Les masques des Loups

Le président louviérois Filippo Gaone a inversé la tendance italienne qui veut qu’on mette son équipe B en Coupe. Samedi dernier, en championnat, La Louvière a aligné une équipe de 21 ans de moyenne d’âge pour affronter les leaders. Ce mercredi, ce seront les meilleurs Loups qui vont bouffer le gazon pour se qualifier en Coupe.

Le coach Albert Cartier prétend que c’est lui qui a voulu mettre cette équipe sur le terrain pour préparer l’avenir parce que ça se justifiait dans son plan de saison. Difficile à croire. La semaine dernière, on se demandait ici même comment La Louvière allait arbitrer le débat de tête en évitant les allusions malveillantes après l’épisode du ballon crevé à Anderlecht…. Aligner ses jeunes, il fallait y penser. On mettait ses pros à l’abri de tout soupçon en cas de défaite et les trois points allaient quand même au Club Bruges.

D’un côté, c’était sympa de voir courir ces jeunes promesses au Tivoli mais d’un autre, les explications sportives semblent très oiseuses. La Louvière a voulu couillonner les champions en titre et y est parvenu. Mais doit-on jubiler en jouant au Robin des Bois du Centre ? C’est très amateur comme revanche, non ? Cela dit, que les Loups en veuillent à mort à l’Union Belge, on le comprend aisément. Outre le problème du ballon explosé, il y avait celui de la double rencontre avec les leaders en quatre jours. Mais en montant une telle mascarade, on ne pouvait que prêter le flanc à la critique. On aurait dû être plus grand.

Surprenante La Louvière qui avait débuté la saison à toute vapeur et dont la qualité de jeu est retombée comme un soufflé. Reste la Coupe de Belgique où les Loups conservent néanmoins une belle carte à jouer malgré le départ de tant de titulaires du premier tour. Le noyau s’est rétréci et des plages de repos sont bienvenues… Alors, finalement, Gaone et Cartier ne font-ils pas d’une pierre deux coups ? Couillonner Anderlecht et préparer la Coupe ? Au nom de la conséquence ne faudrait-il donc pas, en cas de qualification, exiger du club de jouer tous ses matches de championnat programmés avant la Coupe avec son équipe B ? Libre à La Louvière de le faire. Elle ne gagnerait pas le prix du fair-play comme ça mais pourrait toujours dire que la Coupe justifie les moyens.

La Louvière est devenue un club dirigé de manière cynique et césaro papiste (repêchant ici un substantif entendu dimanche dernier dans un débat sur l’importance de Jean Paul II dans l’histoire). Comme César, Gaone décide tout lui-même. Les conseillers et les tendances ont une courte espérance de vie. Gaone a bâti un empire dans le secteur textile, c’est-à-dire en vendant cher grâce à la mode un produit qu’il achète au plus bas possible. Son instinct et son intelligence sont remarquables mais il fonctionne au coup par coup, prenant des risques et retombant toujours sur ses pattes.

Il cherche des fabricants bon marché jusqu’en Chine. En football, son talent est de faire confiance à de bons pros dans leur secteur. Mais Gaone a vite appris en D1 à n’être dépendant de personne. Le monde est plein de bons entraîneurs et de bons managers. Il suffit de les trouver, un registre où il excelle. Dans son business comme en foot, il y a des saisons différentes et leurs exigences. A La Louvière, c’est d’abord de rester en D1. Mais plus à n’importe quel prix. Quand Gaone a eu l’occasion de se refaire cet hiver, il ne s’est pas gêné. Il a déjà tellement contribué personnellement au succès du club qu’on ne peut lui en vouloir de récupérer û une partie au moins û de ses largesses.

On connaît l’équation du  » président donneur  » : fortune faite, il recherche la gloire… jusqu’au moment où il réalise que son jouet est un peu chérot. C’est ce qui arrive légitimement. Même si ça fait râler un Cartier qui attend û en plus û toujours du concret pour la saison prochaine. Mais mettez-vous à la place de Gaone. Après le match de samedi, il a sûrement pensé qu’il verrait bien jouer cette équipe l’an prochain en D1 avec Frédéric Tilmant comme coach….

Depuis que l’avocat du club, Me Laurent Denis a l’oreille du président, ce dernier s’est fait discret auprès des medias. Comme on a tous des défauts, le sien est son incompétence à communiquer calmement ôtant à son discours tout sens sportif. Pour éviter les dérapages verbaux, Denis lui a conseillé de ne pas parler ou si peu, faisant lui-même office d’intermédiaire. Ce qui ne gêne pas l’avocat, car il ne fait pas tache auprès de confrères parfois plus assoiffés de reconnaissance médiatique les uns que les autres.

Le problème pour la presse reste entier : avoir un interlocuteur valable à la tête de La Louvière.

John Baete

Le problème pour la presse reste entier : avoir UN INTERLOCUTEUR VALABLE à la tête de La Louvière

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire