Maxi TRIPS

Bruno Govers

Les candidats au plus haut diplôme d’entraîneur ont effectué des stages dans plusieurs grands clubs européens. Morceaux choisis.

Ils étaient 14, cette année, à suivre les cours de la Licence Pro, dispensés par le Directeur du Département de Formation de l’URBSFA, Frans Masson et son équipe.

Par ordre alphabétique, il y avait Dante Brogno (Charleroi), Nico Claesen (Patro Maasmechelen), Alex Czerniatynski (Malines), Paul Degenaers (G. Beerschot), Pierre Denier (RC Genk), Henri Depireux, René Desaeyere, Herman Helleputte (Beveren), Cedomir Janevski (Club Brugeois), Jacky Mathijssen (Saint-Trond), Eddy Snelders (Diables Rouges), Erwin Vandenbergh (Westerlo), Franky Vercauteren (Anderlecht) et Ludo Wouters (Wolvertem). Au programme, outre 100 heures de théorie et autant de pratique (v. cadre), les candidats au plus haut diplôme d’entraîneur se devaient d’effectuer un stage de trois jours dans un club étranger. Pour certains, ce dernier volet reste encore à accomplir. C’est le cas d’Henri Depireux, censé prochainement clôturer son apprentissage au FC Metz, voire pour les ex-Anderlechtois Alex Czerniatynski et Franky Vercauteren, attendus à l’Olympique Lyonnais. Pour les autres, c’est fait. A quatre d’entre eux, nous avons demandé d’évoquer cette expérience : Brogno au Real Madrid, Claesen à Tottenham, Helleputte à Arsenal et Vandenbergh à l’Ajax.

Brogno au Real :  » Six laissez-passer pour voir Queiroz  »

 » Il y a deux ans, l’équipe B du Real Madrid avait disputé une joute amicale face aux Zèbres. J’avais eu, à ce moment-là, l’occasion de sympathiser avec le coach de cette formation, Juan Ramon Lopez, et lorsque je dus me mettre en quête d’un club étranger dans le cadre de l’obtention de la Licence Pro, j’ai immédiatement songé aux Merengue. J’ai finalement séjourné chez eux du 1er au 3 mars et je ne suis pas près d’oublier. Car autant les formalités à remplir sont fastidieuses û il ne faut pas moins de six laissez-passer différents, par exemple, pour arriver chez le coach Carlos Queiroz û, autant l’accueil à chacun de ces différents échelons est fantastique. Ma première entrevue, je l’ai eue avec le manager Jorge Valdano qui, après une présentation générale du Real, m’a confié aux bons soins d’ Emilio Butragueño, ancienne star locale comme lui. El Buitre est aujourd’hui à la tête du département des jeunes, où officient d’autres figures légendaires, que j’ai pu voir à l’£uvre dans la foulée : Michel, qui s’occupe du suivi individuel des attaquants, Manuel Sanchis, qui a sous sa coupe les défenseurs en herbe et Chendo, détaché auprès des médians.

La politique du club est de favoriser l’épanouissement d’une promesse, année après année, comme Francisco Pavon et Javier Portillo ces deux dernières saisons, tout en attirant aussi, dans le même temps une star de renommée mondiale chaque été, à l’image de Ronaldo et David Beckham. Les Galacticos, je les ai d’ailleurs vus à l’£uvre au stade Santiago Bernabeu contre le Celta Vigo : victoire 4-2 avec, par moments, des envolées de très grande classe. Lors des deux séances d’entraînements que j’ai visionnées au cours de ce stage, j’ai pu tailler une bavette avec certains d’entre eux, tels que Zinédine Zidane ou Raúl. Tous étaient très abordables et extrêmement sympas. La seule exception à la règle, c’était Beckham, qui n’a jamais daigné me tendre la main. Sans doute avait-il déjà des ennuis avec Posh Spice à l’époque « . (il rit).

Claesen à Tottenham :  » Pas de parents aux entraînements  »

 » Le choix des Spurs était évident : j’ai milité à White Hart Lane à la fin des années 80 sous les ordres de David Pleat, qui est d’ailleurs toujours en charge des Londoniens aujourd’hui. Le manager n’était pas la seule vieille connaissance que j’ai retrouvée là-bas. Mes anciens coéquipiers Chris Houghton et Clive Allen y font partie du staff d’entraîneurs, de même que l’ex-gloire du club au poste de gardien, Pat Jennings. Jacky Mathijssen, qui m’avait accompagné à Tottenham, au même titre que Pierre Denier d’ailleurs, était très impressionné au demeurant par le charisme et l’extrême amabilité de celui qui fut son idole.

Par rapport à mon époque, je me rends compte que le club a sensiblement évolué. Tout d’abord au niveau des infrastructures puisque le complexe d’entraînement vieillot de Heartford Heath a cédé la place aujourd’hui à un superbe écrin dans la banlieue nord de la capitale anglaise. D’autre part, si de mon temps un coach spécifique pour les keepers était déjà présent, en la personne du légendaire Ray Clemence, il n’y avait pas encore d’encadrement particulier pour les avants, comme c’est le cas à présent avec ce grand buteur qu’était Clive Allen. Mais ce qui m’a le plus frappé, c’est la nouvelle politique des Noir et Blanc avec la jeune classe. Si les parents peuvent assister aux matches des enfants, entre six et 14 ans, leur présence est absolument interdite lors des séances de préparation, qui se déroulent toujours dans une atmos-phère feutrée. Selon les dires de David Pleat, c’est une manière d’éviter que les conseils des parents n’empiètent sur les injonctions des entraîneurs. En outre, lors des matches, c’est le culte de la gagne qui prévaut aujourd’hui, alors qu’autrefois, l’aspect ludique était toujours le plus important.

Je me souviens que le mot d’ordre, chez les promesses, se résumait en deux mots : – Enjoy yourself (Amusez-vous) « . A présent, le leitmotiv, c’est – Win the game (Gagnez le match). Il est vrai que la concurrence avec les voisins d’Arsenal, devenus la référence à Londres, est terrible et qu’il s’agit de rallier le plus grand nombre possible d’espoirs à sa cause. De là ce changement de philosophie qui a fait l’effet d’une véritable surprise pour moi également « .

Helleputte à Arsenal :  » Quatre heures avec Wenger  »

 » Grâce à l’accord de coopération entre Arsenal et Beveren, j’étais évidemment le bienvenu à Highbury, à l’instar d’ Eddy Snelders et de René Desaeyere. En raison du calendrier démentiel de l’équipe à Pâques, avec quatre matches à disputer en l’espace de dix jours, le manager des Gunners, Arsène Wenger, nous avait prévenus que le programme d’entraînement risquait d’être fortement allégé. Ce qui s’est bel et bien vérifié car à l’exception de l’un ou l’autre éclopé, comme Ray Parlour, ou de quelques réservistes, au rang desquels j’ai eu beaucoup de plaisir à retrouver le gardien Graham Stack, actif au Freethiel la saison passée, nous n’avons malheureusement pas pu voir à l’£uvre, au quotidien, les grandes vedettes du club que sont Thierry Henry, Robert Pires ou encore Patrick Vieira.

Mais cette petite déception a été largement compensée par l’entrevue de quatre heures que nous avons eue avec le coach français. Pendant tout ce temps, nous sommes réellement restés accrochés à ses lèvres, tant son discours était captivant. Vu ses états de service, nous nous sentions tout petits, à côté de lui, avec nos palmarès respectifs. Mais l’Alsacien nous a mis d’emblée à l’aise en arguant qu’une carrière relevait non seulement de capacités mais aussi de hasard et de chance. Et il étaya ses dires par son propre cas puisqu’au moment où l’AS Monaco lui proposa de rempiler, voici quelques années, il préféra patienter au point de s’en mordre les doigts, puisqu’il fut renvoyé. Au Japon, où il aboutit ensuite, il s’en fallut de peu aussi qu’il ne subisse le même sort, puisqu’il endura avec les Nagoya Grampus Eight pas moins de huit défaites en dix matches.  » Si j’étais passé à la trappe pour la deuxième fois de rang, jamais je n’aurais rebondi par la suite à Arsenal « , nous fit-il remarquer.

Ce qui m’a marqué aussi, lors de notre visite, c’est le fabuleux complexe d’entraînement de Colney. Je comprends qu’Anderlecht veuille s’en inspirer pour la mise sur pied de son propre centre de formation car avec son bâtiment formé de deux ailes û l’une pour le noyau pro et l’autre pour les coming men û ainsi que ses dix aires d’entraînement, c’est un outil fabuleux. La fluidité du jeu d’Arsenal découle sûrement, dans une grande mesure, de cette possibilité de pouvoir se préparer journellement sur de vrais billards. Et quand on a le talent en plus, cela fait inévitablement des dégâts « .

Vandenbergh à l’Ajax :  » L’impression d’être un intrus  »

 » C’est Ludo Wouters, ancien collègue de Louis Van Gaal à l’Antwerp, qui avait réglé pour lui, Cedomir Janevski et moi-même, les contacts avec le grand club amstellodamois. Bizarrement, au cours de nos trois journées à l’Arena, à Pâques, nous n’avons eu à aucun moment l’occasion de discuter avec l’ancien coach du Barça, devenu aujourd’hui l’un des pontes du comité. De manière générale, j’ai d’ailleurs le sentiment que nous faisions tous figures d’intrus là-bas. Certes, nous avons finalement pu assister à des séances d’entraînement du coach principal, Ronald Koeman, et son assistant, Tonny Bruins Slot nous a également parlé longuement de la formation des jeunes. Mais il est clair qu’ils n’ont pas soulevé tous les coins du voile.

Personnellement, ce qui m’intéressait le plus, en tant qu’entraîneur des Espoirs à Westerlo, c’était le travail avec les classes d’âge. Ce qui m’a sidéré, à ce niveau, c’est l’engagement et la vitesse d’exécution. A 14 ans, on voit que ces promesses sont déjà d’authentiques professionnels en herbe. Et, ce qui ne gâte rien, toutes les catégories sont remarquablement encadrées. Avec, au sommet de la pyramide, les anciennes gloires Marco van Basten et Johnny Van ‘t Schip pour former les attaquants. Avec des maîtres pareils, les élèves sont manifestement à bonne école « .

Bruno Govers

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