Les antidouleurs : le nouveau danger qui guette le peloton

Dans son livre  » La Fièvre Jaune « , Michael Rasmussen met une fois de plus à nu la culture du dopage qui régnait dans le cyclisme au début des années 2000. L’introduction du passeport biologique en 2008 a eu un impact positif sur le phénomène mais un autre problème a surgi : le recours aux antidouleurs ou plutôt leur abus.

Taylor Phinney a tiré la sonnette d’alarme en octobre 2012. L’Américain a expliqué les bienfaits de pain killers comme le Tramadol et le Tylenol, de même que l’effet positif de la caféine. Selon le coureur BMC, beaucoup de coureurs ingèrent jusqu’à quinze comprimés par jour et dans les derniers kilomètres des courses, ils ont recours à ce qu’on appelle des finish bottles, des bidons remplis de caféine et d’antidouleurs. Ils peuvent donner la nausée et provoquer des vertiges.

Nikolas Maes, un coureur d’Omega Pharma – Quick-Step, a évoqué ce problème sur Twitter aussi, au terme de la Brussels Cycling Classic, en septembre.  » Proposition à l’UCI : n’autoriser la caféine qu’à partir d’un certain degré de difficulté des courses ! #peloton nerveux #chutes.  »

Dans notre guide du Tour, Bauke Mollema (Belkin) avait déjà confirmé les propos de Phynney.  » Je n’entends rien de bon sur ces antidouleurs et surtout sur les plus forts, comme le Tramadol. Ils auraient un impact sur la vitesse de réaction (ce qu’une étude scientifique américaine a prouvé, ndlr). C’est dangereux et c’est la cause de certaines chutes. Selon la rumeur, une équipe (on parle d’Euskaltel, ndlr) a beaucoup recours au Tramadol. C’est justement une équipe dont les coureurs provoquent souvent des chutes massives…  »

L’usage d’antidouleurs comme le Tramadol, qui ne sont pas encore interdits, est très répandu, comme l’a confirmé l’AMA, l’agence mondiale antidopage.  » Nous trouvons des traces de ce médicament dans un nombre considérable d’échantillons d’urine.  »

Des témoignages anonymes font état d’une véritable assuétude au Tramadol, que des coureurs ingéreraient même à l’entraînement pour pouvoir aller dans le rouge sans souffrir. En ce sens, selon Prentice Steffen, médecin de Garmin-Sharp, une équipe du WorldTour, ces antidouleurs ont un effet sur les performances.  » Il est léger. Si on accorde le score de dix à une transfusion sanguine, donnons un deux aux antidouleurs, mais ils ont malgré tout un effet similaire à celui des corticostéroïdes et des amphétamines.  »

Ce n’est pas un hasard si l’AMA a placé le Tramadol sur sa Monitored List en 2012, afin de pouvoir en contrôler la consommation. Prentice Steffen souhaite faire pression sur l’AMA, par l’intermédiaire du MPCC, le mouvement pour un cyclisme propre, qui regroupe une grande partie des équipes cyclistes, afin que l’agence place carrément le Tramadol sur la liste des produits interdits, en compétition comme en dehors.

Steffen a obtenu le soutien de Sky, bien que la formation britannique ne soit pas membre du MPCC et que son médecin, Allan Farrell, ait reconnu avoir administré du Tramadol à ses coureurs.  » Je compte continuer à le faire mais uniquement pour des raisons strictement médicales, quand un joueur souffre vraiment à cause d’une blessure ou d’une inflammation.  » Selon Farrell, le système TUE (Therapeutic Use Exemption) le permet mais les coureurs sont alors interdits de compétition pendant huit jours, une règle que le MPCC applique d’ailleurs à ses membres en cas de recours aux corticostéroïdes.

L’AMA a déjà annoncé que le Tramadol restait une des priorités de son List Expert Group et que l’abus d’antidouleurs sera suivi de près en 2014.

PAR JONAS CRÉTEUR

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