Les accidents sur le Tour de France

Décidément, et malgré le succès cette année du Français Laurent Jalabert, le 14 juillet n’est plus synonyme de fête nationale pour la société du Tour de France.

14 juillet 2000 : un adolescent qui se trouvait sur le bord de la route en compagnie de ses parents, est mortellement fauché par un véhicule de la caravane publicitaire dont le conducteur avait perdu le contrôle lors d’une manoeuvre de dépassement. En droit civil, ce conducteur doit être considéré comme préposé (personne placée sous l’autorité -effective ou non- d’autrui) de la société du Tour au moment des faits, si bien que la responsabilité de cette dernière est certaine sur base de l’article 1384, alinéa 3 du Code civil.

Suite à ce drame, assumant en quelque sorte sa responsabilité dans sa survenance, la direction du Tour avait adopté cette année des mesures qualifiées d’ « énergiques » concernant la sécurité: réduction de moitié du nombre de véhicules admis sur l’itinéraire de la course, baisse du nombre de voitures d’invités, contrôles de vitesse avec sanction immédiate pendant l’épreuve, interdiction à tous les véhicules de doubler plus d’une fois par jour la caravane publicitaire.

Ces mesures n’ont hélas pas été de nature à empêcher la survenance d’une nouvelle tragédie.

Samedi 14 juillet 2001 : peu après 18h00, quelques instants après la fin de la cérémonie protocolaire suivant l’étape du jour reliant Strasbourg à Colmar, une Renault 21 marron fonce sur la foule encore massée près de la ligne d’arrivée à plus de 60 km/h, projetant notamment en l’air le corps d’une jeune femme tel un pantin désarticulé. Le bilan est lourd : quatre personnes sont sérieusement blessées et emmenées à l’hôpital de Colmar, l’une d’entre elles, la malheureuse victime projetée par-dessus la voiture, souffrant d’un grave traumatisme crânien et de plusieurs fractures au niveau des membres inférieurs.

Ces blessures physiques et morales sont importantes et vont indubitablement nécessiter des soins et donc des coûts élevés. Qui va les prendre en charge? En clair, qui peut être jugé civilement responsable de la survenance de l’accident?

Le chauffard bien évidemment. Mais il est à craindre, pour les victimes, qu’elles se retrouvent face à un individu déséquilibré et désargenté. De plus, interné dès le lendemain des faits, il pourrait être reconnu irresponsable de ses actes. Enfin, qu’il ait été ou non en état de démence ou d’ivresse au moment des faits, sa faute est à un tel point lourde qu’elle ne sera en toute hypothèse pas couverte par son éventuelle assurance RC vie privée.

Quid de la société du Tour, qui organise la course?

Sa responsabilité civile est ici incertaine, car les circonstances de l’accident peuvent a priori être considérées comme un cas fortuit (événement imprévisible et dont la survenance est indépendante de sa volonté) exonératoire de sa responsabilité.

Reste enfin à examiner la responsabilité des autorités communales (ville de Colmar) et nationales (ministère français de l’Intérieur), chargées d’assurer et de veiller à la bonne sécurité des personnes sur la voie publique. Beaucoup se sont en effet étonnés de la facilité avec laquelle le déséquilibré a pu pénétrer en voiture au sein de l’enceinte de l’arrivée de l’étape du Tour de France, quelques minutes à peine après le passage des derniers coureurs. Les mesures de sécurité pourraient peut-être être mises en cause.

Un des attraits du sport cycliste pour le grand public, est sa proximité avec les fans et la rare disponibilité de sportifs professionnels pour leurs admirateurs. Les récents événements pourraient hélas -mais peut-être avec raison- remettre en cause cette particularité.

Luc Misson

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