Les CHANGEMENTS

Pierre Danvoye
Pierre Danvoye Pierre Danvoye est journaliste pour Sport/Foot Magazine.

Le point sur l’avant/après Brio/Daerden.

L’ombre de Sergio Brio n’a pas fini de planer sur Mons. Le dossier de son indemnité de licenciement n’est pas près d’être refermé. Il y a une telle différence entre ce qu’il réclame et ce que le club lui propose que l’affaire se réglera plus que probablement devant un tribunal. Les parties concernées ne veulent pas divulguer de chiffres, mais il n’est évidemment pas question de cacahuètes dans cette histoire. Le calcul de Brio tient compte non seulement du terme de son contrat (juin 2006) mais aussi de l’option de prolongation. Au club, on ne veut évidemment pas entendre parler de cette option, qui n’aurait été levée que si la collaboration s’était bien passée.

Sur le terrain, les joueurs semblaient avoir oublié, à Genk, les grands principes de leur ancien entraîneur. On avait revu des Dragons libérés, entreprenants, offensifs, dangereux. Un progrès stoppé net, samedi dernier. Face à Lokeren, on a retrouvé une équipe stressée, paralysée, à court d’idées. L’effet Jos Daerden a-t-il déjà vécu ?  » Nous avons tout essayé… avec nos moyens « , lâcha le Limbourgeois après la rencontre. Un résumé qui peut vouloir dire beaucoup de choses. Ce noyau est-il trop court pour la D1 ? Les prochaines semaines nous l’apprendront.

Si on a eu l’impression de revoir, face aux poulains de Franky Van der Elst, le Mons amorphe de l’ère Brio, il est quand même évident que pas mal de choses ont changé.

Le jeu

En début de saison, Brio n’a plus systématiquement bétonné mais Mons a continué à jouer bas. Trop bas pour marquer les buts garants d’un championnat tranquille.  » Mons jouait tous ses matches en 4-4-2 mais alignait chaque fois deux médians défensifs « , détaille Dieudonné Londo.  » Dès que nous étions menés, notre football se résumait à de longs ballons vers l’avant pour essayer de recoller au score le plus vite possible. Il n’y avait plus aucune construction. Brio nous obligeait aussi à tenir compte des caractéristiques de l’adversaire en permanence. Tout notre jeu était axé sur celui de l’équipe d’en face. En perte ou en possession de ballon « .

A Genk, Mons a souvent essayé d’être dangereux et y est plus d’une fois parvenu. Contre Lokeren aussi, la bonne volonté et l’envie de jouer vers l’avant étaient présentes, mais le gardien waeslandien passa une soirée tranquille. Certains joueurs semblent vraiment trop justes pour aider le club à sauver sa peau. Trois des cinq défenseurs alignés samedi ne sont sans doute pas à leur place en D1 : erreurs grossières de placement, incroyables fautes techniques, glissades inexpliquées, manque flagrant de jugeote, tackles tardifs et parfois très dangereux, frappes dévissées, etc. En affirmant dès maintenant qu’ils sont prêts à consentir un nouvel effort durant le mercato d’hiver, les dirigeants reconnaissent que le noyau est trop court, que le recrutement estival a été bâclé.  » Le grand point positif, c’est que nous cherchons aujourd’hui, en permanence, à jouer au football « , avance Londo.  » Quand l’adversaire a le ballon, nous devons tenir compte de ses caractéristiques. Chacun doit occuper sa zone et a des consignes précises. Par contre, dès que nous sommes en possession de balle, nous pouvons nous libérer, oser, agir à l’intuition. La disposition de notre entrejeu a aussi changé : nous jouons désormais avec un récupérateur et un vrai médian créateur devant lui. Même à 0-1, contre Lokeren, nous n’avons pas fait n’importe quoi. Nous avons souvent gardé la balle et essayé de construire des actions « .

Le travail au quotidien

 » Avec Brio, si l’entraînement était prévu de 10 à 12 heures, nous savions que ça ne se terminerait pas une minute plus tôt et nous regardions régulièrement notre montre en attendant la fin « , dit KrisVan de Putte.  » La durée primait. Et parfois, nous ne voyions pas vraiment où il voulait en venir. Certains exercices nous semblaient parfaitement inutiles « .

Londo en avait aussi soupé, des méthodes de l’Italien.  » Toutes ces heures passées pour rien au complexe d’entraînement, c’était incompréhensible. Et venir au stade à midi pour le match de 20 heures, c’était très lourd et pas du tout approprié. Quand nous montions sur le terrain pour l’échauffement, nous étions déjà épuisés mentalement alors que nos adversaires étaient parfaitement frais dans leur tête. Nous rentrions dans notre match beaucoup trop tôt dans la journée. Dès que nous arrivions au rendez-vous, nous n’avions plus que cela à l’esprit, et ce n’est pas tenable sur autant d’heures « .

 » L’entraînement est redevenu un plaisir au lieu d’être une corvée « , avoue Van de Putte.  » Faire la route en se disant qu’on va s’amuser et pas se faire enguirlander à tout bout de champ, c’est autre chose. La méthodologie est aussi très différente. Aujourd’hui, c’est la qualité qui compte. Nous faisons le travail prévu au départ et les horaires sont assez souples « .

 » Presque tout se fait désormais avec ballon, même le travail physique « , signale Londo.  » Ça aussi, c’est un gros changement. Maintenant, dès que l’entraînement est terminé, nous reprenons notre voiture et nous rentrons à la maison. Comme cela se fait dans tous les clubs belges. Et, le jour du match, nous nous retrouvons à 16 heures. Quatre heures, c’est largement suffisant pour le processus de concentration « .

La relation coach/ groupe

 » Avec Brio, nous ressentions en permanence une pression très désagréable « , dit Van de Putte.  » D’accord, un joueur de D1 doit être capable de gérer la pression, mais il y a des limites. Chaque joueur savait qu’il risquait de sauter de l’équipe à la première erreur. Je suis bien placé pour en parler : dès que j’ai connu un petit passage à vide, le club a transféré un nouveau gardien, à la demande de Brio « .

Londo est sur la même longueur d’onde :  » Nous avions tous une épée de Damoclès au-dessus de la tête et c’était usant. Et Brio était particulièrement fermé. Dialoguer avec lui, ce n’était pas évident « .

 » Je sais aujourd’hui que j’ai la confiance de l’entraîneur, qu’il ne m’enlèvera pas de l’équipe si je me plante dans un match « , poursuit Van de Putte.  » On aborde son métier d’une façon très différente quand il n’y a plus cette menace constante. L’autre grand changement concerne la manière d’envisager la discipline. Jos Daerden nous traite en adultes : chaque joueur est son propre patron. Il n’y a plus un chef qui décide tout à notre place « .

Londo :  » Daerden parle et ne s’excite pas. Pour nous, c’est nouveau !  »

La communication

 » Je n’ai jamais réussi à bien cerner le personnage Brio « , explique Julie Curatolo, l’attachée de presse du club.  » En fait, il y avait deux personnages, tout à fait différents. Le Sergio Brio que je côtoyais en semaine était calme, détendu, charmant. A l’écoute, aussi. Si je lui faisais une remarque concernant le comportement qu’il avait eu après le match vis-à-vis de l’un ou l’autre journaliste, il l’acceptait et promettait de faire attention le week-end suivant. Mais, dès qu’il se retrouvait à nouveau dans le feu de l’action, il oubliait toutes ses bonnes résolutions. Le jour du match, ce n’était plus le même. Il était angoissé, stressé, comme s’il marchait sur des charbons ardents. Tout dialogue devenait pour ainsi dire impossible, et les dérapages avec les médias menaçaient à tout moment « .

 » La collaboration avec Jos Daerden est très différente « , poursuit l’attachée de presse.  » Je retrouve, le week-end, l’homme que j’ai vu durant toute la semaine. Il reste lui-même en toutes circonstances. Dans toutes les conférences de presse qu’il a données depuis son arrivée, il est toujours resté très calme et a chaque fois analysé les événements avec le recul nécessaire « .

Pierre Danvoye

 » Jos Daerden PARLE ET NE S’EXCITE PAS : pour nous, c’est nouveau  » (Dieudonné Londo)

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