Le temps de la réflexion

La sortie surprenante mais bien pensée de Kevin De Bruyne quant à la tactique des Diables Rouges doit au moins inciter à la réflexion sur un système qui coince sous plusieurs aspects. C’est bien plus important que de se demander quelles sont les motivations de De Bruyne. Ceux qui travaillent au quotidien avec un professionnel comme Pep Guardiola placent la barre très haut. C’est nécessaire si on attend beaucoup du prochain Mondial. On ne peut pas passer son temps à répéter que la levée actuelle est exceptionnellement douée si elle ne le prouve pas au plus haut niveau.

Il fut une époque où unité et intelligence tactique formaient la base des succès des Diables Rouges. Les corrections émanaient également du noyau. Avant, il aurait été impossible de jouer avec cinq défenseurs contre trois attaquants et de perdre la bataille de l’entrejeu, comme vendredi contre le Mexique. Cette fois, personne n’a modifié quoi que ce soit. En l’absence de Vincent Kompany, il n’y a pas de leader sur le terrain.

Kevin De Bruyne n’a pas tort de remarquer que l’équipe s’appuie trop sur son talent. Le jeu des Diables est trop capricieux. Parfois, elle est brillante, d’autres fois, elle manque d’inspiration. Par moments, le groupe semble tomber dans la facilité. En mettant en évidence la mentalité, après la victoire en Bosnie-Herzégovine, il y a quelques semaines, Roberto Martinez envoyait un signal. Comme si afficher du caractère n’était pas la moindre des choses pour des footballeurs grassement payés.

Le passé nous a appris que les Diables Rouges souffraient, dans leur occupation de terrain actuelle, avec trois défenseurs centraux, contre des adversaires de haut niveau. Indépendamment du match d’hier soir, contre le Japon, Martinez s’en tient pourtant à ce système.

On a souvent reproché un manque de souplesse tactique à Marc Wilmots. Ça a coûté cher à la Belgique au Mondial 2014 comme à l’EURO 2016. Les matches contre les États-Unis et la Hongrie, ont suffi à plonger tout le monde dans l’euphorie. Elle a été rapidement suivie par le désenchantement. Nous ne sommes guère plus avancés maintenant. Le même scénario risque de se reproduire en Russie car dans leur seul match face à une véritable grande nation, l’Espagne, les Diables Rouges ont été surclassés à tous les niveaux. Mais comme c’était le premier match de Martinez, on s’est empressé de fermer les yeux.

Quinze mois plus tard, Roberto Martinez doit procéder à son évaluation personnelle. Un entraîneur peut être irrité par les remarques de Kevin De Bruyne mais il peut également prendre le temps de la réflexion. Les frictions ne mènent à rien. Il faut trouver le bon équilibre. Il reste sept mois. Qui peuvent aussi être mis à profit pour réintégrer Radja Nainggolan, même si le prochain match n’a lieu qu’en mars. Il était par ailleurs interpellant d’entendre dire que Nainggolan allait recevoir sa chance lors des matches contre le Mexique et le Japon. C’est plutôt humiliant pour un des meilleurs médians de Serie A. Et, quelque part, ce n’est pas conséquent. Thomas Vermaelen, par exemple, est toujours de la revue alors qu’il a un temps de jeu famélique au Barça.

Le championnat reprend ses droits ce week-end. Après huit changements d’entraîneurs en division 1A et douze sur 24 dans le football professionnel. D’autres vont certainement suivre. L’émotion l’emporte de plus en plus la raison. Chaque limogeage découle d’une erreur de jugement mais ce ne sont pas les dirigeants responsables de ces errances qui en paient les pots cassés. On attend toujours le premier qui tirera ses conclusions personnelles d’une situation scabreuse.

PAR JACQUES SYS

Ceux qui travaillent au quotidien avec Pep Guardiola placent la barre très haut.

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