Le volcan et le lutteur

Après avoir réussi à l’étranger, ils sont revenus : l’attaquant à Westerlo et le milieu à Saint-Trond avec l’intention de se faire un nom chez eux.

V an Hout est un volcan, avait titré l’hebdomadaire allemand Kicker en 2003. Un article particulièrement élogieux qui décrivait l’entrée au jeu de Joris Van Hout (30 ans) avec le Borussia Mönchengladbach. Blessé pendant huit mois, il avait signé son retour avec un but alors qu’il était entré à neuf minutes du terme seulement.

Son explosion de joie, c’était le Vésuve et l’Etna à la fois: c’était un peu exagéré mais cela prouvait bien que Van Hout avait du caractère et qu’on l’appréciait beaucoup en Allemagne, où il était considéré comme un garçon sympathique. L’avant sera-t-il aussi explosif la saison prochaine sous le maillot de Westerlo ?

Lors du dernier championnat, qu’il disputa avec Bochum, Marcel Keller, l’utilisa surtout comme supersub, ce qui ne lui plut guère, d’autant qu’il avait inscrit six buts la saison précédente et avait aidé le club à monter.  » Mais il faut être réaliste : ceux qui jouaient à ma place n’étaient pas n’importe qui. Je n’ai jamais été du genre à aller demander des explications ou à tirer la tête si je ne jouais pas. D’un autre côté, ce n’est pas moi non plus qui vais me tracasser après un moins bon match « .

L’ex-joueur de Dessel, du FC Malines et d’Anderlecht rêve néanmoins de s’imposer comme titulaire à Westerlo.  » Ce ne sera pas simple car Dieter Dekelver et Patrick Ogunsoto marquent facilement mais la concurrence existe dans tous les clubs ambitieux « , dit-il tout en sachant qu’il va devoir se réadapter à la mentalité belge.  » En Allemagne, nous allions au vert toutes les semaines, c’était du professionnalisme poussé à l’extrême. Par contre, je ne crains pas trop les stades vides : même avec 6.000 personnes, il peut y avoir de l’ambiance « .

Malines et Saint-Trond souhaitaient également l’embrigader.  » Westerlo fut plus concret. De plus, j’ai la possibilité de jouer dans mon jardin, en Campine, dans un club sympa. Je ne dis pas que j’étais pressé de rentrer en Belgique car je suis très fort mentalement et j’ai toujours su me battre pour revenir dans le coup. Mais on m’a offert un contrat de quatre ans, preuve qu’on croit en moi. Et puis, Westerlo obtient de bons résultats depuis plusieurs années. Comme il y a eu peu de départs, on peut espérer que cela continue. Nous pouvons avoir l’ambition de faire trembler les grands et terminer juste derrière les meilleurs « .

Il se voit bien dans un rôle de pivot.  » Du moment qu’on ne m’aligne pas en défense, je serai content « , sourit-il.  » Je veux faire valoir mon physique et marquer de temps en temps un but « .

Il estime que son expérience en Allemagne lui a conféré plus de maturité et il ne la regrette pas.  » J’y suis parti parce qu’Anderlecht ne me donnait pas ma chance. J’ai joué régulièrement devant 15 à 25.000 spectateurs. Je ne sais pas si j’ai progressé sur le plan technique mais aujourd’hui, je suis plus complet, je joue plus simple et je sens mieux le jeu. Je parle plus, aussi « .

Il a également fait connaissance avec une presse plus critique.  » Parfois un peu trop, comme les Hollandais. Mais bon, il y a aussi du positif là dedans « .

Van Dessel :  » Etranger dans mon pays  »

Kevin van Dessel, pour sa part, a opté pour Saint-Trond, où Valère Billen lui demande de chasser un maximum de ballons dans l’entrejeu. Et il ne cache pas qu’il piaffe d’impatience de pouvoir se donner à fond.

 » Vous voyez cette cicatrice sous mon £il gauche ? Je l’ai depuis que j’ai un an. J’apprenais à marcher, je me tenais d’une main à un meuble et, de l’autre, j’ai fait tomber la coupe à fruits. Mon grand frère, Jimmy, m’a retenu mais je me suis dégagé et je suis tombé la tête en avant dans les débris : 21 points de suture, à un millimètre de mon £il et à deux millimètres d’une artère. J’aurais pu mourir mais ce n’est rien à côté du chemin de croix que j’ai suivi ces deux dernières années. Je suis costaud et je n’ai pas peur des contretemps. C’est pourquoi je recommence à zéro à Saint-Trond : je veux donner un nouvel élan à ma carrière car en Belgique personne ne me connaît vraiment. Je suis un étranger dans mon propre pays car j’ai joué trop longtemps en Hollande. Maintenant, je dois me redécouvrir. Si je retrouve le niveau qui était le mien, je repartirai et tout le monde y gagnera. J’ai envie de revanche, je suis prêt à foncer sur tout ce qui bouge. Physiquement, mes meilleures années sont encore devant moi. J’ai deux ans à rattraper et je veux jouer jusqu’à l’âge de 36 ans « .

Van Dessel était en fin de contrat à Roda JC, dont il fut longtemps un des piliers de l’entrejeu. Mais deux graves blessures au genou lui permirent de s’en aller gratuitement à Saint-Trond, où il a signé un contrat d’un an.  » Je dois être honnête : je n’avais guère de propositions. Même pas Venlo ou Alemannia Aix-la-Chapelle, comme on l’a dit. Ces clubs avaient peur. Bien sûr, à Saint-Trond aussi, on a voulu en savoir plus sur ma condition physique mais ce club a pris le risque de me faire une proposition. Comme je suis conservateur et qu’une parole est une parole, j’ai alors refusé des tests à Malines et à Roulers. Je ne voulais pas non plus rester à Roda où l’offre qu’on me faisait manquait de respect : on ne me donnait plus qu’un septième de mon dernier salaire. J’ai une famille à nourrir, je ne voulais pas d’aumône « .

 » A Saint-Trond, j’ai d’abord été contacté par M. Laureyssen mais c’est l’entretien avec Valère Billen qui m’a décidé. Il a un rôle précis à me confier et m’a fait certaines promesses. C’est comme médian central que je suis le meilleur, ou alors, un peu décalé à gauche. L’entraîneur veut que je sois un leader. Je dois apporter une plus-value sur le plan footballistique. A Roda, j’étais capitaine car j’ose parler. Je suis persuadé que je peux aider mes équipiers à mieux jouer. C’est un beau défi « .

 » Je suis un peu déçu de quitter Roda de cette façon, même si j’y ai vécu de bons moments. Bien sûr, je comprends qu’après dix-huit mois à deux ans d’inactivité, on ait des doutes à mon sujet. J’ai souffert lorsque Huub Stevens a dit qu’il ne me voyait pas revenir dans le coup, voire rejouer au football. Mais cela m’a stimulé à travailler davantage. Raymond Atteveld, qui l’a remplacé lorsqu’il est parti à Hambourg, n’était pas tout à fait de son avis. Il en a parlé avec la direction mais là non plus, on n’avait plus confiance. J’avais un bon contrat, signé à l’époque de Theo Pickée et Nol Hendriks. Depuis leur départ, le club a perdu son aspect familial et ne gagne plus autant qu’avant. Cela peine beaucoup de gens. Roda n’est pas un grand club : il lui manque des gens qui mordent sur leur chique comme Eugene Hanssen « .

Quelques dates lui reviennent immédiatement en mémoire.  » Mon genou gauche m’a lâché le 20 décembre 2004. Cela faisait un an et demi que je jouais sans ligament croisé antérieur mais le cartilage était aussi touché. Parfois, je prenais deux à trois anti-douleurs, plus une infiltration pour jouer. Nous menions au PSV mais je ne savais plus où j’étais. Dès que j’avais le ballon, je le mettais dehors mais l’entraîneur, Wijlan Vloet, voulait absolument que je joue. L’opération s’est bien passée, j’ai travaillé dur chez Lieven Maesschalk et, après six mois, j’ai repris la préparation. Stevens avait confiance en moi et me titularisa immédiatement en championnat puis j’ai eu un petit creux et je suis retourné sur le banc.

Le 17 octobre 2005, j’étais titulaire contre Utrecht et, après une demi-heure, en changeant de direction, mon genou droit a craqué. J’arrivais encore à me tenir droit mais plus à le plier. Le chirurgien, qui était par hasard dans la tribune, est venu me trouver à la mi-temps et m’a dit qu’il faudrait à nouveau m’opérer. J’en ai pleuré, le monde s’écroulait autour de moi et je me demandais pourquoi le sort s’acharnait. Je savais toutes les étapes qu’il me faudrait franchir pour revenir. Je n’ai pas fermé l’£il de la nuit. J’avais mal au genou et au c£ur. Heureusement, le docteur Truyen m’opéra dès le lendemain et me dit que je pourrais rejouer au football. En m’opérant aussi vite, on prenait tout de même le risque que le scanner soit gâché par l’hématome. C’était comme conduire dans le brouillard. De fait, on ne vit pas qu’un morceau de cartilage s’était détaché et il fallut m’opérer une deuxième fois, ce qui freina ma rééducation. Après l’opération, je n’ai rien pu faire pendant un mois et je voyais mes muscles fondre comme neige au soleil. J’étais vidé mais les déclarations de Stevens me boostaient. N’empêche que la traversée du désert était longue.

Heureusement, je suis très fort mentalement. Sans quoi je ne serais pas parti en Italie dès l’âge de 18 ans. Là, j’étais livré à moi-même et je suis devenu un mec. Aujourd’hui, je suis prêt à tout. Je connais très bien mes limites et je sais ce que je veux. Quand j’ai un objectif devant moi, rien ne peut m’en détourner. J’ai besoin qu’on me témoigne de la confiance mais une petite tape dans le dos peut suffire. Beaucoup de gens disent que je suis pessimiste mais ce n’est pas tout à fait vrai. Je réfléchis beaucoup et je finis toujours par voir le bon côté des choses. Il ne faut pas me stimuler, je suis assez discipliné pour le faire moi-même. Je sais que celui qui en fait plus est toujours récompensé et j’ai souvent dépassé les limites de la douleur.

Si Roda s’était montré raisonnable, je serais peut-être resté car huit ans dans un club, ça crée des liens. Je savais que je devais faire un effort mais on m’offrait une misère et ça fait mal. A Saint-Trond, j’ai signé un contrat à la prestation qui peut être rompu à tout moment sur base d’évaluations. J’ai six mois pour faire mes preuves et cela ne me dérange pas. Stijn Vreven, Peter Van Houdt, Marc Hendrikx, Peter Delorge, Nicky Hayen et moi-même devons encadrer les jeunes. Nous sommes supposés être en première ligne. Je dois leur transmettre la mentalité hollandaise. Je ne vais pas me cacher mais je veux d’abord retrouver le rythme. Actuellement, je suis à 80 %. Si on me laisse le temps, je vais y arriver mais il ne faut pas attendre de miracle. Le club doit aussi faire preuve d’ambition, viser la colonne de gauche. Il faut jouer en fonction du matériel qu’on a à sa disposition. Le Staaien doit redevenir un enfer qui fait trembler l’adversaire. Saint-Trond a toujours été une équipe de lutteurs. Il faut miser là-dessus, d’abord mouiller son maillot « .

par bert boonen et frederic vanheule

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