© BELGAIMAGE

Les secrets du Canonnier

On a fouillé dans les coulisses pour décrypter les raisons du C4 logiquement remis à Fernando Da Cruz.

C’est le Covid qui a ramené le LOSC à Mouscron! Explications. En plein printemps pourri, le foot s’arrête dans le monde entier. En France, le championnat de National 2 est figé et aucun champion n’est désigné dans les quatre poules. Par contre, les clubs qui occupent une des trois dernières places de leur groupe sont rétrogradés en National 3. Dont Lille, quatorzième sur seize de sa série.

L’équipe B du LOSC va donc connaître l’enfer du National 3, soit le cinquième étage du foot français. Au lieu d’affronter, comme la saison passée, des adversaires du calibre de Bastia, Reims, Sedan ou Lens, les Lillois vont se farcir Maubeuge, Le Touquet, Marcq-en-Baroeul, Wasquehal…

Les joueurs de cette équipe B, entraînée par Fernando Da Cruz, ne peuvent pas se permettre une expérience pareille. Ça équivaudrait pour eux à perdre un an. Alors qu’ils sont censés se rapprocher encore un peu plus de l’équipe première.

« Cette descente a provoqué le rachat de Mouscron par Gérard Lopez« , nous explique un proche du club. « Si la deuxième équipe du LOSC s’était maintenue, il ne se serait jamais intéressé à l’Excel. Mais comme il tenait absolument à ce que ses meilleurs Espoirs jouent à un bon niveau, il a pensé à venir chez nous. Ce ne sont pas les dirigeants de l’Excel qui ont pensé à Lille ou qui ont fait les premières démarches. Alors, quand Lopez s’est manifesté, ils ont fait des bonds de joie. Parce que le club était à quelques jours d’un dépôt de bilan. Il n’y avait plus rien dans la caisse. »

Des tampons

Faire jouer les meilleurs jeunes Lillois à un bon niveau: elle est là, la première explication de cette série de trois points sur 27 et par conséquent du C4 remis la semaine dernière à Fernando Da Cruz. Une source interne fait la bonne analyse sportive: « Ils ont des qualités, c’est sûr. Techniquement, c’est bon. Mais ils sont complètement insuffisants dans l’impact physique. Il suffit de voir la plupart des buts qu’on a pris. Beaucoup sur des phases arrêtées où aucun de nos joueurs n’allait au duel. Parce que ces gars-là ont toujours survolé dans les catégories d’âge. Ça jouait bien au foot, mais ils n’avaient pas besoin de charbonner pour gagner leurs matches. C’était trop facile. Alors, quand tu te retrouves subitement contre des mecs qui ont une toute grosse expérience du championnat de Belgique, avec la puissance, la roublardise éventuellement, tu bois la tasse. Parce que tu découvres des trucs que tu ne connaissais pas, que tu ne soupçonnais même pas. Tu te retrouves en face de gars qui mettent des tampons. Il suffisait d’observer les deux équipes qui sont montées sur le terrain pour le match contre Eupen: d’un côté des gamins, de l’autre des hommes. Les deux transferts qui ont été faits le dernier jour du mercato allaient dans le bon sens. Xadas a joué une cinquantaine de matches de championnat du Portugal, Nuno Da Costa a fait un parcours en Ligue 1 et il arrive de la D2 anglaise, où on sait mettre des coups. Mais c’est insuffisant, l’équipe, dans son ensemble, est encore trop jeune, trop tendre, trop joueuse. Je résumerais en disant que c’est une équipe qui manque de post-formation. »

L’erreur du président et du directeur

Un autre témoin, externe au club, qui est en contact avec plusieurs employés et connaît tout de la vie au quotidien de l’Excel, en remet une couche.  » Patrick Declerck et Paul Allaerts étaient tellement heureux d’avoir trouvé un acheteur et de pouvoir garder leur poste qu’ils n’ont jamais pensé à imposer un quota de joueurs expérimentés. Les gens de Lille ont dit qu’ils allaient amener des bons jeunes et prendre toutes les décisions au niveau des compos: Declerck et Allaerts n’ont pas bronché. Une terrible erreur. On voit le résultat. Entre-temps, tout le monde a compris que le noyau était mal construit, que ça manquait de gars avec des planches. Alors, on est passé dans la phase de l’illusion. Pour calmer les gens. Ils disent qu’ils ont négocié avec Guillaume Gillet, c’est faux. Ils disent qu’ils ont vu Steven Defour, c’est faux, alors que je sais de source sûre qu’il était partant pour venir. Jelle Van Damme aussi, ça le tentait très fort. Et encore Christophe Lepoint. Il n’est pas heureux à Courtrai, sa femme est Mouscronnoise, il aurait bien aimé revenir. Mais le club n’en a pas voulu. Tous ces types-là ont pourtant les profils qu’il manque pour que ça se passe mieux. Tu as aussi un Clément Tainmont qui est sans club et qui aurait pu aider. Mais lui non plus n’a pas été contacté. Pour remplacer Fernando Da Cruz, tu as l’occasion de rapatrier Mbaye Leye, qui connaît le club, qui est respecté et qui était tenté. Mais non, tu vas chercher un Portugais inconnu qui a tout à découvrir du championnat de Belgique. »

Da Cruz n’était pas fait pour ça

Fernando Da Cruz a donc fait les frais de ces choix hasardeux, de cette politique faite de risques. Viré lundi dernier, il est venu prendre ses affaires et dire au revoir le lendemain. Il y a eu de l’émotion. « Pas de larmes, mais il n’en était pas loin », nous raconte un témoin de la scène. « Il voit ça comme un échec personnel. Depuis la défaite contre Eupen, il savait qu’il allait sauter. Mais tout le monde au club n’est pas persuadé qu’il était l’homme de la situation. C’est un formateur, pas un T1. Il est trop gentil pour ça. »

Place à Jorge Simão, dixième entraîneur du club depuis 2014, pour faire mieux. Un Portugais qui n’a fait ni une grande carrière de joueur ni un gros parcours d’entraîneur jusqu’ici. À découvrir. Il a très peu de temps devant lui. Mouscron n’avait jamais connu un début de championnat aussi dramatique en première division. Et va devoir ramer avec les moyens du bord jusque fin décembre. Le but: ne pas être largué à ce moment-là pour renforcer le groupe en janvier et transformer la deuxième collaboration avec Lille en autre chose qu’une grosse catastrophe.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire