Le retour au bon moment

Le fer de lance des Mauves a retrouvé son punch au moment où les play-offs entrent dans leur phase décisive… et où son transfert est plus certain que jamais.

Contrairement à ce que certains croient, Romelu Lukaku n’a toujours pas paraphé de préaccord avec un club anglais. Pas plus qu’un autre aurait soi-disant décroché, parce que le joueur serait en délicatesse avec un tendon rotulien. Mais Christophe Henrotay, son manager, admet évidemment que plusieurs pensionnaires de la Premier League sont bel et bien en lutte dans la course à l’embrigadement du joueur.

 » Au départ, seuls les deux représentants de Manchester, United et City ainsi que Chelsea et Arsenal semblaient avoir les moyens de se le payer. D’autres se sont ajoutés entre-temps, comme Tottenham où le manager Harry Redknapp n’est pas satisfait à 100 % des services de Peter Crouch, Jermain Defoe ou Roman Pavlyuchenko. Sans oublier Newcastle United qui a touché le gros lot suite au transfert de son attaquant-vedette Andy Carroll au FC Liverpool. Et les Reds eux-mêmes, qui ont lâché Fernando Torres à Chelsea, sont venus aux nouvelles aussi. Indépendamment de ceux-là, d’autres se sont manifestés comme le Real Madrid, le FC Barcelone, le Bayern Munich, l’Olympique Lyonnais ou encore la Juventus. Les uns n’ont pas insisté en raison du prix (entre 20 et 30 millions), les autres n’ont pas que le seul attaquant anderlechtois dans leur collimateur. Et puis, vu son profil, celui-ci est plus sensible au football déployé au Royaume-Uni qu’à celui pratiqué dans un championnat à dominante plus technique comme la Liga notamment. Le futur point de chute de mon protégé dépendra essentiellement de deux facteurs : le montant du transfert et les perspectives sportives pour le joueur. A cet égard, il y a une volonté de la part des différentes parties de conclure un deal qui contente absolument tout le monde. Le Sporting n’entend pas pousser le joueur dans telle ou telle direction sous prétexte que l’offre y est plus avantageuse pour sa trésorerie. Il faut que Rom continue à s’épanouir dans l’environnement le plus propice, chacun en est conscient. En réalité, la seule chose qui paraît acquise, c’est qu’en raison du débours consenti, le joueur rejoindra immédiatement le club qui l’acquiert au lieu de rester un an encore à Anderlecht par exemple. Je pense aussi que pour le bien du joueur, celui-ci a intérêt à partir cet été déjà et non l’année prochaine. Je suis d’avis que son écolage est terminé en Belgique. Et ce, aussi bien en ce qui concerne sa scolarité stricto sensu que pour ce qui est du football.  »

Comment il est revenu en forme

Le contraste est frappant : l’année passée, au même moment, Lukaku était à la ramasse. Meilleur buteur de la phase classique du championnat avec 15 goals, l’attaquant n’avait plus réussi à alimenter le marquoir lors des 10 matches des play-offs. Cette fois, s’il a scoré à 12 reprises au cours du premier volet de la compétition, il a continué à améliorer sa production. A défaut de terminer en tête du classement des réalisateurs, le teenager devrait battre le total réalisé il y a un an avant de mettre son talent de puncheur au service d’un club plus huppé.

 » Il a fait un bond vers l’avant « , observe Besnik Hasi, le T2 des Mauves.  » Si ses statistiques sont restées plus ou moins les mêmes, il a souvent mis des buts importants. A Saint-Trond, déplacement toujours périlleux, il en a pris deux à son compte : score final 0-2. Face à Courtrai, la semaine suivante, il marque le but d’ouverture, prélude à un succès par 3-0. Idem contre Westerlo, 2-0. A Genk, La Gantoise et Zulte Waregem, rencontres qui se soldent toutes par 1-2, c’est chaque fois lui qui plante le goal décisif. Sans oublier son 0-1 au Club Bruges avant que Mbark Boussoufa ne fixe le 0-2 définitif. Certains frappent quand le marquoir indique déjà 2 ou 3-0 en notre faveur et que l’adversaire a bras et jambes coupés. Rom, lui, est performant à des moments-clés. Ses chiffres seraient plus élevés encore s’il n’avait pas été handicapé par une blessure au tendon rotulien pendant la préparation. Hormis deux buts faciles contre The New Saints, il avait dû patienter jusqu’à ce fameux match chez les Canaris lors de la 6e journée, avant de faire trembler les filets. Depuis, il a gardé le rythme, sauf aux mois de janvier et février où il a manifestement connu un creux. Ce n’est pas anormal, vu son âge et ses obligations scolaires. Et puis, mener de front une vie de footballeur pro et des études n’est pas évident. Pourtant, le garçon a accompli aussi des progrès à ce niveau. Tout au long de la campagne 2009-2010, il avait fallu le ménager, tant aux entraînements qu’en matches. Ces derniers mois, il a été sollicité davantage. Il a à la fois été soumis à une préparation plus poussée et compte beaucoup plus de minutes de présence sur le terrain. Avant, on le retirait au bout d’une bonne heure, grosso modo. A présent, on l’a souvent maintenu 75 minutes et même davantage. Ce qui lui a permis de faire la différence in extremis à l’une ou l’autre occasion. Comme contre les Buffalos lorsqu’il a paraphé le 3-2 à la 82e minute « .

Ce soir-là, le joueur était couplé à Tom De Sutter, qui avait au demeurant pris à son compte les deux premières réalisations. Auparavant, le duo n’avait été associé qu’une seule fois d’entrée de jeu : face au Lierse, étrillé 6-0, avec un but de Rom à la clé. Depuis quelques semaines, on observe d’ailleurs que le 4-2-3-1, qui a longtemps été la marque de fabrique du Sporting version Ariel Jacobs, s’est mué en 4-4-2 avec tantôt De Sutter, tantôt encore Dalibor Veselinovic au côté de Lukaku. A partir du match à Eupen, 29e journée, ce schéma a été utilisé sans relâche. Pour le plus grand bonheur du néo-international.

Plus performant en 4-4-2 ?

Cette disposition en 4-2-2 lui conviendrait-elle donc mieux ? Les avis sont partagés. Roger Lukaku, le papa, est de cette opinion, se référant au passé de son rejeton en classes d’âge, où il brillait avec à ses côtés soit Bruno Barras, soit Olivier Mukendi. Les récents chiffrent du joueur ont beau abonder dans le même sens, on nuance en haut lieu au Parc Astrid.

 » On ne peut comparer un tandem Lukaku-Barras à un autre formé de Lukaku et Veselinovic « , souligne Werner Deraeve, ex-directeur du centre de formation de Neerpede.  » D’un côté, il est question d’un pivot avec un feu-follet qui gravite autour, comme à l’époque de Jan Koller et Tomasz Radzinski, alors que Lukaku et Veselinovic, eux, présentent des profils plus ou moins similaires. Et le topo n’est pas le même non plus avec De Sutter, qui est le plus fort dos au but. En réalité, un système ne veut pas dire grand-chose. Tout dépend de son animation. Un 4-5-1 peut être plus offensif qu’un 4-4-2 si l’on possède de bons infiltreurs. Par moments, c’est vrai que Rom a dû se débrouiller tout seul dans la surface de réparation mais ces dernières semaines, on observe une plus grande densité offensive chez nous. La preuve par le premier but à Lokeren : Lukaku centre depuis la limite du rectangle et Matias Suarez et Veselinovic sont tous deux au point de chute du ballon. Le seul véritable avantage par rapport au 4-2-3-1, c’est que le joueur le plus avancé est davantage libre de mouvements avec un comparse. Quand il n’y avait que lui pour faire le ménage devant, Rom n’osait pas trop s’aventurer ailleurs. Il restait la plupart du temps en position. A Lokeren, avec l’appui de Suarez, on l’a vu décrocher de manière habile. Comme sur la phase où il a balancé un service dans le dos de la défense et que l’Argentin s’est retrouvé nez à nez avec Barry Copa. Par rapport au début du deuxième tour, où il a connu une période de flottement, il a repris du poil de la bête. Il est beaucoup plus entreprenant et n’hésite pas à aller au duel. A un moment donné, on avait la nette impression qu’il ne se hasardait plus trop à dribbler, de peur de se faire déposséder du cuir. A présent, il provoque l’adversaire et pèse à nouveau de tout son poids. Pour moi, le Rom actuel, en pleine possession de ses moyens, est capable de tirer son épingle du jeu dans n’importe quel système. Dans cet ordre d’idées, je peux comprendre que l’entraîneur ait tiqué suite aux commentaires de bon nombre de suiveurs qui réclamaient qu’Anderlecht joue avec deux pointes. Comme Paul Van Himst qui insistait sur la titularisation de De Sutter à côté de Lukaku pour sortir du creux que l’équipe a connu en hiver. Bizarrement, il n’y a jamais eu le moindre commentaire en ce sens la saison passée, au moment où le 4-2-3-1 recueillait l’approbation de tous. Pourtant, à l’analyse, les chiffres étaient plus ou moins les mêmes qu’à l’heure actuelle. La différence, c’est qu’Anderlecht faisait cavalier seul alors qu’il se fait accrocher cette saison.  »

PAR BRUNO GOVERS – PHOTO: REPORTERS

 » Au départ, seuls les deux Manchester, Chelsea et Arsenal semblaient avoir les moyens de se le payer.  » (Christophe Henrotay)

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire