Les raisons d’un DOUBLE ÉCHEC

De retour au Mambourg un an et demi après l’avoir quitté, David Pollet revient auréolé de deux titres de champion de Belgique mais il n’a que très rarement été titulaire.

Champion de Belgique 2014 avec Anderlecht, champion de Belgique 2015 avec Gand : si l’on s’en fie à son palmarès, les deux dernières saisons de David Pollet en Pro League semblent idylliques. Pourtant, si l’on analyse les statistiques plus en profondeur, on constate rapidement qu’il n’en est rien. 2 buts en 12 matches et seulement deux titularisations avec les Mauves suivis de 2 goals en 21 rencontres et sept présences dans le onze de base des Buffalos, le tableau s’assombrit. Alors que ses ex-coéquipiers carolos réalisaient une superbe saison qui allait les mener aux PO1, Pollet, lui, rongeait son frein sur le banc gantois.

Acte 1 : Anderlecht

Retour en 2013-2014. Après six bons premiers mois à Charleroi où il est arrivé en provenance du RC Lens, David Pollet pète la forme lors du premier tour. Les Zèbres pointent à la dixième place et l’attaquant belgo-français, bien aidé par le duo Onur KayaDanijel Milicevic a déjà inscrit la bagatelle de onze buts. Alors que ses deux compères quittent le navire pour Lokeren et Gand, Pollet semble parti pour rester jusqu’en toute fin de mercato où une offre anderlechtoise tombe sur la table carolo.

 » C’était impossible à refuser « , explique Pollet.  » Tout le monde était gagnant à l’époque : j’arrivais dans le plus grand club de Belgique avec un beau contrat et Charleroi touchait une belle somme pour mon transfert « . De fait les Mauves ne déboursent pas moins de 2 millions et demi d’euros pour s’adjuger ses services. Si le seul transfert entrant du mercato bruxellois arrive si tard, ce n’est pas un hasard. Après avoir vainement tenté d’attirer Thorgan Hazard et Michy Batshuayi, Anderlecht se rabat sur Pollet en dernier recours.

 » C’est vrai que je n’étais peut-être pas le premier choix « , reconnaît-il.  » Mais c’est comme ça que ça fonctionne partout lors de chaque mercato. Un club cible ses recrues potentielles et si le plan A n’est possible, il passe au B et ainsi de suite « .

Lui-même ancien de la maison mauve et des Buffalos, Marc Degryse n’est pas vraiment de cet avis :  » Anderlecht a payé bien trop cher pour ce joueur. C’était un achat-panique. Pas le genre de profil dont ils avaient besoin « . Quelque temps plus tard, Herman Van Holsbeeck, le manager du RSCA, s’attribuera, dans une interview à La Libre Belgique, une note de zéro sur dix en ce qui concerne ce mercato.  » Il voulait souligner le fait que le club avait raté certains dossiers, je n’étais pas visé « , précise Pollet.  » Il m’a appelé pour s’expliquer dès que l’interview est parue. C’était une erreur de communication « .

Les débuts en mauve de l’ex-Zèbre sont en effet excellents : le Sporting est mené 2-0 sur le terrain de Courtrai quand il remplace Aleksandar Mitrovic à la 65e. 25 minutes plus tard, Pollet a délivré une passe décisive pour Gohi Bi Cyriac et a égalisé dans les arrêts de jeu pour arracher le point du nul. Malgré cela, il retrouve le banc dès la semaine suivante et doit se contenter d’entrées au jeu en fin de partie jusqu’au licenciement de John Van den Brom début mars.

Si la nomination de Besnik Hasi, qui le titularise lors de ses deux premiers matches, semble dans un premier temps une bonne nouvelle, le vent va rapidement tourner.  » J’ai débuté contre Ostende puis lors de la défaite contre le Standard pour l’ouverture des PO1. Le coach nous a alors écartés, Sacha Kljestan et moi, et l’équipe s’est mise à tourner. Par la suite, je n’ai plus joué que quelques bouts de matches. Cela dit, je n’avais pas n’importe qui comme concurrent : c’était Mitrovic !

C’est normal dans un club comme Anderlecht. Je ne considère pas ça comme un échec mais ça a été compliqué. J’avais un rôle de joker mais j’ai malgré tout pris du plaisir et on a été champion. C’est un titre qui compte pour moi puisque je sortais de six très bons mois à Charleroi et d’un bilan qu’on va qualifier de  » moyen  » à Anderlecht « .

Degryse ne s’étonne pas du faible temps de jeu de Pollet qu’il considère comme une erreur de casting pour les Mauves :  » Il y a une différence entre la manière de jouer d’un club comme Charleroi et Anderlecht. Les Carolos misaient beaucoup sur les contre-attaques, ce qui convient bien au jeu en profondeur de Pollet. Il était important pour l’équipe, était en confiance et donc efficace. A Anderlecht, il y a plus de concurrence, l’équipe est plus dominatrice et les espaces plus rares. C’était donc beaucoup plus compliqué pour lui et il a perdu la confiance « .

Acte 2 : Gand

Malgré la perspective de disputer la Ligue des Champions, David Pollet ne s’éternise pas au Parc Astrid et rejoint Gand à l’intersaison. Rien d’étonnant quand on sait qu’il avait marqué à trois reprises contre Courtrai, alors entraîné par Hein Vanhaezebrouck, le nouveau coach des Buffalos.  » Je ne voulais pas absolument partir « , explique Pollet.  » Le coach et Michel Louwagie m’ont appelé pour me convaincre et j’ai été séduit par le projet de Gand. Un contrat de quatre ans dans le club qui a le plus beau stade de Belgique, c’était tentant. D’autant qu’Anderlecht ne me retenait pas « .

Pourtant, la lune de miel entre le joueur et son nouvel employeur ne dure pas bien longtemps. Après une première titularisation, il retrouve le banc au profit de Laurent Depoitre qui enchaîne rapidement les buts.  » Mon adaptation a été compliquée. Avec ma compagne, on ne se plaisait pas à Gand et j’avais du mal avec le côté néerlandophone. En septembre, après deux défaites, le coach m’a aligné à côté de Depoitre pendant quelques matches mais ça n’a pas duré. J’ai rapidement compris qu’il ne comptait plus sur moi. J’étais présent aux entraînements mais je ne servais pas à grand-chose, je savais que je serais sur le banc. Ma relation avec Vanhaezebrouck n’était pas optimale. Il ne m’a jamais expliqué ses choix. On se disait bonjour et pas plus « .

 » Comme à Anderlecht, je pense qu’il n’avait pas le bon profil « , estime Degryse.  » Bien sûr Gand n’était pas aussi dominant en début de saison qu’il ne l’a été par la suite mais si l’objectif de Vanhaezebrouck était de développer son jeu court comme Gand l’a fait en play-offs, alors Pollet n’était pas la solution. L’éclosion de Depoitre n’a pas arrangé ses affaires. Ils étaient deux pour une place et Laurent tournait à plein régime « .

 » C’est vrai que je suis plus efficace dans un 4-3-3 avec des ailiers pour me donner des centres et surtout des espaces pour prendre la profondeur « , admet Pollet.  » Je devais progresser dans mon rôle en conservation de balle et je n’ai pas su m’adapter au système du coach. J’étais dans une situation compliquée mais l’avantage c’est que je n’étais pas le seul. Gand avait un gros noyau et l’entraîneur s’appuyait en permanence sur les 13-14 mêmes joueurs. On était donc beaucoup dans le même cas que moi, ça aide pour bosser à l’entraînement au quotidien « .

Malgré son faible temps de jeu à la Ghelamco Arena, l’attaquant essaye de ne retenir que le positif :  » J’ai tout de même été champion une deuxième fois d’affilée et puis on apprend beaucoup dans la difficulté, je me suis forgé un caractère.  »

Acte 3 : Charleroi

Après deux saisons mitigées à Anderlecht et Gand, la conclusion de beaucoup pourrait être sans appel : Pollet serait trop court pour le top belge.  » Aujourd’hui, je ne peux pas dire le contraire, c’est une réalité. Mais bon, le foot est tellement aléatoire. Le facteur chance joue énormément. Je pourrais refaire les mêmes choix et ça se passerait de manière totalement différente « .

 » Il doit maintenant retrouver son niveau chez les Zèbres mais c’est clair que je l’imagine mal recevoir une troisième chance dans un grand club « , estime Degryse.  » J’ai bien peur que la plupart des clubs n’estiment que Charleroi est son plafond « .

 » J’ai forcément des regrets puisque ça n’a pas fonctionné « , admet Pollet.  » Mais aujourd’hui, je me suis fixé un nouveau challenge : rebondir à Charleroi. J’ai les crocs, j’ai faim de football. Après, je sais qu’il ne faut pas brûler les étapes, j’ai très peu joué pendant un an et demi, donc il ne faut pas que je place la barre trop haut. Il faut avant tout retrouver du rythme, du plaisir et puis ça reviendra tout seul « .

S’il aurait pu rejoindre d’autres cercles de D1 voire même partir à l’étranger, le choix de Charleroi était une évidence pour lui.  » Je n’ai jamais vraiment rompu les liens avec le club. Déjà quand j’ai quitté Anderlecht, il y avait eu des contacts. J’ai besoin d’un environnement familier pour me refaire une santé. Je l’ai directement dit à Mogi Bayat, mon manager : ‘A partir du moment où mon avenir n’est plus à Gand avec Vanhaezebrouck, je veux revenir à Charleroi’. Je connais la maison et Felice Mazzu me connaît par coeur, c’est idéal. Après, j’ai lu beaucoup de bêtises dans les journaux. On a dit que j’avais divisé mon salaire par deux. C’est vrai que j’ai fait un effort financier, parce que Charleroi ne peut pas s’aligner sur les chiffres de Gand, mais pas à ce point-là.  »

Sous contrat pour trois ans plus une saison en option, Pollet aimerait s’inscrire dans la longueur au Mambourg même s’il a bien conscience que la saison de la confirmation sera compliquée :  » Déjà à Gand, j’avais signé pour quatre ans et je cherchais la stabilité. Ça n’a pas marché mais maintenant il est clair que j’ai envie de me fixer à Charleroi dans la durée. On sait tous que ça va être très compliqué de rééditer les performances de la saison dernière mais j’y crois. Charleroi a fait un pas en avant et on va être attendu de pied ferme. Il est possible que certaines équipes fassent bloc devant leurs cages et ce sera à nous d’adapter notre dispositif mais je pense que notre staff est assez intelligent pour trouver la parade « .

S’il est confiant, Pollet ne se risque néanmoins pas à se fixer un objectif buts :  » C’est toujours compliqué. Il va d’abord falloir que je m’impose dans ce groupe qui tourne bien. Le club a fait un effort pour que je revienne, c’est à moi de le lui rendre sur le terrain en étant aussi bon que possible. Après si l’équipe tourne et que la réussite est là, les buts suivront « .

PAR JULES MONNIER – PHOTOS : BELGAIMAGE

 » David Pollet à Anderlecht, c’était un achat-panique. Pas le profil dont les Mauves avaient besoin.  » Marc Degryse

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