Les universitaires

 » La vraie réponse est un championnat européen « 

Luc Misson, le célèbre avocat du sport

 » Juridiquement, une D1 francophone ne poserait aucun problème pour autant que toutes les parties soient d’accord… mais il faut replacer cette question dans une perspective plus large : l’avenir du football belge. Pour le moment, le plus gros problème est le faible budget des clubs. J’étais un des membres du groupe Preud’homme et nous avions eu la même analyse. C’est Jean-François Bourg, économiste et chercheur au centre de droit et d’économie du sport de Limoges, qui a conclu qu’il y avait une corrélation entre les résultats et le budget d’un club de football. Stefan Kesenne, professeur à l’université d’Anvers, soutient d’ailleurs la même équation. Il y a ponctuellement des exceptions à cette équation mais sur une échelle de dix ans, le classement d’un club équivaut véritablement à son budget. Anderlecht a le 150e budget d’Europe. Il ne faut donc pas s’étonner de ses résultats sur la scène européenne. Evidemment, la concurrence entre les clubs européens est faussée par l’organisation de championnats nationaux. Le budget des clubs des petits pays est logiquement inférieur à celui des clubs des grandes nations. C’est dicté par les droits télé et les recettes du sponsoring. Il faut attaquer ce problème. De plus, la concurrence est encore plus faussée par le nombre de places en Ligue des Champions réservées aux clubs des grandes nations.

Notre foot progresse. Mais le foot étranger évolue beaucoup plus vite. De surcroît, les grands clubs placent des gens fortunés comme administrateurs : les grands clubs anglais attirent de richissimes Russes, la Juventus a récemment procédé à une augmentation de capital de 110 millions d’euros et souscrite en quelques jours. C’est plus que le budget annuel total des six plus grands clubs belges. Créer une D1 francophone isolera encore plus le foot belge.

La solution serait de reconnaître l’illégalité des championnats européens au nom de la libre circulation des entreprises. Il y aurait un grand et unique championnat européen avec plusieurs divisions. Les clubs belges évolueraient évidemment en D3 ou en D4 mais auraient la possibilité de remonter. Une telle solution est envisageable si l’on prend en considération le succès des coupes d’Europe. Il faut vraiment envisager un club de foot comme étant une entreprise qui produit un spectacle de sport. La libre circulation des entreprises est un droit fondamental dans l’Union européenne. Il faut aussi faire sauter le G-14. C’est une sorte d’entente prohibée entre entreprises. Il y a donc violation des articles 81 et 82 du Traité de Rome « .

 » En Slovaquie, les stades sont vides… « 

Michel Dewael, sociologue de l’ULB et spécialiste du discours médiatique

 » Un tel scénario va à l’encontre de toutes les tendances. A l’heure actuelle, ce sont les grandes compétitions, telles que la Ligue des Champions, qui triomphent. Economiquement, ce serait aussi absurde ! Le foot tchèque et le slovaque ont mis des années à s’en remettre. En Slovaquie, les stades sont vides. Ce serait catastrophique. Que dirons-nous aux supporter d’Anderlecht qui sont presque tous flamands. Même si la Belgique éclate, le championnat demeurera tel quel ! C’est une certitude ! L’Union Belge va très mal. Le foot belge est vraiment géré par des nuls. Il n’y a aucun projet pour l’avenir, même du côté flamand.

La solution est un grand championnat européen ou un championnat avec les Pays-Bas. Les droits TV seraient beaucoup plus importants. Une D1 francophone serait extrêmement faible ! De plus, ce n’est pas le championnat qui forge les identités nationales. Il divise plus qu’autre chose. Quand on est supporter carolo, on ne supporte pas le Standard et inversement. En foot, les identités municipales sont très importantes ! Si on choisissait une D1 francophone, il y aurait des conséquences absurdes. Que serait le sort d’un Limbourgeois évoluant au Standard ? De plus, il faut prendre en considération la spécificité de la Région de Bruxelles-Capitale. Elle est composée de 19 communes et les sentiments d’appartenance sont encore très forts. Il n’y pas cela dans une ville comme Paris. Anderlecht n’est pas Molenbeek. Créer une D1 francophone va exacerber les rivalités. Ça n’a aucun sens !

En Moldavie, la région de la Transnistrie a fait sécession. Mais le club de Tiraspol évolue toujours dans le championnat moldave. Et l’équipe nationale moldave joue toujours à Tiraspol ! « .

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