LOIN DES TIRS

Le troisième volet des villes organisatrices de l’EURO nous conduit en bord de Méditerranée, à Marseille, au coeur de la deuxième ville de France. Une cité enchevêtrée, brouillonne, passionnée, qui offre bien plus que les histoires macabres de ses retentissants faits divers.

Marseille tire la tête. Son club phare, l’OM connaît une des saisons les plus sombres de son histoire. Un bilan sportif honteux, une direction aux abois, un club en vente, ont plongé ses supporters dans une grogne irréversible, du moins pour cette saison. La ville, elle, souffre d’un profond déficit d’image. Braquages, meurtres, kalachnikovs, insalubrité, ces noms reviennent régulièrement quand il s’agit d’évoquer l’actualité de la cité phocéenne. Le business de la drogue, à l’origine des nombreux assassinats des dernières années, rappelle le banditisme d’antan époque FrenchConnection qui connut son apogée dans les années 60.

Mais à y regarder de plus près, la plus ancienne ville de France (fondée par des marins grecs 600 ans avant JC) offre un visage bien plus souriant. Les chiffres liés à la criminalité auraient même tendance à diminuer ces dernières années. Elue capitale européenne de la culture en 2013, Marseille a profité de cet élan pour se dynamiser et se réinventer au coeur de ce décor grandiose qui enserre la ville, entre reliefs arides et horizons marins, qui vous procure un sentiment à la fois d’évasion et d’ambiance familière.  » Celui qui débarque un jour sur le port, il est forcément chez lui à Marseille… Dès le premier regard. « , racontait l’écrivain Jean-Claude Izzo.

VILLE COSMOPOLITE

L’ouverture sur la mer Méditerranée fait de la cité phocéenne une ville cosmopolite d’échanges culturels et économiques construite sur des vagues migratoires importantes initiées par les Italiens à la fin du 19e siècle, suivis des Corses et des Arméniens au début du 20e puis des populations africaines, en majorité issues du Maghreb, dans la seconde moitié du 20e. De nombreux Comoriens s’y sont aussi installés après l’indépendance du pays en 1975, faisant même de Marseille la plus grande ville comorienne devant la capitale, Moroni. Cet important brassage de cultures rend l’équation quasi indéchiffrable renforcée par la multitude de ses quartiers enchevêtrés.

Ceux du centre-ville, comme Belsunce, Noailles ou le Panier, ont accueilli les nombreux nouveaux-arrivants des dernières décennies, des quartiers restés populaires touchés aujourd’hui par la gentrification, voire la boboisation, à l’image des nombreux centres urbains des grandes villes européennes. A Marseille, la fracture sociale est spatiale. Les quartiers nord, ses grands ensembles, son insécurité et ses populations touchées par un chômage de masse dévisagent ceux du sud, plus riches et dynamiques. Protégé par Notre-Dame-de-la-Garde, qui le surplombe, le Vieux-Port, et son célèbre Quai des Belges où les bateaux de pêche livrent leurs prises avant qu’elles soient revendues sur le Quai, réunit tous les citoyens de cette diversité marseillaise.

STADE VÉLODROME

Devenu port de plaisance, le Vieux-Port est aussi le décor idéal pour s’attabler en terrasse autour d’un café ou d’un pastis. Il est aussi le point de départ des promenades en mer dans la rade, à la découverte des majestueuses calanques. Derrière l’hôtel de ville, qui longe le port, plongez à travers l’historique quartier du Panier qui rappelle sous de nombreux dehors, le sud de l’Italie, Naples, ses étroites ruelles, son incessante activité, le bruit qui s’y dégage, jusqu’au linge qui sèche aux fenêtres.

Au sud, après avoir emprunté la Corniche, posez-vous sur la plage du Prado, là où sera érigée pendant l’EURO la fan zone. Avec six rencontres au programme, Marseille est après Paris la ville qui accueillera le plus grand nombre de matches de ce Championnat d’Europe. Un  » fan walk  » est également mis sur pied pour parcourir les 2km entre la plage du Prado et le nouveau Stade Vélodrome. Difficile à apprivoiser pour beaucoup par sa complexité, son melting-pot de quartiers, la cité phocéenne tente de se ressourcer loin des images négatives entretenues par politiques et médias. Elle est plus que jamais vivante, voire bouillante.

PAR THOMAS BRICMONT – PHOTOS BELGAIMAGE

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