LES 3 MONTAGNES

Sport/Foot Magazine a voulu savoir si le central carolo marchait vraiment sur la trace des glorieux défenseurs du Sporting. Analyse.

Depuis qu’il s’est inscrit au coeur de la défense carolo aux côtés de Javi Martos, Sébastien Dewaest suscite les comparaisons les plus flatteuses. Ressortent les noms de Philippe Albert (beaucoup), passé à Charleroi de 1985 à 1989, et de Daniel Van Buyten (un peu moins) qui porta la vareuse zébrée une saison (1997-1998). Lui qui vient de renouveler son contrat jusqu’en 2019 va-t-il réaliser une aussi belle carrière à l’étranger ?

PHILIPPE ALBERT SON ARRIVÉE À CHARLEROI

En 1985, alors que Jean-Pol Spaute, le président de l’époque, écume les divisions inférieures, on lui renseigne ce défenseur central de Bouillon. Il signe à 17 ans en plein tour final et rejoint le noyau A dès le début de la première saison des Zèbres en D1 (1985-1986).

 » Pour moi, c’était surtout un rêve de gamin qui se réalisait. De P1, je passais directement à la D1 « , expliquait-il dans le livre du centenaire du club. Il ne lui faut pourtant pas des mois avant de se glisser dans la peau d’un joueur de D1. Par contre, alors qu’il est devenu un Carolo d’adoption, il a d’abord eu du mal à se faire à son nouvel environnement.

 » Je ne parvenais pas à me faire à la mentalité de la ville. Il m’arrivait régulièrement de téléphoner à mon père pour qu’il vienne me rechercher. J’étais prêt à faire une croix sur mon rêve et à recommencer dans les divisions inférieures. Les Albert forment une famille très unie et je me sentais affreusement seul.  »

Lancé par André Colasse dès la première année, il ne quitta plus son poste de défenseur central pendant quatre ans.  » Je me souviens très bien de sa première saison « , explique son ancien équipier, Kevin Pugh,  » Il jouait en studs sur le terrain en cendrée du stade Jonet et il taclait tout ce qui bougeait. Avec ses longs cheveux et son 1m90, il n’avait peur de rien. A l’époque, Charleroi allait chercher des Ardennais notamment pour leur caractère.  »

SA TRACE AU MAMBOURG

Il est clairement devenu une légende du club. Autant par ses quatre saisons carolos que par la suite de son parcours. Devenu international alors qu’il évoluait encore à Charleroi, il n’a pas hésité à y revenir en fin de carrière, pour un passage terni par une blessure qui l’obligea à raccrocher les crampons. Dans le livre du centenaire, il fait partie du onze de base. Et depuis son passage, aucun défenseur central n’a marqué autant le club.

Aujourd’hui encore, lui qui habite à Wanfercée-Baulet, suscite le respect et l’enthousiasme auprès des supporters carolos. Pas étonnant, quand il a fallu comparer Dewaest, qu’on cite d’abord Albert avant Van Buyten (qui n’est resté qu’un an en équipe première) alors que son jeu ressemble davantage à celui de l’ancien joueur du Bayern qu’à celui de l’ancien élément de Newcastle.

SON PROFIL

Dès le départ, il prend beaucoup de cartons.  » J’avais encore beaucoup de lacunes et il fallait que je compense par ce que je faisais de mieux : imposer mon physique. J’avais compris que j’avais intérêt à me faire respecter.  »

Ce côté physique a longtemps éclipsé son placement et une certaine technique. A tel point qu’un journal le baptisa même : le boucher des Ardennes.  » Quand on m’a traité de boucher, j’étais sûr de deux choses : ce journaliste ne connaissait rien en football et j’avais assez de qualités pour faire une carrière intéressante. Il ne m’a pas fallu des années pour faire manger ses mots à ce type. J’étais assez lucide pour voir qu’à l’entraînement, je n’avais rien à envier à des gars qui tenaient sans problème leur place en D1.  »

 » En quatre ans à Charleroi, il a beaucoup progressé, notamment au niveau technique « , ajoute Pugh.  » Je me souviens d’un tir au coin du grand rectangle qui avait fini sur un carreau de l’ancienne maternité, derrière le stade. Deux ans plus tard, il tenta le même tir : un petit lob maîtrisé en pleine lucarne. Il avait compris comment il fallait jouer. Cependant, comme défenseur, il était intraitable. J’étais rassuré d’avoir Philippe derrière moi.  »

DANIEL VAN BUYTEN SON ARRIVÉE À CHARLEROI

Alors qu’il évolue à Somzée en 2e provinciale, il croise Michel Bertinchamps lors de tests physiques. Celui-ci, préparateur physique de Charleroi, le renseigne à Robert Waseige qui le prend en Réserves. Il a 19 ans. D’attaquant, il passe médian défensif et rejoint le Noyau A un an plus tard. Il fait ses débuts en octobre.  » J’entre après une demi-heure, il n’y a que 3.000 personnes dans le stade, l’ambiance est froide, on perd. Les conditions ne sont vraiment pas folichonnes, ce ne sont pas les débuts dont je rêvais « , explique-t-il dans sa biographie écrite par Pierre Danvoye.

Rapidement, il fait son trou mais c’est surtout dans l’entrejeu que Waseige le place, même si dès sa première saison, on le compare à l’ancienne idole locale, Philippe Albert. Son coéquipier de l’époque, Alex Teklak,se rappelle d’un joueur  » qui avait pas mal de lacunes au niveau de la compréhension du jeu parce qu’il n’avait jamais été confronté au haut niveau. Cependant, il masquait tous ses défauts par sa générosité dans l’effort.  » Taiseux et appliqué, il écoutait beaucoup les anciens.  » Il avait suffisamment de respect et d’éducation pour se rendre compte qu’il partait de loin.  »

Son aventure à Charleroi se termine assez vite puisqu’il ne dispute qu’une saison au Mambourg avant de filer au Standard.  » Quand le transfert est officiel, j’explique simplement dans les journaux que Charleroi n’a pas été tout à fait réglo en ne me proposant qu’une augmentation ridicule et une voiture qui ne ressemblait à rien « , ajoute-t-il.

SA TRACE AU MAMBOURG

Van Buyten, c’est un peu le gars du coin qui s’est retrouvé au Bayern Munich. On a commencé à le prendre au sérieux au fil de ses transferts successifs. Comme il n’est resté qu’une saison, on ne peut pas dire qu’il a marqué de son empreinte le jeu du Sporting mais il doit certainement être le Zèbre qui a réalisé la plus belle carrière dans l’histoire du club carolo.

SON PROFIL

Il n’avait pas encore les gestes défensifs qu’il a acquis au cours de sa carrière. Normal, puisqu’il avait effectué sa formation comme attaquant. Mais les entraînements donnés par son père dans son jardin l’avaient façonné. C’était déjà une belle bête et un monstre d’endurance. Il ne lâchait jamais rien. C’est sans doute ce côté physique, cette volonté, qui le rapproche le plus de Dewaest. Par contre, au niveau technique, il avait encore du déchet. A son départ, Raymond Mommens n’avait pas hésité à déclarer qu’il était déjà trop vieux pour améliorer sa technique. Pourtant, à force de se coltiner des joueurs techniques aux entraînements, que ce soit à Marseille, Hambourg ou au Bayern, il est devenu de plus en plus à l’aise balle au pied.

SÉBASTIEN DEWAEST SON ARRIVÉE À CHARLEROI

Habitant de Comines, il a d’abord usé ses chaussures dans un petit club de sa région avant de rejoindre le centre de formation de Lille… à 8 ans. N’entrant pas dans les plans du club français, il rebondit à 19 ans en D2, à Roulers où il se fait les dents durant deux ans et demi. C’est donc un parcours linéaire qu’il connaît avant son arrivée à Charleroi, à 22 ans.  » On a analysé les projets sportifs présentés et j’ai opté pour Charleroi où c’est là que j’avais le plus de chances de jouer « , explique-t-il à l’été 2013 pour expliquer son transfert. Entré au jeu à la 6e journée de championnat, il ne quitta plus le onze de base.

Dès sa première saison, Dewaest devient donc un pion majeur de l’équipe, au point d’être élu Zèbre d’Or (à savoir joueur de l’année) en mai dernier. Une gageure pour un défenseur puisqu’il rejoint au palmarès de ce trophée, créé en 1994, des arrières comme Marco Casto (1996), Drazen Brncic (1997), Bertin Tokene (1998), Frank Defays (2000, 2001 et 2007) et Badou Kéré (2006). Même Daniel Van Buyten n’avait pas été élu Zèbre d’Or à l’issue de sa première saison chez les A, qui lui valut un transfert au Standard !

SA (FURUR) TRACE AU MAMBOURG

Difficile à dire. Cela dépendra du nombre de saisons qu’il restera au club. Actuellement, il incarne le club puisqu’il est Belge, Wallon et qu’il sert de support publicitaire pour les produits de la société du président, Fabien Debecq. Il continue à progresser et seul Neeskens Kebano devrait l’empêcher de décrocher un nouveau Zèbre d’Or.

SON PROFIL

Ce qu’on remarque en premier lieu chez lui, c’est son physique impressionnant. Une vraie force de la nature, renforcée par la présence de nombreux tatouages. Il est intraitable dans les duels aériens et difficile à passer homme contre homme. Son sens de l’anticipation en fait un défenseur moderne, plus souvent debout qu’à terre. On pourrait penser que son côté physique en fasse un des joueurs les plus visés par l’arbitrage mais avec ses six cartons récoltés cette saison, il est dans la moyenne d’un défenseur central. Ni plus, ni moins. Son passage au centre de formation de Lille en fait un joueur tactiquement bien développé et avec une bonne technique pour un défenseur. Il sait se contrôler sur un terrain et aime faire la différence sur les phases arrêtées.

PAR STÉPHANE VANDE VELDE – PHOTOS: BELGAIMAGE

 » Van Buyten masquait tous ses défauts par une incroyable générosité dans l’effort.  » Alex Teklak

Le sens de l’anticipation de Dewaest en fait un défenseur moderne.

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