Les secrets du stade de Kiev

Le théâtre de la finale a une histoire riche, étonnante, compliquée et sulfureuse.

Apothéose de l’EURO dimanche à Kiev. Voici tout ce qui intrigue dans ce magnifique stade, prolongement de la principale artère commerciale et d’une fan zone de 60.000 m2.

-Pourquoi olympique ? Parce qu’il a accueilli des matches des jeux Olympiques de Moscou de 1980.

-Qui l’occupe ? Le Dynamo Kiev a un bail de cinq ans. Ce stade est aussi le lieu attitré de l’équipe nationale. A l’époque des JO moscovites, il pouvait accueillir 48.000 personnes. Sa capacité a ensuite été portée à 100.000 places. Aujourd’hui, c’est 70.000 avec un hôtel Sheraton flambant neuf de 13 étages qui se fond dans la façade principale, 12.500 m2 de vitrage et 42 fast foods.

-Quelles activités extra-football ? Shakira s’est produite lors de l’inauguration, avant un Ukraine-Allemagne amical. Soirée chahutée : le président Viktor Ianoukovytch a été hué, le toit d’une tribune a pris feu et trois femmes nues ont interrompu la fête pour réclamer  » Un EURO sans prostitution « . Le 25 juillet, les Red Hot Chili Peppers seront ici. Et le 4 août, ce sera Madonna, entre un concert au stade de Varsovie (où a eu lieu le match d’ouverture) et un autre à Moscou.

-Quelles légendes au centre de presse ? Les médias sont installés au Palais des Sports, à une centaine de mètres du stade. C’est l’antre d’une équipe pro de hockey sur glace, et de multiples artistes s’y sont donnés en concert (Lenny Kravitz et The Scorpions viendront dans quelques semaines) et le concours Eurovision s’est tenu ici en 2005.

-Combien ça a coûté ? L’EURO aura coûté 200 euros à chaque Ukrainien. Il était prévu que l’Etat sorte 1,7 milliard d’euros, c’est passé à plus de 7 milliards. Le chantier du stade de Kiev a finalement coûté 500 millions, beaucoup plus que prévu au départ.

-Qui s’en est mis plein les poches ? En Ukraine, on n’a pas peur de dire que les politiciens sont parmi les plus corrompus du monde. Le Kyiv Post explique les magouilles d’avant-EURO. Ioulia Tymochenko avait dit que la plus grande part des dépenses serait supportée par des investisseurs privés, ukrainiens et étrangers. Quand Ianoukovytch est arrivé au pouvoir, il a préféré que l’Etat assume : c’est plus facile de conclure des arrangements entre amis. Une loi supprimant les appels d’offre a été votée. Les contrats pour les plus gros travaux ont été confiés à des entreprises appartenant directement ou indirectement à des politiciens. Les factures ont été gonflées et les entrepreneurs ont ensuite redistribué des enveloppes au pouvoir. On estime que 30 à 40 % de la somme sortie par l’Etat s’est retrouvée dans les poches des politiciens. L’entrepreneur principal du stade était déjà visé par une enquête et avait fait de la préventive quand on lui a offert le dossier de rénovation. Début juin, il est repassé au tribunal dans un autre dossier et a imploré le juge :  » Ne me jetez pas en prison, je serai plus utile à l’extérieur.  »

PAR PIERRE DANVOYE, ENVOYÉ SPÉCIAL EN UKRAINE

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