« Le résumé de notre saison »

Le derby vécu en compagnie de l’attaquant en revalidation.

éa sentait déjà méchamment la fin de saison, samedi, au Tivoli. Le match entre La Louvière et le Standard ne restera pas dans les annales: une qualité de jeu limitée, pas de suspense, peu de monde, guère d’ambiance. Les deux équipes n’ont plus rien à gagner ou à perdre dans ce championnat et cela s’est vu. A la manière du gouvernement, elles ne sont montées sur le terrain que pour expédier les affaires courantes.

Sport/Foot Magazine a suivi cette rencontre en compagnie de Frédéric Tilmant. Blessé depuis fin janvier, il ne rejouera probablement plus en championnat cette saison. Il manque aux Loups, le Fred! Là où ses coéquipiers ont raté plusieurs occasions valables, on devine qu’il en aurait sans doute mis une au fond. Les affrontements avec les Rouches, il a toujours adoré ça. Récit d’une heure et demie avec le chouchou du Tivoli.

18h00: début du match

Tilmant est arrivé seul au stade. Ses enfants ne sont pas passionnés par le foot et sa femme n’assiste plus aux matches. « Elle est trop déçue par la mentalité des supporters », avoue-t-il. « Elle a entendu tellement de critiques qu’elle a fini par être dégoûtée. Les insultes, nous y sommes habitués et nous devons les accepter parce qu’elles font partie du métier. Mais, pour une femme, c’est sans doute plus difficile à encaisser ».

Les supporters louviérois ne sont pas nombreux pour ce derby qui attire habituellement plus de monde. Et le nombre de Liégeois est limité également. « Je plains les supporters du Standard. Ils ne méritent pas une saison pareille. C’est tristounet. Quand on adore ce club, on est en droit de s’attendre à autre chose. Le comportement que les joueurs ont eu ici, en Coupe, est inadmissible. A 3-0 à Sclessin, ils ont arrêté de jouer, certains que la qualification pour les demi-finales était dans la poche. Ils nous ont permis de revenir à 3-1 et, chez nous, ils n’ont même pas mis le pied. A ce moment-là, ils étaient encore persuadés que rien ne pouvait leur arriver. Notre chance a été d’aborder le retour avec deux buts de retard. Si nous étions revenus de Sclessin avec une toute petite défaite dans nos valises, tout aurait été plus compliqué parce que les Liégeois nous auraient considérés plus sérieusement. Je n’aurais pas voulu être supporter du Standard ce soir-là. Toutes proportions gardées, nos fans ont eu plus de satisfactions que ceux des Rouches depuis quelques années. La Louvière n’a pas cessé de grandir. Nous nous sommes ancrés dans le foot belge. La licence est en poche et nous allons partir pour une quatrième saison d’affilée en D1. Nous avons un championnat sans souci et nous allons probablement disputer la finale de la Coupe. Attendons seulement des nouvelles de la fédération. Ce qui se passe avec Lommel, c’est n’importe quoi. Vous imaginez des Juniors en finale de la Coupe de Belgique? Notre football serait encore la risée de toute l’Europe ».

18h03: Van Steenberghe intervient brillamment devant Aarst

L’ancien gardien Alostois assume -une fois de plus- brillamment son boulot de dépanneur, en attendant le retour de Proto. « Ce qui me frappe surtout chez Van Steenberghe, c’est son professionnalisme. Les blessures, les relégations dans le noyau B et les gros problèmes qu’il a eus avec Leclercq n’ont jamais eu d’influence sur sa motivation. Il a toujours continué à bosser. Au niveau des qualités pures, Proto et Van Steenberghe se valent. Proto est plus vif, mais Van Steenberghe compense par son expérience. C’est rare, pour un club du niveau de La Louvière, de posséder deux aussi bons gardiens. Van Steenberghe sait qu’il doit travailler dur pour rester compétitif. Comme moi, il a tendance à prendre facilement du poids quand il reste inactif pendant une semaine. Il a dû faire des sacrifices énormes pour arriver à un poids acceptable. Et, croyez-moi, ce n’est pas évident mentalement de devoir toujours faire attention à ce qu’on mange. Si j’ai fait une carrière intéressante, je le dois notamment à ma silhouette. Les puristes disent que je ne suis pas un footballeur talentueux et ils ont raison. Pour compenser, je dois être très vif et, pour cela, ne pas peser trop lourd. J’ai des points communs avec Dante Brogno: la vivacité, le sens du but et le soutien inconditionnel du public. Nous sommes tous les deux des monuments dans notre région. Les principales différences sont que Brogno était plus doué au départ et qu’il a eu la chance de débuter beaucoup plus jeune que moi en D1″.

18h22: Aarst fait 0-1

Tout le stade crie au hors-jeu, mais Ernst l’annule. L’avance des Liégeois ne peut pas être discutée. « Nous ne méritons pas mieux. Depuis la première minute, le Standard a la mainmise sur le match. Il en veut beaucoup plus que La Louvière. Il presse haut et est bien installé dans notre camp. Walem joue dans un fauteuil. Je ne reconnais pas l’équipe que nous avons éliminée en Coupe. Bizarre parce que, ce soir-là, il y avait un enjeu, alors qu’il n’y en a pour ainsi dire aucun aujourd’hui. Nous ne parvenons pas à sortir et nous balançons de longs ballons qui ne rapportent rien. On veut arriver trop vite devant et on ne prend pas le temps de poser le jeu. C’est aussi le mérite du Standard et la preuve, chez nous, que Rivenet n’a pas été remplacé. L’entraîneur cherche une solution depuis le début de la saison, mais il ne trouve pas. Une chose me fait peur: un relâchement de toute notre équipe, maintenant que nous sommes sauvés, presque qualifiés pour la finale de la Coupe, et que la licence est en ordre. Ariel Jacobs devra trouver les mots justes pour remotiver tout le monde. J’imagine par exemple ce qu’il va dire aux joueurs pendant la mi-temps. Il va d’abord les laisser souffler pendant deux ou trois minutes, puis il va tout recadrer. Il va demander plus d’engagement et dire que, si on veut la victoire, il faudra aller la chercher ».

18h43: Ishiaku rate une occasion 3 étoiles

Le Nigérian est très mal inspiré face à Carini. « Il a pourtant de grandes qualités. Et il a tout l’avenir devant lui. Cette jeunesse, c’est le plus bel atout de La Louvière. Cooreman, Rogerio, Ishiaku, Kenmogne, Klukowski, c’est tout bon. Ils ont de la technique et savent garder un ballon. Mais ils ne peuvent pas tout révolutionner du jour au lendemain. Cooreman a eu besoin de plusieurs mois pour trouver ses marques et il prouve aujourd’hui qu’il a assez de qualités pour rehausser notre niveau de jeu. Passer de la D2 israélienne à la D1 belge ne se fait pas en quelques jours. Klukowski, c’est la meilleure surprise du championnat. Il est tellement bon que, si j’étais l’entraîneur, je ne le laisserais pas au back gauche. Avec sa frappe de balle et la façon qu’il a de conserver un ballon, il peut nous être utile à un poste plus avancé. Il faudrait que la direction garde toute l’ossature actuelle et y ajoute un ou deux renforts. A ce moment-là, nous pourrions viser la première moitié du classement. Cette saison, nous avons pris un an d’avance sur la plupart des autres clubs, grâce à l’affirmation de nos jeunes ».

19h08: Aarst fait 0-2

Le meilleur buteur du Standard met fin au suspense mais une grande partie du mérite de ce goal revient à Walasiak, qui impressionne Tilmant depuis le coup d’envoi. « Il y a plusieurs semaines qu’il me surprend agréablement. Il est le symbole de l’intégration de jeunes joueurs dans l’équipe du Standard. L’autre porte-drapeau de la jeunesse liégeoise, c’est bien évidemment Turaci. En tout début de saison, il a été le seul à tirer son épingle du jeu. Ce n’était pas un hasard. Après avoir passé deux ans à La Louvière, il connaissait le goût de la défaite et savait ce que c’était de devoir remettre chaque semaine l’ouvrage sur le métier. Mais il était entouré de joueurs qui n’avaient jamais eu l’habitude de perdre et se sont demandé comment sortir de cette spirale. Quand on a toujours joué le haut du tableau, on peut perdre les pédales au moindre contretemps. Il y avait plein de problèmes dans cette équipe en début de championnat. Walem était méconnaissable. Normal: il rentrait à peine de la Coupe du Monde et ça sautait aux yeux qu’il n’avait pas eu assez de vacances. En plus, on attendait énormément de lui après ce qu’il avait montré au Japon. Il s’est relâché, c’est humain. Idem pour Waseige. Mais on aurait dû lui laisser du temps. Ce n’était pas la bonne solution de se séparer aussi vite de lui. Un mauvais départ pend au nez de tout le monde ».

19h28: Carini dégage très mal une passe en retrait

Tilmant n’est pas sous le charme du gardien uruguayen. « Autant d’argent pour ça, c’est quand même étonnant. Son transfert, c’est une fois et demie le budget de La Louvière. Tant mieux si le Standard peut se le permettre, mais le problème, c’est que d’autres clubs dépensent sans compter puis se retrouvent en faillite. Lommel a encore pu transférer en décembre alors que ses joueurs n’étaient déjà plus payés. La licence a du bon: elle fait mal actuellement aux clubs en mauvaise santé, mais elle va remettre de l’ordre et tout le monde sera sur le même pied dans un an ou deux. Le championnat sera plus équitable ».

19h45: coup de sifflet final, 0-2

Depuis un quart d’heure, des gens quittent le stade. Sans avoir vibré. « Une fois de plus, nous avons été incapables de produire du spectacle à domicile. Nous avons joué nos meilleurs matches en déplacement. Cette défaite, c’est le résumé parfait de notre saison au Tivoli. On dit que le maintien se gagne à la maison. Dans notre cas, c’est tout l’inverse. Nous nous sommes sauvés sur le terrain de nos adversaires. Notre équipe n’est pas encore capable de faire le jeu. C’est dû aux nombreux jeunes qu’il a fallu intégrer. Il faut leur laisser le temps de prendre leurs marques et c’est long. En déplacement, nous pouvons nous permettre de baser notre jeu sur la contre-attaque. Comme nous avons une défense hermétique, nous risquons à tout moment de tuer l’adversaire sur une petite occasion. Nous ne pouvons pas nous permettre ce jeu-là devant nos supporters. Cette saison est la plus tranquille que nous ayons connue depuis l’accession à la D1, mais ce n’est certainement pas la plus enthousiasmante. Au niveau des émotions, ce n’est pas brillant du tout. Je ne me souviens que d’un seul match où les spectateurs ont vibré: contre Genk. Notre parcours lors de la première année en D1 avait été beaucoup plus beau pour les joueurs. Nous avions souffert et nous nous étions sauvés de façon complètement miraculeuse, mais c’était chouette. Au moins, il y avait de l’ambiance dans les tribunes ».

Pierre Danvoye

« Nous avons arraché le maintien en déplacement: pas logique »

« Je crains un relâchement d’ici la finale »

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