LES CHAMPIONNATS DU MONDE DE JEUNES, PARADIS DES FAUSSAIRES

Les falsifications d’âge sont monnaie courante dans le football international. De nombreux pays africains organisent eux-mêmes la falsification de documents d’identité à l’occasion des tournois internationaux de jeunes. Au cours du dernier Mondial U17 aux Emirats Arabes Unis, une déclaration du sélectionneur du pays organisateur a fait grand bruit.  » Je suis certain que 70 % des joueurs participant à ce championnat du monde n’ont pas l’âge requis mais on tolère qu’ils soient plus vieux « , a dit Rached Albedwawi après la défaite (6-1) de son équipe face au Brésil. Il n’a pas cité de noms mais ses dires sont fondés. Il y a trois mois, le Nigéria s’est vu obligé de retirer une demi-douzaine de joueurs de sa présélection parce que des IRM de leur poignet avaient démontré qu’ils avaient plus de 17 ans. Depuis 2009, c’est par ce moyen que la FIFA tente de lutter contre les tricheries sur l’âge des joueurs au championnat du monde U17. Ce tournoi n’est pas choisi par hasard : à partir de 18 ans, l’épiphyse du poignet est masquée et il est plus difficile de déterminer l’âge d’un joueur sur base d’une IRM. L’analyse osseuse à laquelle Anderlecht a soumis Chancel Mbemba en décembre 2012 n’est donc sans doute pas aussi rassurante que le club le laisse entendre.

On remarque que les pays africains dominent souvent les grands tournois internationaux chez les jeunes mais n’ont jamais fourni de champion du monde au niveau professionnel. Les exemples de super talents africains retombés dans l’anonymat après un début de carrière prometteur sont nombreux. Peut-être parce qu’ils étaient toujours plus âgés qu’on voulait bien le dire. Lorsque la FIFA soumit a posteriori les participants des championnats du monde U17 de 2003 et 2005 à un scanner osseux, il apparut que dans 27 % des cas (plus d’un quart), le résultat du test n’était pas en corrélation avec l’évolution de l’épiphyse. Les IRM utilisées par la FIFA depuis 2003 sont fiables à 99 %. Elles sont utilisées officiellement depuis 2009. Un joueur dont l’épiphyse est masquée ne peut pas participer à un championnat du monde U17, même s’il reste 1 % de chance qu’il ait tout de même 17 ans ou moins. Il est donc exclu sur base de la probabilité, ce qui est comparable aux coureurs parmi lesquels on décèle un taux d’hématocrite trop élevé (plus de 50 %), le nombre de globules rouges laissant supposer du dopage. Pour les rares coureurs dont le taux d’hématocrite normal est supérieur à 50 %, c’est la poisse.

La falsification de l’âge des joueurs africains n’est pas toujours volontaire. De nombreux joueurs ne connaissent pas leur date de naissance exacte. En Afrique, tout le monde n’a pas de passeport et les registres de naissance ne sont pas toujours tenus de façon très précise. En l’absence de documents officiels, on procède donc souvent de façon approximative. Et dans le cas des joueurs, pour des raisons économiques, on tape plutôt bas. Tout cela se fait en accord avec les dirigeants des clubs, des fédérations et des agents. Car plus une perle noire est jeune, plus il y a de chance que des scouts européens notent son nom dans un carnet. Si Anderlecht était convaincu que Mbemba était bien né en 1988 et qu’il avait donc déjà 25 ans, il ne l’aurait jamais engagé car sa marge de progression aurait été trop faible, ce qui aurait réduit les chances de le revendre avec bénéfice par la suite.

Ceci dit, malgré la mise à l’écart d’un quart de son effectif juste avant la compétition, le Nigeria a tout de même remporté la finale du dernier championnat du monde U17 à Abu Dhabi. Il a battu le Mexique (3-0).

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