Madrid champion d’Europe

Bernard Jeunejean

Quand j’étais petit et qu’Anderlecht, pourtant dominateur de notre championnat, collectionnait les éliminations hâtives en Coupe d’Europe, les journaux m’expliquaient que le Sporting n’avait pas assez l’habitude d’être malmené… et mené tout court ! J’ai repensé à ce manque de planches après la pilule 0-4 administrée au Bayern par le Real Madrid : coach débutant d’un Barça couvert de lauriers avant d’être celui de l’Ogre de Bavière, Pep Guardiola avait-il assez d’expérience pour revenir au score en étant mené (de plus d’un but) par aussi fortiches que les siens ?

C’est ce qui fut le plus chouette via les deux demi-finales/retour de cette Ligue des Champions : via leur élimination indiscutable, nous avons échappé à la divinisation (qui eût été indue) de Pep comme de José Mourinho ! Ça fait du bien car ces deux-là, comme les autres, dépendent avant tout de la valeur de leur effectif… et des aléas inhérents au foot ! Le Bayern s’est d’abord ramassé deux coups de tête sur balle arrêtée : impossibilité de marquage individuel quand on est quinze autour du peno, d’aussi grands gars en face que chez les tiens… et parfois tu te chopes gaïole, que tu t’appelles Pep ou Tartempion ! Le 0-3, Pep ? Si tu joues dans le camp adverse, tu t’exposes toujours au contre, et TOUS les attaquants adverses du monde en raffolent (pas seulement ceux dont le contre est l’arme dite favorite) : car c’est plus fastoche de niquer les défenseurs à 2 contre 2 sur grand espace qu’à 6 contre 6 sur espace de schtroumpf ! Quant au 0-4 sur coup franc à ras-de-terre dessous un mur qui saute bien haut, tu as l’air con comme coach, que tu t’appelles Tartempion ou Pep…

Mourinho préfère jouer bas, c’est son droit, mais penser plus défensif n’est pas non plus la panacée : faut pas pleurnicher si tu encaisses un shoot dévié, si Cesar Azpilicueta (positionné devant Branislav Ivanovic) n’a pas le côté/buteur d’André Schürrle… ou si Eden Hazard ne défend pas toujours aussi lucidement qu’un défensif par vocation ! Et même le plus grand psychologue du monde peut être impuissant face à la connerie impulsive d’un de ses joueurs en principe des plus matures : oui, Samuel Eto’o, à 1-1, a sliding-tacklé comme un trou de balle dans le grand rectangle londonien…

Ce n’est pas Xabi Alonso qui raisonnera Sam du Cam : il s’est laissé aller au même sliding alors que son équipe menait 0-3, et qu’un carton jaune le priverait de finale : comme quoi au foot, tu peux être le cerveau d’un onze et manquer pourtant d’un boulon ! Pourtant, hormis évidemment Cristiano Ronaldo, s’il y a bien un mec difficilement remplaçable au Real, c’est bien Xabi Alonso… qui sera donc coupable rétrospectif de faute professionnelle grave si l’Atletico l’emporte en finale ! Une finale 100 % madrilène… et 40 % espagnole lorsqu’on auscultera les nationalités au coup d’envoi de ce samedi ! Un souhait ? Volontiers, et par chauvinisme ordinaire : que l’Atletico l’emporte (surtout s’il a loupé le titre espagnol) avec un Thibaut Courtois yachinesque (l’Araignée belge !), via une mine des 25m partie du pied droit de Toby Alderweireld entré au jeu.

Un pronostic ? Aucun sinon qu’il y aura loterie, à l’issue d’un match que j’espère moins pauvre en buts que Séville-Benfica. La question me semble être : qui couillonnera qui PAR LES FLANCS ? Ce qui impressionne offensivement côté Atletico, plus que Koke dont je n’ai pas encore vu les merveilles, plus que Diego Costa dont j’ai déjà admiré le sens du but, c’est l’apport permanent (et fréquemment simultané) de Juanfran Torres et de Filipe Luis. Côté Real, l’adversaire doit s’attendre au pire quand ce sont les attaquants qui rentrent dans l’axe à partir des flancs, que ce soient les deux gauchers Gareth Bale et Angel Di Maria, ou Ronaldo qui sait tout faire. Un Ronaldo qui, s’il score victorieusement, risque d’instinctivement renouveler pour les télés son geste munichois, à savoir montrer avec ses doigts le nombre de buts qu’il a pétés au fond en Ligue des Champions : le sport collectif n’exclut pas l’ego surdimensionné. Au contraire.

BERNARD JEUNEJEAN

Qui couillonnera qui par les flancs ? C’est la question de ce derby pas comme les autres !

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