» LE REAL PERD L’EURO 2004 « 

Le Portugal a ressemblé la semaine passée au cimetière des éléphants du football européen : quelle est l’explication de cette hécatombe ?

Georges Heylens : Trois des grands de la planète football comptent en leur sein un ou plusieurs joueurs du Real Madrid. Et que constate-t-on ? Zinédine Zidane a peiné avec la France. David Beckham a raté son tir au but face au Portugal. Il a été beaucoup question de ce point de penalty en mauvais état. Mauvaise excuse. L’Anglais n’avait-il pas déjà raté la transformation d’un penalty face à Fabien Barthez ? Ce sont les résultats d’un manque de concentration. Raul était aux abonnés absents avec l’Espagne. Figo est le meilleur Madrilène mais ne supporte pas qu’on le remplace et a des relations difficiles avec son coach. Le Real Madrid avait terminé la saison sur les rotules. Ses stars n’ont pas ou redresser le tir au Portugal et leur prestige est écorné.

Avec le recul, et même si cela peut paraître bizarre, le Real est le grand perdant de l’EURO 2004. Si ses vedettes s’étaient distinguées, ce club aurait pu oublier ses déboires. Jacques Santini n’était pas en phase avec son groupe. Cela a donné un spectacle de plus en plus affligeant au fil des matches avec un répit contre la Suisse. Rien n’était clair. Ainsi, le cas Marcel Desailly a été mal géré. C’est une personnalité qu’on ne laisse pas sur le banc. Si c’était pour l’utiliser aussi peu, il valait mieux le laisser à la maison. A Chelsea, il a joué 114 minutes en six mois. C’est clair : ce joueur ne devait pas prendre part à l’EURO. La France a intérêt à se remettre en question. Une génération doit se retirer. La France doit ranger ses smokings et retrouver les bleus de travail. Zidane devrait être le leader d’une nouvelle vague. Il a parfois été question de son départ. Ce serait une erreur mais il doit se redéfinir.

L’Espagne ne parvient pas, depuis longtemps, à se dépasser avec son équipe nationale. L’Allemagne est au creux de la vague, joue de la même façon depuis la nuit de temps, développe un jeu tristounet. L’Allemagne organisera la phase finale de la prochaine Coupe du Monde. Elle a du pain sur la planche et doit enrichir d’urgence son capital technique. L’Italie se cherche et ne parvient pas à être offensive durant tout un match. Les vieux démons l’emportent à l’un ou l’autre moment. Avant, cela faisait la richesse italienne. Les temps ont changé. L’Italie est meilleure quand elle met le nez à la fenêtre. L’Angleterre a atteint le stade des quarts de finale et c’est le seul des grands qui ne m’inquiète pas. L’Angleterre a un style et des jeunes de qualité.

Que vous inspire la demi-finale entre le Portugal et les Pays-Bas ?

En principe, ce ne sera que du bonheur. Les Pays-Bas reviennent de loin, ont traversé des orages, surtout Dick Advocaat, mais l’équipe est là. De nouvelles vedettes sortent du lot comme le remarquable Arjen Robben du PSV Eindhoven. Le Portugal est un zeste plus offensif. Felipe Scolari a eu le culot de remplacer Luis Figo face à l’Angleterre. Cela n’a pas plu à Figo mais le Portugal s’est découvert encore plus fort. L’équipe nationale portugaise confirmera-t-elle le succès de Porto en Ligue des Champions ? Cette question symbolise la richesse portugaise. Je n’oublie pas l’organisation grecque, le brio tchèque et l’apport des Scandinaves. Là, le championnat bat son plein en été et le mois de juin est quasiment placé sous le signe de la fête dans le nord de l’Europe. L’EURO, pour eux, c’est une fête aussi.

Retour en Belgique : comprenez-vous le transfert de Grégory Dufer à Caen ?

Tout à fait. Il a raison de vivre autre chose, de se remettre en question. Si cela marche, il attirera le regard de grands clubs. Charleroi a fait revenir Toni Brogno au bercail. Il doit remettre les pendules à l’heure car sa saison à Westerlo ne fut pas spécialement brillante. Il a l’avantage de connaître la maison. A Mouscron, c’est presque un garage sale comme disent les Anglais. On vend tout et il y a l’épisode Steve Dugardein. Cela fait beaucoup après Luigi Pieroni, Mbo Mpenza, Stephen Laybutt. Je plains Philippe Saint-Jean mais, d’autre part, Mouscron ne peut pas semer au Futurosport sans faire confiance à ses jeunes.

Propos recueillis par Pierre Bilic

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