LES CARABISTOUILLES

Mot d’origine belge par excellence, une carabistouille est une blague, une galéjade, une attrape, une plaisanterie. Bref, dans le langage actuel une connerie. Exemple : depuis plus de vingt ans, la direction du Standard remplit son stade sponsorisé (?) avec la promesse formelle d’un avenir radieux en Ligue des Champions. Que reste-t-il donc des déclarations matamoresques, drapées dans les subtiles versions déclinées par la presse ?

La Coupe UEFA, sans doute, comblera encore les espoirs déçus des éternels impétrants, qui rêvent toujours de la grande époque, en mangeant des gosettes sous la drache nationale, en se réciproquant cent et un compliments sur la perfide réglementation qui permet à mes amis de Beveren de fouler les terres étrangères. Petit rappel : opéra et ouvrier ont la même racine latine. Ces mots d’origine contrôlée vont sans doute à tout jamais disparaître, au grand dam des puristes, avec la bénédiction des membres de l’Académie Française (non, Walter, tu n’en fais pas encore partie), et avec la complicité des journalistes qui n’osent plus épicer leur texte de mots peu usités, ou obsolètes, tant la pression de l’Audimat les oblige à pratiquer un langage vernaculaire.

Autre exemple : relisez la dictée de Bernard Jeunejean, publiée en fin d’année, et vous comprendrez aisément que chacun d’entre vous pourra, sans embarras ou chicanerie, pondre un papier et abuser son auditoire en mots mille et mille fois répétés et relus par des yeux affamés de retrouver les mêmes lettres ou sonorités que la semaine précédente. Certains artistes se permettent quand même quelques libertés, heureusement ! PierreVandersmissen, le volubile et enflammé commentateur de Canal +, nous a gratifiés d’un nouveau vocable, qui va dorénavant trouver à coup sûr sa place dans les vestiaires. Il s’agit de éclairceur, corrigé aussitôt en éclaircisseur par Enzo. Il voulait sans doute évoquer le nettoyeur, ou l’infiltreur, ou l’organisateur, mais alea jacta est, le mot est lancé, la paternité ne pourra être contestée, et il faudra donc ajouter au vocabulaire de nos jeunes apprentis footballeurs celui d’ éclairceur… Puis-je me permettre d’oser dire que je souhaiterais aider Bernard Pivot, grand amateur de livres, ardent prosélyte de l’art d’écrire et par ailleurs féru de football, et subtil défenseur de la langue française, quand il rend publique son intention de défendre cent mots moribonds et qu’il convient de réanimer au plus vite ? Merci à vous d’essayer de parler et d’écrire avec notre langue, sous peine d’étouffer en borborygmes… déséclaircissants ! A bientôt

PS : ce texte contient de nombreux belgicismes. A vous de les trouver !

Bertrand Crasson

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