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Les salaires disparus d’Alost

L’imbroglio financier qui couve à l’Eendracht Alost illustre le manque de structure et de professionnalisme qui sévit toujours au sein de l’élite féminine belge.

Mais que se passe-t-il à Alost, actuellement huitième de Super League? Il y a peu, nos confrères de vrouwenvoetbal.be faisaient état de manquements au niveau des payements des salaires fixes et frais dits variables (transport, primes au point), et ce depuis le début de la saison. Ainsi, des joueuses et des membres du staff n’auraient pas reçu l’entièreté de ce qu’ils auraient dû percevoir. Selon nos infos, seules quelques joueuses passant par des agents auraient tout reçu, contrairement à une majorité du vestiaire alostois.

Des affirmations que réfute en grande partie Patrick Le Juste, président de l’Eendracht Alost. « En termes de fixes mensuels, tout a été payé à tout le monde », affirme-t-il. « Après, s’il y a un doute sur d’autres frais, je me réserve le droit de vérifier. Tout ça avait été géré par l’ancienne direction de l’aile féminine, qui n’a pas voulu rendre les contrats au moment de son départ. Résultat, tout n’était pas très clair. Toujours est-il qu’on a déjà réglé la situation dans son ensemble pour une dizaine de joueuses sur la vingtaine que compte le noyau. En novembre, tout sera finalisé. Je rappelle qu’on parle ici de montants très bas, c’est beaucoup de bruit pour rien. » Aucun souci de trésorerie, donc, mais plus d’ordre administratif.

À terme, la Fédé veut attribuer les licences en fonction d’un nombre minimum de contrats pros et déclarés.

Il nous revient pourtant qu’à l’heure d’écrire ces lignes, le club de M. Le Juste n’aurait pas encore réglé l’intégralité de la note, notamment vis-à-vis de personnes qui ont quitté Alost, et dont l’une a vu sa convention cassée par une direction qui se veut discrète sur les raisons de cette éviction. « Elle n’avait pas de boulot, elle devait payer ses tests Covid car elle n’est pas vaccinée, son essence », nous indique un intervenant qui préfère ne pas être nommé. « Elle n’avait pas l’argent pour venir à Alost plusieurs fois par semaine. Elle a dit qu’elle ne pouvait plus venir, alors le club lui a dit de ne plus revenir du tout, car pour eux, c’était une sorte de grève. » Bref, un sacré bazar où il est difficile d’y voir très clair, et qui se déroule sur fond de changement à la tête de la section dames, de chiffres gonflés par certaines joueuses au moment de renégocier les conventions avec la nouvelle direction et de papiers disparus suite au départ de la précédente. Un souci de taille, car plusieurs footeuses ne seraient pas en possession de copie de ces « contrats » signés à l’époque. Difficile dans ces cas-là pour la Fédération d’intervenir, « car c’est parole contre parole », dit Katrien Jans, Manager du foot féminin à l’Union belge.

Une situation qui la « fout mal », car sans être un candidat au titre, l’Eendracht reste un membre de l’élite. En fait, elle est surtout symbolique d’un foot féminin en plein essor, mais qui cherche encore sa route vers un certain professionnalisme. « Selon moi, il faut se rapprocher de ce qui se fait chez les hommes, et ne plus payer les joueuses par entraînement, ce qui a encore lieu aujourd’hui chez nous », poursuit Patrick Le Juste. « J’ai voulu sortir de cette logique et augmenter les primes par point, car pour moi, on doit aller à l’entraînement dans l’optique de participer et gagner le match du week-end, et ainsi prendre des points. » Avec seulement six unités au compteur en onze journées, on imagine le manque à gagner pour les joueuses, qui se sont rapidement montrées réfractaires à ce changement de régime, précise l’homme fort alostois.

Du côté de la Fédé aussi, on plaide pour plus de contrôle, notamment via un système de licences renforcé (pour l’instant, seuls des critères basiques en termes d’infrastructures et d’autres exigences sportives type présence d’équipes de jeunes etc. sont demandés en vue de l’octroi du précieux sésame, mais rien d’ordre financier). « Dans l’idéal, on voudrait pouvoir les attribuer en fonction d’un nombre minimum de contrats pros et déclarés, sur lesquels on pourrait se baser pour régler ce genre de cas », espère Katrien Jans, qui ajoute qu’ainsi, les joueuses seraient mieux protégées.

Contacté, le syndicat United Athletes (ex-Sporta) indique pour sa part n’avoir reçu aucune info concrète de la part des joueuses, malgré une demande formulée il y a deux semaines. « Si elles ne bougent pas, dans dix ans, le foot féminin sera encore dans la même situation », regrette-t-on en interne. Tendre vers plus de structure, voilà au moins un point sur lequel tout le monde est d’accord…

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