Loups de BRUGES

Deux anciens Loups reviennent au Tivoli pour le quart de finale retour de la Coupe de Belgique.

Pendant le mercato, La Louvière s’est séparée de quelques-uns de ses plus beaux atouts. Deux d’entre eux ont pris la direction de Bruges. Manaseh Ishiaku et Michael Klukowski étaient arrivés ensemble au Tivoli, il y a deux ans et demi : le premier en provenance de Roulers, le second de l’équipe de CFA de Lille. Ils étaient, à l’époque, d’illustres inconnus, mais s se sont rapidement affirmés comme de véritables renforts. Dès leur première saison, ils ont remporté la Coupe de Belgique avec les Loups.

L’attaquant nigérian avait même inscrit deux buts en finale contre Saint-Trond. Le hasard du tirage au sort a voulu qu’en quarts de finale, cette année, Bruges soit opposé à La Louvière. Le match aller a déjà eu lieu au Stade Jan Breydel et s’est clôturé par un partage 2-2 qui laisse la porte ouverte à toutes les hypothèses. Le retour est prévu pour ce soir au Tivoli.

Que vous inspire ce match retour dans un stade qui vous a permis de vous révéler aux yeux du grand public ?

Manaseh Ishiaku : Ce sera spécial, bien sûr. Davantage encore que le match aller, qui avait lieu à Bruges. C’est la première fois que je retournerai là-bas depuis mon départ pour la Venise du Nord. Je me réjouis de retourner dans un stade où j’ai su me faire apprécier. Je ne pense pas que le public sera vindicatif à mon égard. Les supporters louviérois avaient déjà scandé mon nom lors du match aller et je ne vois pas pourquoi ils retourneraient leur veste aujourd’hui. Je n’ai gardé que de bons souvenirs de mon passage au Tivoli. Ma première saison avait été excellente, avec en apothéose cette finale de la Coupe. Ma deuxième saison fut plus moyenne. Des difficultés d’ordre privé furent à la base de cette baisse de régime. Cette saison, j’ai retrouvé toute ma tonicité et ce bon premier tour m’a permis d’obtenir ce beau transfert à Bruges.

MichaelKlukowski : Pour moi aussi, ce sera d’abord un plaisir de retourner au Tivoli. Je n’oublierai pas les bons moments que j’ai passés là-bas, ni le fait que ce club m’a offert une chance en D1 alors qu’en France, certains dirigeants ne croyaient pas trop en moi. Mes meilleurs souvenirs restent, bien évidemment, cette finale de la Coupe de Belgique remportée en 2003 au terme de ma première saison, alors que personne ne s’y attendait, mais aussi le premier tour de cette saison-ci, où nous avons réalisé d’excellents résultats tout en pratiquant un football de très bonne qualité. Pourquoi suis-je parti, si je me plaisais autant au Tivoli ? Vous savez, lorsque l’occasion de franchir un palier supplémentaire se présente, il ne faut pas hésiter. Dans une carrière, il faut parfois se résoudre à relever de nouveaux défis, sinon on n’avance pas. C’est ce genre de principe qui m’a animé jusqu’ici : j’ai pris le risque de quitter le Canada pour tenter ma chance en Europe, j’ai quitté les amateurs français pour jouer en D1 belge et aujourd’hui je me retrouve dans l’un des deux plus grands clubs du pays.

Un rêve qui s’est réalisé

Que représente pour vous ce transfert à Bruges ?

Ishiaku : Lorsqu’il s’est réalisé, je me suis fait la réflexion que le football pouvait vous conduire partout, même là où vous ne l’auriez jamais imaginé. Si l’on m’avait dit, il y a deux ans et demi, que je jouerais à Bruges, je ne l’aurais pas cru… Mon passage à La Louvière a servi de révélateur, et rien que pour cela, je serai éternellement reconnaissant aux Loups. Pour moi, ce transfert à Bruges est un rêve qui s’est réalisé. Je suis très heureux. Jamais je n’aurais imaginé pouvoir évoluer un jour à un tel niveau.

Klukowski : C’est un palier supplémentaire franchi dans ma carrière. Je suis très fier d’avoir suscité l’intérêt d’un club de ce calibre, deux ans et demi après la signature de mon premier contrat professionnel. Je n’ai jamais caché que mon rêve était d’évoluer un jour en PremierLeague. J’ai reçu une proposition pour partir en Angleterre durant le mercato, mais elle émanait d’un club de FirstDivision (l’équivalent de la D2), pas de l’élite. Il n’y avait rien de concret dans les autres rumeurs qui ont circulé. Je ne pense pas que mon transfert à Bruges constitue un obstacle à mon ambition de rejoindre, à terme, le plus haut étage du championnat anglais. Au contraire : si je m’impose ici, on devrait davantage s’intéresser à moi que lorsque j’évoluais à La Louvière. J’ai le temps. J’ai signé pour trois ans et demi à Bruges, et je ne veux pas brûler les étapes. Je dois d’abord faire mon trou ici.

Comment se sont passées vos premières semaines dans votre nouveau club ?

Ishiaku : Très bien. J’avais quelques appréhensions au départ, mais j’ai été remarquablement accueilli. Au début, j’ai éprouvé quelques difficultés à m’adapter au système de jeu. J’ai eu l’impression de tomber dans une machine dont tous les rouages étaient huilés. Tous les joueurs savent parfaitement de quelle manière ils doivent se déplacer, et à quel moment. C’est presque automatique. Moi, j’arrivais et je me sentais un peu perdu face à tant de facilité. Je ne savais pas trop où courir. Il m’arrivait de filerr à gauche alors que j’aurais dû partir à droite, et des choses ainsi. Aujourd’hui, cela va déjà beaucoup mieux. Le système de Trond Sollied n’est pas très difficile à assimiler, mais il faut un peu de temps et beaucoup de concentration.

Klukowski : Au niveau de l’adaptation, aucun problème : le groupe est accueillant. Les horaires d’entraînements sont différents. A Bruges, on s’entraîne souvent à 14 heures. A La Louvière, c’était soit à 10 heures du matin, soit plus tard dans l’après-midi. Et avec, fréquemment, des doubles sessions. Cela change un peu les habitudes, mais mon nouveau régime ne me déplaît pas. On a beaucoup de temps pour s’entraîner individuellement, et lorsqu’on joue peu, c’est une nécessité. Il faut donc s’astreindre à une certaine discipline personnelle. Le jeu, comme l’a dit Manaseh, est un peu différent. En tant qu’arrière latéral gauche, on me demande de participer plus fréquemment aux offensives. A La Louvière, il m’arrivait de monter également, mais surtout pour les coups francs et les corners. Ici, je dois m’impliquer dans les combinaisons. Contrairement à Manaseh, qui a déjà reçu sa chance à plusieurs reprises, je n’ai pas encore eu beaucoup l’occasion de jouer. Mais je connaissais les règles du jeu au départ. Je savais que, lors de ce deuxième tour, j’officierais comme doublure de Peter Van der Heyden. Cela me change de La Louvière, où j’étais titulaire à chaque match. Ce n’est pas un problème. J’entretiens ma condition en m’entraînant intensivement et en disputant les matches de Réserve. Je me tiens prêt à toute éventualité. Peter part à Wolfsburg en fin de saison, et en principe, je serai familiarisé avec le système de jeu lorsque je serai appelé à prendre la relève. Peut-être recevrai-je ma chance plus tôt. Mais, si je dois patienter six mois sur le banc, j’accepterai mon sort sans broncher. J’ai appris que, dans la vie, il faut parfois se montrer patient. Après tout, lorsque j’avais débarqué à La Louvière en 2002, je n’avais aucune certitude d’être titulaire non plus. J’ai eu la chance d’être rarement blessé et de faire mon trou assez rapidement.

S’habituer au système de jeu

Tout le monde connaît le système de jeu préconisé par Sollied, mais personne ne trouve la parade pour le contrer. Comment expliquez-vous cela ?

Ishiaku : Ce système de jeu n’est pas très compliqué. Après quelques semaines d’entraînements, on est familiarisé avec ces principes. C’est une question de concentration, de répétition inlassable des mêmes mouvements. Contrer ce système, c’est encore autre chose. On peut l’avoir compris, mais il faut avoir les moyens de s’opposer aux joueurs. Bruges a beaucoup de joueurs de qualité. Des footballeurs très physiques et très athlétiques également. Ils sont aussi très forts dans la tête. Ils ne paniquent pas si, à un moment donné, les éléments se liguent contre eux. Ils savent que, tôt ou tard, ils reprendront le dessus.

Klukowski : Le système, effectivement, est assez simple à comprendre. Pour l’appliquer, c’est une question de pratique. Je peux apprendre, depuis le petit banc, en regardant jouer Peter Van der Heyden, mais je ne me contente pas d’observer le rôle de l’arrière gauche. J’analyse aussi le déroulement du jeu à d’autres positions. Car Bruges, c’est d’abord un collectif. Et lorsque l’un des joueurs n’accomplit pas la mission qui lui a été assignée, la machine peut s’enrayer.

Qu’est-ce qui vous a le plus impressionné à Bruges ?

Ishiaku : La qualité de l’effectif dans son ensemble. Du n°1 au n°30, tous les éléments sont très compétitifs. Et l’entraîneur a parfois l’embarras du choix lorsqu’il doit effectuer sa sélection.

Klukowski : Il y a pratiquement deux joueurs de qualité équivalente pour chaque position. Mais, ce qui est valorisant, c’est le sentiment que l’on éprouve tous les jours de faire partie du top. Tout, ici, est d’un grand standing : le stade qui a accueilli des matches de l’EURO 2000, l’organisation confiée à de nombreuses personnes alors qu’on travaillait en petit comité au Tivoli, les vestiaires spacieux. Après un match ou un entraînement, on peut se relaxer dans un grand bain. Ce genre de confort n’existait pas dans le vétuste Tivoli, et même si les infrastructures plus rudimentaires de La Louvière n’ont jamais empêché les footballeurs de se défoncer sur le terrain, c’est bien agréable d’être placé dans des conditions telles que je les découvre ici.

Estimez-vous, aujourd’hui, avoir le niveau footballistique pour évoluer dans un club comme Bruges ?

Ishiaku : J’estime être prêt à figurer dans l’effectif, en tout cas. Pour l’instant, malheureusement, je n’évolue pas à ma meilleure position. Je commence souvent les matches sur le flanc gauche, alors que je préfère un rôle plus central. Mais je ne peux pas faire la fine bouche. Je dois me contenter du rôle qu’on me propose et je peux déjà m’estimer très satisfait de jouer.

Klukowski : Je sais que je dois encore élever mon niveau de jeu pour être performant à un échelon supérieur, mais je suis prêt à travailler très dur pour cela.

Une impressionnante sérénité

Imaginez-vous que votre ancien club de La Louvière puisse atteindre les demi-finales de la Coupe de Belgique alors que Bruges resterait sur le carreau ?

Klukowski : Une qualification louviéroise n’a rien d’utopique, évidemment. Mon ancien club a réalisé un excellent résultat en partageant 2-2 au stade Jan Breydel. Cela nous oblige quasiment à gagner ce mercredi soir, à moins d’un improbable 3-3. Mais Bruges en est capable. Je dois cependant reconnaître que La Louvière m’a étonnée lors du match aller. Il y a beaucoup de nouveaux joueurs, et ceux-ci se sont rapidement fondus dans le moule. A 0-2, Bruges n’en menait pas large.

Ishiaku : Ce nouvel effectif louviérois a sans doute surpris Bruges, lors du match aller. Personne, ici, ne savait exactement à quoi s’attendre. Aujourd’hui, nous sommes avertis et nous irons au Tivoli pour gagner. C’est du 50-50, à mon avis. Mais il y a beaucoup d’expérience et de qualité dans le camp brugeois. Les joueurs, ici, sont rompus aux confrontations difficiles et aux matches à gros enjeu. Je n’oublie pas, cependant, que les Loups ont souvent posé des problèmes à ma nouvelle équipe.

Vous souvenez-vous de confrontations mémorables entre Bruges et La Louvière, alors que vous évoluiez dans le camp adverse ?

Klukowski : Je me souviens bien de la Supercoupe, en 2003 au stade Jan Breydel que Bruges avait gagnée.

Ishiaku : L’an passé, les deux clubs se sont rencontrés trois fois en très peu de temps. Ce furent toujours des matches serrés. Mais un match de coupe, comme celui de ce soir, est encore très différent d’un match de championnat.

Qu’est-ce qui vous permet d’affirmer que Bruges a les moyens de s’imposer au Tivoli ?

Ishiaku : Le fait, notamment, que Bruges se révèle très performant en déplacement. Ces dernières semaines, à domicile, l’équipe a éprouvé certaines difficultés. Ce fut le cas contre Charleroi, et encore dans le derby contre le Cercle. L’état de la pelouse, au stade Jan Breydel, n’a pas favorisé la construction du jeu. Mais, lorsque Bruges peut évoluer sur une pelouse en bon état, il parvient à dominer son adversaire. Or, la pelouse du Tivoli est l’une des meilleures de l’élite. Les joueurs brugeois ont confiance en leurs possibilités. Ils ont conscience de leur force, et personne ne se déplacera à La Louvière avec la crainte d’un échec. C’est un nouveau match qui commence, et on l’entamera avec la conviction de pouvoir l’emporter.

Klukowski : La sérénité qui règne dans ce groupe est impressionnante.

Qui marquera pour Bruges, ce soir ? Rune Lange ou Manaseh Ishiaku ?

Ishiaku : Peu importe, pourvu que l’on reparte avec la victoire.

Klukowski : Cela peut aussi être un défenseur. Beaucoup de joueurs, à Bruges, sont capables d’inscrire un but. C’est l’une des forces de cette équipe.

Ishiaku Diable Rouge ? Why not ?

Et l’équipe nationale ?

Klukowski : J’ai joué, le mois passé, un match amical en Irlande du Nord. Et, ce mois-ci, je devrais jouer contre le Portugal. Mais c’est une toute nouvelle équipe qui prépare des échéances très lointaines. Le prochain objectif est la Coupe du Monde… 2010. Pour 2006, c’est déjà fini. D’une certaine manière, cela me permettra de me concentrer pleinement sur Bruges.

Ishiaku : Je n’ai jamais eu la chance d’être appelé en équipe nationale nigériane. L’année passée, j’avais été convoqué pour un stage, mais je n’avais pas répondu à l’invitation. Depuis lors, je n’ai plus eu de nouvelles.

L’équipe nationale belge constitue-t-elle une autre possibilité ? Après tout, votre compagne est limbourgeoise…

Klukowski : Ah oui ! Manaseh en Diable Rouge, ce serait chouette…

Ishiaku : Je ne dirais pas non. De toute façon, cela ne dépend pas uniquement de moi.

Daniel Devos

 » Je joue peu et je dois beaucoup m’entraîner INDIVIDUELLEMENT  » (Klukowski)

 » Finalement, je me suis vite adapté AUX MéTHODES DE SOLLIED  » (Ishiaku)

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