Les grands joueurs améliorent la compétence des grands entraîneurs

Le temps des cerises est déjà révolu alors que la saison vient à peine de commencer dans le verger du football : nombre de coaches sont à court de fruits pour leurs confitures. Frankie Vercauteren, le T1 intérimaire des Diables Rouges, a failli être mis en pot par les huiles de l’Union belge qui ont songé à introniser subi presto le tsar Dick Advocaat, emporté par la révolution d’août à Saint-Pétersbourg.  » Je ne suis pas une marionnette « , a fredonné l’ancien Prince du Parc. Celle de Christophe qu’on construit avec de la ficelle et du papier ? Bruxelles ne bruxellait pas au retour de Tchéquie avec une défaite amicale dans les valises (3-1) ainsi qu’un président qui retourna sa veste et confirma Vercauteren dans ses fonctions avant la Joyeuse Entrée d’Advocaat en janvier prochain.

Le Hollandais changera vite de couplet au Festival du Rire de l’Atomium en songeant au patron et à sa chère fédé :  » Il pensait pas, elle pensait rien. Et on voudrait que je sois malin.  » Vercauteren ne doit pas s’énerver et noter les gags des penseurs de l’Union belge. Cela lui permettra d’écrire un jour ses Mémoires comme Gilbert Van Binst vient de le faire avec succès. Son livre, publié en néerlandais (Circus Voetbal, Roularta Books) regorge d’anecdotes d’un autre âge. Même le solide Jean Thissen fut victime des pitreries de ce grand arrière droit.

Lui et ses potes dominaient l’Europe du haut de leur jeunesse. Aujourd’hui âgé de 58 ans, Gille fut le premier capitaine d’une équipe belge qui couvrit de baisers un trophée européen. C’était en 1976 et Anderlecht venait d’étriller West Ham (4-2) en finale de la Coupe des Coupes au Heysel. Avant cet événement, il fut approché par deux bookmakers londoniens qui lui promirent 25.000 euros en cas de succès des Rosbifs. Les Anglais avaient 30 ans d’avance sur les Chinois. La réponse tomba sur le terrain : – Nuts.

Van Binst avait le niveau, le disait et, surtout, le prouvait. Il narre quelques distractions de Raymond Goethals qui rentra un jour chez lui, s’installa dans le salon, déplia son journal avant que la fée du logis ne hurle sa surprise. Raymond-la-science s’était trompé d’étage. Cela peut faire sourire en 2009 alors que News of the World, le tabloïd anglais, place des joueurs, des dirigeants et des managers sous écoute pour révéler ensuite aventures extraconjugales, consommations de drogues, etc. Et quand une star refuse un entretien, elle peut se faire piéger avec une call-girl moscovite. En échange des photos compromettantes, la vedette accorde vite un entretien au démon de la presse anglaise, vendu chaque semaine à cinq millions d’exemplaires. Sir Alex Ferguson, l’âme de Manchester United, en a marre  » de ces médias qui agissent de façon perverse avec le succès. Ils cherchent les erreurs de jeunes sportifs au lieu de les choyer.  » Là, on peut comprendre qu’il préférerait les gags de Van Binst mais quand notre fédéose indiquer les journalistes du doigt pour expliquer sa compote tchèque, c’est de l’indécence. La presse a au contraire bien bossé en posant les questions les plus indiquées.

L’Union belge ne semble plus qu’attendre l’apparition de Saint-Dick. Advocaat est déjà son icône mais, comme l’affirme Denis Chaumier de France-Football :  » Les grands joueurs améliorent la compétence des grands entraîneurs. Zinédine Zidane a autant apporté à Aimé Jacquet que l’inverse. Un entraîneur peut avoir la prétention d’inventer le foot, il sera toujours battu par un MichelPlatini, un Zidane ou un Yoann Gourcuff.  » A son apogée, Goethals coachait des PaulVan Himst, RaoulLambert, Wilfried Van Moer, Robbie Rensenbrink, Arie Haan, Eric Gerets ou SimonTahamata en équipe nationale, à Anderlecht ou au Standard. Advocaat, Ariel Jacobs, Michel Preud’homme ou Laszlo Bölöni ne peuvent pas en dire autant. Ces orfèvres ont cependant dû apprécier les dribbles en or, les buts 24 carats ou les brillants jaillissements de Matias Suarez, Milan Jovanovic ou Zlatan Ljubijankic, héros de la troisième journée de championnat. Le grand Gille d’Anderlecht se sera peut-être souvenu du bon vieux temps en les admirant.

PAR PIERRE BILIC

Le président ne pensait pas, la fédé pensait rien et on voudrait qu’Advocaat soit malin.

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