Le Spirou fait peau neuve

Un président, un coach, et des joueurs new look : c’est le branle-bas général chez le porte-drapeau du basket wallon, où tout respire décidément le changement à l’aube de la nouvelle saison.

Juin 2012. Après quatre titres consécutifs, le Spirou Charleroi s’incline à Ostende, d’un point après prolongation, dans la cinquième manche d’une finale de play-offs particulièrement intense. On l’ignore encore à ce moment-là, mais ce match symbolise une passation des pouvoirs. Depuis lors, le club wallon le plus puissant n’a plus remporté le moindre trophée : ni championnat, ni coupe. Et, cette saison, le club redémarre quasiment de zéro. Au printemps 2014, EricSomme – le père spirituel du Spirou – quitte la présidence. Pour lui succéder, le choix se porte sur un fidèle de la maison : le coach GiovanniBozzi.

Un autre coach doit donc être désigné : JurgenVanMeerbeeck, qui a fait des miracles avec la jeune équipe de Louvain, est le favori de Somme ; YvesDefraigne, l’entraîneur à succès de Mons-Hainaut, celui de Bozzi. Le nouveau président du Spirou dit  » non  » à Van Meerbeeck, tandis que Defraigne dit  » non  » à Bozzi et préfère poursuivre son aventure à Mons. Pendant des mois, on a attendu la désignation d’un nouveau T1. Des rumeurs faisaient état d’une possible nomination de JacquesStas, jusque-là directeur sportif, mais elles n’ont été confirmées qu’en juillet.

Le coaching dans le sang

Pour le monde extérieur, la nomination de Stas peut apparaître comme un choix par défaut, parce qu’aucun coach confirmé n’a pu être trouvé. Il apparaît aussi comme un novice. Or, il est coach depuis ses 14 ans. Il en a 45 aujourd’hui, faites le compte.  » Lorsque je jouais à Grivegnée en D3, mon coach de l’époque m’avait proposé de prendre en charge une équipe de jeunes « , se souvient-il.  » J’ai directement été passionné. Je copiais un peu ce que FransDeBoeck m’enseignait dans les sélections nationales de jeunes. J’ai coaché ma première équipe Seniors à 20 ans : Saint-Eloy, en Provinciale liégeoise, où jouait mon beau-frère. Je n’ai, en fait, jamais arrêté.  »

S’il y a un joueur dont la voie semblait toute tracée au terme de sa carrière, c’est bien Stas. Or, depuis son dernier match lors des play-offs à Bree en 2005, il a fait tout sauf coacher.  » Des opportunités se sont pourtant présentées. Charleroi m’avait sollicité pour succéder à SavoVucevic. J’avais accepté, mais le jour où je devais signer, ma grand-mère est décédée et le club a choisi DavidDesy. On m’a aussi proposé de coacher l’équipe nationale, où j’aurais succédé à… Giovanni Bozzi. Mais j’estimais que c’était trop tôt et que je ne pouvais pas passer, sans transition, de capitaine à coach. Je suis alors devenu l’adjoint d’EddyCasteels… et je le suis toujours, dix ans plus tard.  »

Tout vient à point à qui sait attendre. L’opportunité de coacher en D1 s’est enfin présentée. Mais pourquoi l’officialisation de son nouveau statut a-t-elle pris autant de temps ?  » Je n’entrerai pas dans les détails, mais disons qu’il y avait certains points à régler en matière de contrat.  » Comprenez : la tâche de directeur sportif offre certaines garanties en matière de stabilité, alors que celle de coach est plus aléatoire car liée aux résultats.

La grande lessive

Côté joueurs aussi, pas mal de changements. Exit DemondMallet, DarrylWatkins, JoeTrapani et autres. Et le seul joueur américain toujours sous contrat, JustinHamilton, s’est blessé aux ligaments croisés pendant la préparation et ne jouera plus avant 2015. Rayon belge, ChristopheBeghin (main) et SachaMassot (pied) sont toujours convalescents, tandis que JornSteinbach (arrivé en fin de contrat entre-temps) soigne toujours ses problèmes de hanches et ignore s’il pourra un jour rejouer au basket. Un drame pour ce garçon de 25 ans, qui avait encore été élu Joueur de l’Année en 2012 lorsqu’il évoluait à Alost. Bref, si l’on excepte l’international WenMukubu, le public découvrira pas mal de nouveaux visages.

 » Le recrutement s’est effectué très tardivement « , regrette Stas.  » Pour différentes raisons, dont les hésitations d’AxelHervelle : viendra, viendra pas ? De sa venue dépendait le budget dont nous disposions pour les autres acquisitions.  » Hervelle n’est donc pas venu et le recrutement s’est essentiellement porté sur des joueurs jeunes, prêts à mouiller leur maillot.  » A cet égard, notre nouveau pivot WillHudson porte un prénom prédestiné « , souligne Stas.  » Will, cela se traduit par volonté. On peut rater des tirs, mais il faut mettre de l’énergie dans son jeu.  »

On pourrait ajouter que le nom francisé d’EricWise serait EricLesage. Volonté et sagesse, sont-ce les nouvelles caractéristiques du Spirou ? L’un des tout derniers arrivés se nomme DylanPage. Comme une page blanche, dont il faut encore écrire l’histoire, ou une page qu’il faut tourner, celle du passé. Car Charleroi n’est plus le club n°1 en Belgique. L’arrogance a laissé la place à l’humilité. Fini de se proclamer le plus beau, le plus fort, le plus malin. La crise a fait son oeuvre, aussi. C’est un secret de polichinelle que le Spirou a été confronté à de sérieux problèmes financiers. Aujourd’hui, le budget est de 50 % inférieur à ce qu’il était durant la période de gloire, il y a cinq ans d’ici.

S’inspirer d’Ostende

Un changement de philosophie est perceptible. Si, longtemps, Charleroi a dominé le basket national grâce à un budget supérieur aux autres, il a négligé son école de jeunes et a omis de lancer des joueurs belges. A titre d’exemple : MaximeDeZeeuw, élu Joueur de l’Année 2014 avec Anvers, a été sous contrat avec Charleroi pendant cinq ans mais n’a jamais joué pour le Spirou. Aujourd’hui, il va jouer le championnat d’Italie et la Coupe d’Europe avec Rome.

Cet été, des joueurs belges qui avaient été contactés ont refusé de rejoindre Charleroi, de crainte de devoir y jouer les utilités. C’est en train de changer.  » L’arrivée de LoïcSchwartz est la première pierre de ce nouvel édifice « , poursuit Stas.  » Un jeune de 22 ans, formé à Mons et qui est devenu international après une saison à Pepinster. Il a signé un contrat de trois ans.  »

La réussite d’Ostende, champion ces trois dernières années avec des joueurs belges qui ont joué un rôle majeur, a donné des idées. L’influence de Stas, passionné depuis toujours par la formation des jeunes et dont la fibre patriotique n’a jamais été prise en défaut, se fait aussi sentir. Et chacun a constaté que le Spiroudôme, autrefois chaudron bouillant, a tendance à être déserté par les spectateurs.  » Il est important de conférer au Spirou une identité dans laquelle le public sait se reconnaître « , estime Stas.

PAR DANIEL DEVOS

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