MAUVAISE CONSTRUCTION

John Baete

Dans la recherche d’un équilibre tactique défaillant, l’Argentin Cristian Leiva pourrait-il constituer une solution ?

Le milieu de terrain argentin Cristian Leiva fêtera-t-il ses 30 ans le 26 septembre prochain à Bruxelles ? Peu de chances dans l’état actuel des choses. Il n’a pratiquement pas joué cette saison (5 malheureux matches en D1), a été couronné Flop du premier tour lors de notre Bilan de décembre et a manifesté à plusieurs reprises son envie de changer d’air.  » On me manque de respect à Anderlecht « , a-t-il déjà répété. Pour souligner sa frustration, il a quitté l’entraînement au moins à deux reprises, du jamais vu ou presque dans l’histoire du vénérable club bruxellois, connu pour ne jamais avoir gardé des joueurs indisciplinés.

Mais samedi dernier, lors d’Anderlecht Saint-Trond, Leiva était toujours là, s’échauffant en vain le long de la ligne en compagnie d’ Anthony Vanden Borre jusqu’en fin de match. Un touchant duo de rebelles écartés du 11 de base.

Quand le club s’est séparé en décembre du vétéran Yves Vanderhaeghe (parti à Roulers), le manager Herman Van Holsbeeck avait été très clair :  » Pas question de laisser partir Cristian aussi. Quant à ses accès de colère, comptez sur nous pour lui rappeler ses devoirs professionnels. Il est sous contrat jusqu’en 2009 et nous entendons qu’il le respecte à la lettre « .

Contre Saint-Trond, Anderlecht a gagné sans être éblouissant. Quittant son système le plus courant (4-3-1-2), Frankie Vercauteren opta comme en Coupe contre Dender pour un 4-2-1-3, avec Lucas Biglia et Bart Goor devant la défense et Ahmed Hassan en soutien de trois attaquants : Mbo Mpenza, Nicolas Frutos et Mbark Boussoufa. Une équipe déséquilibrée : les attaquants ont trop attendu des ballons qui ne venaient jamais. Le manque de construction a été évident et Hassan, très spectaculaire, manqua d’espace et fut souvent trop éloigné du but trudonnaire. Frutos et Mpenza n’ont presque pas touché le ballon. Il y avait un attaquant de trop. Mais le constat n’était pas paradoxal. Vercauteren, lui-même, n’a-t-il pas déjà souvent dit :  » Ce n’est pas parce qu’on joue avec plusieurs attaquants qu’on joue bien offensivement ? ». Anderlecht n’a pas obtenu plus d’occasions que les deux buts marqués : c’est très peu ! Vercauteren est d’ailleurs revenu à son ancien système en fin de match avec trois médians, comme contre Dender. C’est un signe.

Revenir à trois dans l’entrejeu

La voie du progrès passe par un entrejeu à trois, avec un soutien derrière deux attaquants. On reviendrait à un triangle comme du temps de Marc Degryse-Johny Bosman-Luc Nilis. Hassan ressemble d’ailleurs plus à Degryse qu’à Pär Zetterberg et doit jouer près du but. Boussoufa peut aussi évoluer à cette place ou en pointe… où Anderlecht est très riche avec Mpenza, Frutos et Mémé Tchin-Tchin,… pardon : Tchité, ce dernier planant au-dessus du lot..

Et l’entrejeu ? Biglia et Goor semblent titulaires incontestables. Après les essais de Vanden Borre à droite, Vercauteren a tenté de jouer à deux mais a fait monter le jeune Jonathan Legaer dans le milieu à deux reprises. Il peut surprendre par sa vitesse, mais reste très frustre. Vanden Borre joue un peu dans le même registre. Anderlecht a besoin d’autre chose à droite comme médian. Mbo Mpenza pourrait éventuellement convenir sur le côté droit de l’entrejeu mais il ne se voit que comme un attaquant,… alors que c’est sur un flanc qu’il a disputé ses meilleurs matches au plus niveau (rappelez-vous les Diables de RobertWaseige… mais en 4-4-2 il est vrai).

Quand on observe le noyau, c’est finalement dans l’entrejeu que Vercauteren a le moins de choix. Est-ce pour ça qu’il a tenté de jouer de manière déséquilibrée vers l’avant récemment ? A l’avenir, il faudra beaucoup mieux construire. Et pourquoi pas avec Cristian Leiva ?

Qui se souvient d’Athènes ?

Par rapport aux Anderlechtois figurant régulièrement dans nos Top 10 du premier tour ou aux prix décrochés lors du Soulier d’Or, Leiva a tout du vilain petit canard. Mais rappelez-vous l’histoire : le volatile n’était pas dans son monde. Il valait mieux que ce que l’on pensait de lui. En fait, il était un cygne. Difficile d’imaginer que Leiva joue si peu parce qu’il est mauvais. Ce serait diminuer la qualité du recrutement anderlechtois mené en Argentine récemment et qui porte ses fruits avec le trio Frutos, Biglia et Nicolas Pareja, qui rejouera le week-end prochain suite à sa blessure.

On n’a vu jouer Leiva qu’une fois à un haut niveau : lors du match aller de Ligue des Champions à l’AEK Athènes fin septembre, dans l’entrejeu avec Biglia et Goor (1-1). Le bonhomme avait couvert beaucoup de terrain, s’ingéniant à être tout le temps démarqué, à aider ses partenaires en perte ou en possession de ballon et à soigner ses passes. Il n’était pas sans rappeler un Johan Walem en plus buriné. En Argentine, son poil noir lui avait d’ailleurs valu le surnom d’ El Negro. Une allure de dur. Et ceux qui l’ont déjà vu en slip garantissent que ses tatouages sont impressionnants.

On ne peut imaginer que Vercauteren n’ait jamais besoin de lui à un moment ou un autre. Un petit rappel : Vanderhaeghe joua beaucoup (trop ?) au premier tour : 10 matches de D1 et 206 minutes en LC contre 5 matches de D1 et le seul match grec pour Leiva. La compétition européenne est terminée et le champion en titre doit devenir plus dominant pour gagner à la fois le championnat et la Coupe, les objectifs avoués.

Pas étonnant que Leiva ait dû rester. Qu’attend donc Vercauteren pour reconduire la bonne expérience athénienne ? Le coach n’a pas l’air d’apprécier outre mesure l’Argentin et lui fait payer ses écarts de discipline. Enfin, on conseillera la patience à Leiva. Vercauteren n’est pas inflexible par principe et sait toujours donner leur chance aux joueurs qui le méritent.

JOHN BAETE

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