Les étoiles de Sotchi

Qui faudra-t-il suivre de près en Russie ? Passage en revue de cinq stars internationales, aux noms (et surnoms) connus.

The Flying Tomato/Animal

Shaun White (27 ans) a eu une vie bizarre. Après deux opérations au coeur, le Future Boy s’est lancé dans le snowboard à l’âge de treize ans et est devenu un nom, grâce aux conseils de la légende de cette discipline, Tony Hawk. The Flying Tomato, un petit ado roux, a enlevé la médaille d’or à Turin en 2006 en half pipe. Il déteste son surnom.  » Je préfère qu’on m’appelle Animal, comme le batteur des Muppets « , a-t-il précisé avant d’ôter son bandeau frontal.

Argent et célébrité ont leur revers. White n’est pas sympathique. Le millionnaire roule en Lamborghini dans le parc, il est égoïste : avant les Jeux 2010, il a interdit à ses collègues de s’entraîneur sur l’half pipe que Red Bull lui avait aménagé. En outre, il est un sorteur invétéré. Après son deuxième titre olympique, il a été arrêté en état d’ébriété.

L’Américain semble avoir changé. Cheveux courts, il est devenu courtois. Il est CEO des Shaun White Enterprises, la société qui gère sa ligne de vêtements (Target), ses contrats de sponsoring (Burton, Oakley, GoPro), son orchestre (Bad Things), qui est sous contrat chez Warner Bros, et la vente de… sa personne. Le roi de l’half pipe compte bien se distinguer également en slope, malgré une grave blessure à la cheville.  » J’aime les défis.  »

Ted Shred

Ted Ligety (29 ans), le crazy kid de Park City, non loin de Salt Lake, skie depuis l’âge de deux ans. Il a grandi dans les montagnes, à skis. A dix ans, il était sous le charme de Tommy Moe, le premier Américain à enlever deux médailles, l’or et l’argent, aux Jeux de Lillehammer, en 1994. Il a fait ses classes à la Winter Sports School jusqu’en 2002. Quatre ans plus tard, à Turin, il est devenu le porte-drapeau de cette usine à talents, s’adjugeant l’or en combiné (descente et slalom). Il a collé un morceau de tape avec le nom de ses sponsors principaux sur son casque : Mom + Dad.

Ted Shred, l’homme qui vit de la force de gravité, exploite commercialement son surnom. Lunettes de ski et de soleil, bonnets, casques, Shred Optics vend de tout. La boîte emploie treize personnes et Ligety, qui supervise le design, visite 300 magasins, pendant l’été.

Il sait pertinemment que son chiffre d’affaires dépend de ses succès sportifs. Il a dominé le slalom géant du Mondial de Garmisch (2011), ce qui lui a valu le surnom de Mister G(iant)S(lalom). Il est entré dans l’histoire en 2013 en enlevant le titre mondial en Super-G, en slalom géant et en combiné. Il veut égaler cette performance à Sotchi.  » Je déteste perdre encore plus que je n’aime gagner car j’ai trop souvent été battu pendant mon adolescence.  »

The Iron Lady

Marit Bjoergen (33 ans) est la fille de paysans de Rognes, un hameau de 200 âmes. L’usine de chaussures a fermé ses portes et, depuis, les habitants vivent du produit de leur terre et de la pêche dans la Gaula. En hiver, le mercure descend allègrement en dessous de -10°, de sorte que le ski de fond est le seul moyen de locomotion sur les chemins verglacés et enneigés.

En 1999, elle effectue ses débuts en Coupe du Monde et on la dit déjà douée mais sa progression connaît un coup d’arrêt. Ce n’est que trois ans plus tard, aux Jeux de Salt Lake City, qu’elle gagne une médaille d’argent en relais. En 2003, elle s’adjuge l’or au Mondial en sprint (1,5 kilomètre), sa discipline favorite.

La Norvégienne développe sa puissance, son volume, à force d’entraînement. Elle domine le Mondial d’Oberstdorf (2005), emportant trois médailles d’or, une d’argent et une de bronze. Courtes ou longues distances, style classique ou libre, qu’importe : The Iron Lady est invincible. 64 kilos pour 1m68, des veines qui se détachent sur ses muscles puissants. Elle domine son sport : elle compte douze sacres mondiaux et Vancouver (2010) a constitué l’apothéose de sa carrière avec trois médailles d’or, deux d’argent et une de bronze. Son asthme est sous contrôle mais le moteur commence à donner des signes de faiblesse. Pourtant, à Sotchi, elle va prendre part à six épreuves. Y jettera-t-elle ses derniers feux ?  » J’arrêterai quand j’aurai perdu ma motivation.  »

Alexander the Gr8/Ovi

Alex Ovechkin (28 ans) a des gènes sportifs : son père, Mikhail, a été footballeur professionnel et sa mère, Tatyana Ovechkina, double championne olympique de basket à Montréal et à Moscou. A huit ans, il a rejoint l’école de hockey. Il est devenu fanatique, à moins qu’il ne l’ait déjà été à l’âge de deux ans : dans un magasin de jouets, il s’était cramponné à un stick de hockey, refusant obstinément de le lâcher.

Il effectue ses grands débuts à seize ans au Dinamo Moscou, le club de son héros ultime, Aleksandr Maltsev – médaille d’or olympique en 1972 et en 1976- qui l’a invité pour un match entre camarades soviétiques. Il impressionne tout le monde. En 2002, pendant les championnats du monde U18, il se révèle à la face du monde. Goran Stubb, le scout en charge de l’Europe pour la National Hockey League, déclare :  » C’est un des joueurs les plus excitants du moment. Un buteur-né. Il danse sur la glace. Du matériel NHL, sans le moindre doute.  »

Le numéro 8 des Washington Capitals a rejoint le NHL All-Star Team en 2005-2006. Timide en dehors du terrain, il se mue en bloc de granit russe (1m91, 100 kilos) sur la glace. Alexander The GR8 entame sa conquête. Élu MVP à trois reprises, il est double champion du monde et il signe un contrat de treize saisons, à raison de 7 millions d’euros par an. Il s’affiche avec Maria Kirilenko, qui figure dans le top vingt du tennis mais il précise :  » Le hockey reste ma vie, mon oxygène.  »

Schlieri

Gregor Schlierenzauer (24 ans), un écolier d’Innsbruck, passe des heures collé au petit écran, suivant les exploits de son oncle, MarkusProck, quintuple champion du monde en luge et médaille d’argent à Albertville (1992) puis à Lillehammer (1994). Markus met un terme à sa carrière avec une médaille de bronze à Salt Lake City et obtient un contrat à son neveu, âgé de douze ans, chez Fisher et Red Bull. Il est sourd d’une oreille mais cela ne le handicape pas.  » Cette surdité partielle a augmenté ma vitesse de réaction. J’ai évidemment la chance qu’elle n’ait pas affecté mon sens de l’équilibre.  »

A douze ans, il rejoint le Skigymnasium Stams, dans le Tyrol. Quatre ans plus tard, il est champion du monde junior.  » Il est né pour voler « , s’exclame le sélectionneur Alexander Pointner. Il enlève cinq titres mondiaux avec l’Autriche, la médaille d’argent individuelle au Mondial 2009 et l’or en 2011. Il y ajoute l’or par équipes et la médaille de bronze individuelle sur petit et grand tremplin à Vancouver.

Il est entré dans l’histoire de son sport en février 2013 en améliorant le nombre de victoires en Coupe du Monde (46) de Matti Nykänen. À Sotchi, Schlieri compte bien combler la seule lacune de son palmarès en remportant la médaille d’or individuelle.  » Quand j’entame une compétition, je ne pense jamais à ce qui me fait encore défaut. Je garde les pieds sur terre. Enfin, façon de parler car si je restais au sol, je ne gagnerais rien.  »

PAR CHRIS TETAERT – PHOTOS: IMAGEGLOBE

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