi des combinaisons incroyables, ils se trouvaient les yeux fermés. Mais bon… (il soupire) A cause de cette malheureuse blessure, il est resté longtemps à l’écart. Victor n’a pas eu le brin de chance qu’ont parfois les grands joueurs. En souffre-t-il ? Vous savez, j’en ai souvent parlé avec lui. La vie est un concours de circonstances et Victor n’y peut rien, il doit accepter. Ainsi va la vie…

Heureusement, le Club Bruges est venu le chercher et il a pu démontrer en Belgique qu’il était un grand joueur. S’il avait pu jouer toute l’année au même niveau que ces derniers mois (début 2014, il était blessé, ndlr), il n’y aurait pas d’autre candidat que lui au Soulier d’Or. Sauf le respect que je dois à ce jeune joueur d’Anderlecht, qui est fantastique, bien sûr.

Au début, Victor a éprouvé un peu de difficultés à s’adapter au football belge, qui est assez différent. Mais aujourd’hui, il est très heureux chez vous. Lorsque nous avons prolongé son contrat avec Vincent (Mannaert, ndlr) et Bart (Verhaeghe, ndlr), je n’ai vu que des visages rayonnants.  »

PAR STEVE VAN HERPE – PHOTOS: BELGAIMAGE

 » En catégories d’âge, il était plus décisif et important que Messi. Sur le terrain, le patron, c’était lui.  » Pitu, ex-coéquipier

 » Il était prédestiné à devenir un des dix meilleurs joueurs du monde.  » Horacio Gaggioli, son agent

 » Il fait partie des meilleurs jeunes que j’ai vus à la cantera du Barça ces 15 dernières années.  » Moises Llorens, journaliste à As

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