LE SPARTIATE

Son regard glacial, son tempérament de feu et sa pilosité faciale auraient pu lui offrir une place de choix dans l’armée de Leonidas. Mais Giannis Maniatis joue au football. Et c’est l’armée rouche qui pourra compter sur un nouveau guerrier sur la route des play-offs.

Dans l’actuelle ville de Sparte, qui n’a plus que des ruines ou quelques statues pour remémorer aux visiteurs son orgueilleux passé, il est possible de résider à l’hôtel Maniatis. La famille du nouveau joueur du Standard n’a rien à voir là-dedans, mais la coïncidence devient intéressante quand le milieu de terrain prêté par l’Olympiacos monte sur le terrain. Parce que Giannis Maniatis est un guerrier, un vrai. Et pour ne rien gâcher, il porte une barbe abondante qui pourrait lui offrir un rôle en vue dans un peplum.

 » J’étais à l’Olympiacos quand il a été transféré chez nous « , se souvient Urko Pardo, ancien gardien du club du Pirée qui évolue aujourd’hui à l’APOEL Nicosie. Maniatis débarque alors de Panionios, modeste formation de la banlieue athénienne, et est encore loin du joueur qui deviendra le patron du milieu de terrain à l’Olympiacos.

 » Il est arrivé en tant qu’arrière droit « , poursuit Urko Pardo.  » C’est seulement plus tard qu’il s’est imposé dans le milieu de terrain et qu’il est devenu un patron dans le vestiaire. Lors de ses débuts, c’était un gars plutôt discret. D’ailleurs, il jouait assez peu. Mais j’ai directement été marqué par sa détermination au-dessus de la moyenne. Il transpirait l’envie de gagner.  »

Cette grinta, véritable marque de fabrique de l’international grec, a été exacerbée lors de la dernière Coupe du monde. En plein exercice de centres lors d’un entraînement de la sélection, les nerfs de Maniatis lâchent suite à un ballon mal calibré par le latéral Giorgios Tzavellas :  » Qu’est-ce que tu fous ? Ce n’est pas le PAOK ici.  »

L’affaire tourne presque au pugilat et le joueur menace de quitter le Brésil, avant de se rétracter à quelques heures de la rencontre face au Japon. Ce trash-talking devrait trouver du répondant sur les terrains d’entraînement de l’Académie, où les Adrien Trebel ou autre Matthieu Dossevi n’hésitent pas à faire savoir ce qu’ils pensent.

Comme l’été dernier, c’est donc à Athènes que le Standard a fait des affaires dans le money-time du mercato. Dossevi et Sambou Yatabaré avaient quitté Le Pirée à la fin du mois d’août, et c’est encore à la porte de l’Olympiacos que Bruno Venanzi a frappé d’urgence pour trouver un remplaçant au Malien, parti terminer la saison en Bundesliga.

CAPITAINE FRACASSÉ

Malgré son métier et sa sagesse devant la défense, Eyong Enoh manquait de volume pour répondre à l’exigeant pressing mis en place par Yannick Ferrera en perte de balle. À Louvain, sa position trop proche de son arrière-garde a créé des brèches entre les lignes centrales du 4-2-3-1 liégeois.

Il fallait donc une énergie plus importante pour partager le milieu de terrain avec Adrien Trebel. Après avoir tenté de débaucher Victorien Angban à Saint-Trond, le Standard a également été un temps sur la piste d’un international sud-américain, avant de jeter son dévolu sur Maniatis. Et le casting semble parfait.

Il y a un an, la venue d’un joueur de ce calibre en bord de Meuse aurait sans doute été impossible. Le milieu de terrain grec était alors une valeur sûre de l’Olympiacos, où il portait carrément le brassard de capitaine. Pas étonnant pour un joueur qui, selon des sources grecques, n’hésite jamais à donner de la voix dans le vestiaire pour dire ouvertement ce qu’il pense. Maniatis veut être un leader, et il se comporte comme tel.

Mais ce statut a pris du plomb dans l’aile lors de la demi-finale de la Coupe de Grèce, le 11 mars dernier. Peu avant l’heure de jeu, le capitaine se fait les croisés sur la pelouse de l’AEK et doit faire une croix sur la fin de saison et l’entame de la suivante. Esteban Cambiasso débarque à Athènes au mercato, et accroît la concurrence déjà dense dans un milieu de terrain où Luka Milivojevic et Pajtim Kasami enchaînent les prestations de haut niveau.

Maniatis se remet de sa blessure, mais son problème est que Marco Silva, le coach de l’Olympiacos, est visiblement un adepte de l’adage qui veut qu’on ne change pas une équipe qui gagne. Et que le club du Pirée ne perd jamais. Giannis gratte cinq petites montées au jeu lors du mois de janvier, mais finit par comprendre qu’il doit retrouver une place de titulaire ailleurs. L’APOEL Nicosie semble tenir la corde pendant plusieurs jours, mais c’est finalement le Standard qui rafle la mise.

CORPS ET ÂME

Sclessin devrait rapidement tomber sous le charme d’un milieu de terrain pour qui la notion d’effort est une philosophie de vie. Maniatis ne se ménage jamais, se jette dans le duel avec passion et jouit d’une intelligence tactique au-dessus de la moyenne qui lui permet d’être un outil de pressing extrêmement précieux.

Les spécialistes grecs parlent de lui comme d’un joueur un peu rustre sur le plan technique, mais dont l’activité majuscule permet de faire déjouer l’adversaire, de le pousser à la faute quand il est installé devant la défense, dans un système en 4-2-3-1. Soit exactement le rôle qui lui sera dévolu sous les couleurs du Standard.

Dans le staff liégeois, on se réjouit déjà de l’arrivée du remplaçant idéal de Sambou Yatabaré. Maniatis est d’ailleurs déjà perçu par les Rouches comme  » plus propre dans le jeu  » que le Malien, dont le jeu en possession était parfois trop brouillon pour être efficace.

Sur le terrain d’entraînement, son activité a déjà fait forte impression. Pas étonnant. Parce qu’après tout, c’est grâce à leur ardeur à l’entraînement que les Spartiates étaient devenus les guerriers les plus redoutés de Grèce.

PAR GUILLAUME GAUTIER – PHOTO REPORTERS

 » Discret à ses débuts, il est rapidement devenu le patron du vestiaire.  » URKO PARDO, EX-COÉQUIPIER À L’OLYMPIACOS

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