Même combat

Pour se relancer, les deux clubs ont adopté une ligne de conduite similaire.

Avec des totaux respectifs de 16 et 6 points à la trêve, le FC Brussels et le Lierse faisaient partie des mal lotis. Si leur situation reste toujours précaire aujourd’hui, après deux tiers de la saison, les deux clubs sont quand même parvenus à redresser la barre : les Coalisés en engrangeant davantage d’unités depuis la reprise qu’au cours de l’automne lorsqu’ils n’avaient pris qu’un modeste total de 6 sur 39 et les Anversois en décollant dès l’instant où Kjetil Rekdal succéda à René Trost. Qu’est-ce qui explique cette métamorphose ? Une explication en cinq points.

1. Sang neuf

Le Brussels a mis le grappin sur sept nouveaux joueurs lors du mercato : Dieudonné Owona (back gauche), Flavien Le Postollec (médian défensif) , Hakim Bouchouari (attaquant), Christian Negouai (médian), Sambegou Bangoura (attaquant), Samuel Neva (défenseur) et Mickaël Citony (médian). A l’exception du Belgo-Marocain Bouchourari, arrivé blessé du Standard et qui n’est pleinement opérationnel que depuis la mi-février, tous les autres ont déjà été partie prenante au sein du 11 de base. Soit à temps plein, pour la plupart, soit à temps partiel dans le chef de Negouai et Bangoura, arrivés tous deux avec un retard de condition. Mais le grand Français s’est fissuré la mâchoire en amical il y a une semaine et est out… comme Citony qui, après une entame mitigée, avait subitement passé la surmultipliée avant d’être arrêté par une déchirure aux ischio jambiers. Ces accrocs leur coûtent quelques semaines précieuses. Dommage car tant dans l’élaboration des offensives qu’à la conclusion, Citony avait déjà prouvé toute son utilité.

Le Lierse, de son côté, a également fait appel à un même contingent de joueurs aux mois de janvier et de février : Jan Moons (gardien), Chris Janssens (médian), Gert Claessens (défenseur), Tailson (attaquant), Kenny Thompson (défenseur), Sven Cums (médian) et Charlie Miller (attaquant). Dans ce cas aussi, à l’exception de Tailson, qui tarde à retrouver ses marques, tous les autres ont fait leur trou en équipe première. A ce total, il convient encore d’ajouter deux jeunes qui ont déjà obtenu du temps de jeu de la part du nouvel entraîneur : le médian Ben Youssef et le défenseur Frederik Frans. Celui-ci, qui a fait montre d’aptitudes réelles, vient d’ailleurs de signer un contrat professionnel jusqu’en 2010. Par là même, les Jaune et Noir renouent avec une tradition qui veut qu’ils aient toujours fait la part belle à des jeunes du cru. Comme Jérôme Van der Zijl (médian), lancé lui aussi dans la bataille cette saison malgré la situation précaire du club. D’autres, tout aussi novices, sont devenus entre-temps des valeurs sûres sous les ordres du coach norvégien. On songe à Kane Develer par exemple, régulièrement utilisé sur le flanc gauche de l’attaque.

2. Expérience

Le Brussels a joué à un moment donné, lors des matches aller, avec une formation dont la moyenne d’âge excédait à peine les 21 ans. Mais les cacahouètes, qui faisaient encore la fierté du président Johan Vermeersch en début de campagne, au moment où le club de la capitale tenait le haut du pavé avec un 10 sur 12, n’ont pas gardé longtemps leur fraîcheur. Et à mesure que la compétition avançait, le besoin d’éléments chevronnés devenait de plus en plus impératif. La période de transfert de janvier a été placée sous ce signe car à l’exception d’Owona et de Le Postollec, âgés d’une bonne vingtaine d’années à peine, toutes les autres recrues concernent des éléments ayant de la bouteille : Bangoura 25, Neva et Citony 26, Bouchouari 28 et Negouai 29. En outre, bon nombre de ces garçons n’ont pas fait qu’agrandir qualitativement le noyau. Certains ont carrément comblé des vides. Depuis le départ d’ Igor De Camargo au Standard, les Coalisés n’avaient par exemple plus de véritable buteur. Ce hiatus a été compensé par la venue de Bangoura. D’autre part, les pensionnaires du stade Edmond Machtens ne comptaient plus, non plus, de véritable agent de liaison entre leurs lignes. A cette fin, Negouai contribue lui aussi à gommer un manque.

Le Lierse, pour se tirer d’affaire, a attiré lui aussi des éléments chevronnés, qui forment actuellement son épine dorsale : Moons au goal, son ancien coéquipier au Racing Genk, Claessens dans l’axe de la défense et Chris Janssens dans l’entrejeu. Théoriquement, Tailson aurait dû être le prolongement de cette ligne à l’attaque mais, en lieu et place, c’est Mustafa Jarju qui occupe le rôle d’attaquant de pointe. Il s’agit là d’une trouvaille de Kjetil Rekdal car, à son arrivée, le Gambien occupait encore une position centrale dans l’entrejeu. Après que Bob Peeters, blessé, ait dû décrocher en tout début de saison, l’attribution du poste le plus avancé avait été confiée à Dragan Mrdja. Mais celui-ci manquait de qualités pour s’imposer en pointe. La division offensive était d’ailleurs le point faible des Jaune et Noir, puisqu’à mi-parcours, ils n’avaient scoré qu’à 10 reprises à peine. Depuis le début du deuxième tour, jusqu’au match du week-end passé, il est symptomatique de constater que seul lors des déplacements à Westerlo et à Genk, les sociétaires du Lisp n’ont pas marqué. Ce qui en dit long sur l’inclination plus offensive perceptible chez eux depuis quelques semaines.

3. Tactique

En raison des nombreuses indisponibilités, Albert Cartier, le mentor du FC Brussels, a dû souvent changer ses batteries et aligner l’un ou l’autre de ses éléments à une place pas nécessairement la meilleure pour lui. Julien Gorius a été tour à tour titularisé sur le flanc gauche, puis droit, voire comme attaquant en retrait. Zola Matumona a été amené à coulisser à droite, par moments, alors que son rôle de prédilection est celui de soutien d’attaque. Grâce à la venue de Citony, capable de jouer avec un égal bonheur dans les couloirs gauche ou droit, l’international congolais a pu remplir plus souvent la mission pour laquelle il avait été attiré au stade Edmond Machtens. Le 4-4-1-1, avec Bangoura en position la plus avancée, se mue au besoin en 4-4-2. Dans ce cas, Dieudonné Kalulika ou Jonathan Téhoué remplissent le rôle de deuxième attaquant.

Au départ, Rekdal avait focalisé toute son attention sur l’arrière-garde. Il est vrai qu’avec 33 buts encaissés en 17 matches, elle était de loin la plus faible de l’élite. Dans un premier temps, le coach norvégien abandonna la ligne à 4 au profit d’une division défensive constituée de cinq éléments. De droite à gauche devant le dernier rempart, Moons, il en allait là de Marko Andic, Mario Verheyen, Marko Muslin, Claessens et Thompson. Dès que ce secteur fit montre de stabilité, le coach fit monter d’un cran Muslin, devenu médian défensif. Mais là ne s’arrêtaient pas les modifications tactiques : du 4-4-2 initié par son devancier à la tête des troupes lierroises, Rekdal passa au 4-3-3 avec Jarju en pointe, flanqué des ailiers Develer à gauche et Kristof Snelders à droite. Non sans succès car depuis que le fils d’ Eddy occupe cette position, il n’a jamais été aussi performant. La preuve par son but de la tête face à ses anciennes couleurs, au FC Brussels, ainsi que par son récent doublé au Standard.

4. Individualités

La force du FC Brussels, à l’entame de cette campagne, c’était son bloc. Mais il s’était quelque peu effrité suite aux blessures. En outre, il manquait indéniablement l’une ou l’autre individualités au sein du onze de base afin de conférer un plus à l’ensemble. Sans oublier le facteur taille, car à l’exception de Richard Culek, les Coalisés ne recelaient pas de véritables spécialistes dans le jeu aérien. A l’exception de Owona et de Citony, qui font tous deux 175 centimètres sous la toise, les cinq autres recrues sont tous des garçons élancés, avec un Negouai qui domine tout le monde du haut de ses 1,94m. Ce qui ne gâte rien, tous ces transfuges sont synonymes de qualité. Tonique, Owona a prouvé qu’il est davantage qu’un back gauche en marquant de maîtresse façon contre Zulte Waregem. Citony a démontré ses qualités techniques en amenant le premier but contre le Lierse et en paraphant lui-même le deuxième. Le Postollec s’impose comme un habile récupérateur dans l’entrejeu, même s’il est parfois victime de son impétuosité. Neva s’est, pour sa part, érigé en tour défensive au côté de Zoltan Petö. Quant à Bangoura, Negouai et Bouchouari, ils avaient déjà des lettres de noblesse avant de débarquer.

Ce sont des footballeurs animés d’un sentiment de revanche qui ont débarqué chez les Lierrois lors de la transhumance d’hiver. Moons, figure marquante du Racing Genk pendant des années, avait été prié de céder sa place à Logan Bailly cette saison. Recasé avec brio au poste d’arrière central par René Vandereycken après avoir £uvré durant toute sa carrière au demi, son ancien coéquipier chez les miniers, Gert Claessens fut, lui, carrément écarté du noyau A des Limbourgeois sans forme de procès. Pour ce qui est de Chris Janssens, véritable dynamo dans l’entrejeu de Westerlo la saison passée, il n’avait jamais trouvé sa place sur l’échiquier de Francky Dury, à Zulte Waregem, lors du premier volet de l’actuelle compétition. Une même idée de se montrer constituait également le leitmotiv du jeune Kums. Mis sous contrat au RSCA en décembre dernier, l’espoir des Mauves se rendait compte qu’il n’avait quasi aucune chance de jouer au Parc Astrid durant les mois à venir. Aussi, à l’image de Sami Allagui et de Sébastien Siani, autres jeunes pousses mauves cédées l’une à Roulers et l’autre à Zulte Waregem, le troisième larron décida de rejoindre au Lisp son pote en sélection nationale des moins de 21 ans, Yoni Buyens. Et ce avec succès car depuis son arrivée chez les Jaune et Noir, il est titulaire au poste de régisseur en équipe-fanion.

5. Discipline

En dépit de l’apport individuel des nouveaux, tout n’en reste pas moins subordonné au groupe chez les Coalisés. Citony a été le premier à le comprendre. Auteur d’un stage prometteur en Turquie, le Français n’en avait pas touché une lors de son match d’ouverture à Mons et, ensuite, devant son public, face à Zulte Waregem. Conséquence : une rentrée anticipée après moins d’une demi-heure de jeu à peine. Un avertissement qui eut son effet car lors du deuxième match à domicile, face au Lierse précisément, le Français fut le roi du terrain en étant impliqué dans les deux buts. Il aurait même pu en planter un de plus si, lors d’un 3 contre 2, Kalulika ne l’avait pas joué perso en snobant son coéquipier. Résultat des courses : une relégation temporaire dans le noyau B, histoire de se remettre les idées bien en place. Car au FC Brussels, avec Cartier, le collectif primera toujours sur l’individu.

Malgré son échec à la chaussée du Lisp cette saison, personne dans les sphères du club ne songe à jeter la pierre à René Trost, qui avait réalisé un authentique miracle l’année dernière en maintenant les Jaune et Noir parmi l’élite. De fait, le seul reproche que l’on entendait quelquefois formuler à son égard avait trait au manque de physique de ses ouailles. Après une bonne heure de jeu, la plupart des Lierrois étaient toujours au bout du rouleau. Avec Rekdal, l’accent a été mis d’entrée de jeu sur le labeur. Le regain de condition a également permis au Norvégien d’instaurer une autre approche : sous sa coupe, fini le jeu élaboré avec de nombreux stades intermédiaires et place à un football plus direct avec pressing immédiat sur le porteur du ballon. Un système qui requiert une énorme discipline et qui avait permis au Lierse, avant le match du week-end, de glaner 10 points sur 27. Trost, pour mémoire, n’en avait pris que 2 sur 39. Une fameuse différence.

par bruno govers – photos belga/walschaerts

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