LE MYSTÈRE MOSES

Jusqu’en avril, Moses Simon, l’ailier nigérian de Gand, a été le bourreau des défenses. Cette saison, il n’inquiète plus personne. Que se passe-t-il ?

Acquis par Gand pendant la dernière trêve hivernale pour 800.000 euros, Moses Simon avait immédiatement apporté un plus aux Buffalos. Comme dans son club de provenance, l’AS Trencin, en Slovaquie, pour le compte duquel il avait inscrit 17 buts et délivré 14 assists en 39 matches.

A Oliva, pendant le stage hivernal de l’équipe gantoise, l’international espoir s’était révélé le plus explosif durant les tests. Face au FC Groningue, il s’était distingué par sa vivacité, ses dribbles mais surtout son efficacité devant le but. David Pollet l’avait spontanément comparé à Obafemi Martins.  » Il est ultra-rapide, il possède une excellente technique et se meut bien.  » Simon, lui, respirait la bonne.  » Je veux hausser le niveau de l’équipe et le mien, en espérant que Gand n’est pas mon dernier arrêt « , dit-il.

Par la suite, Simon allait éclater en championnat, avec 6 buts et 3 assists en 9 matches, de quoi interpeller quelques grands clubs européens mais Michel Louwagie, lemanager maison, s’empresse d’affirmer, dans la foulée, qu’il n’est pas question d’augmenter le joueur et que ses agents londoniens feraient mieux de lui établir un plan de carrière. Excédé par les supputations, il met la tête du Nigérian à prix pour 20 millions. Une déclaration qu’il ne manque d’ailleurs pas de regretter aujourd’hui.

A la mi-mars, Daniel Amokachi (ex-Club Bruges), sélectionneur intérimaire des Super Eagles, fait appel à celui qui fait figure de révélation de notre championnat. Puis les play-offs débutent. Simon est omniprésent, comme toujours, dans le premier match, contre Courtrai. Mais en marquant le 2-0, il reçoit un rude coup à la cheville. Après le match, il n’en déclare pas moins :  » Avec l’aide de Dieu, nous pouvons même gagner le titre. Je ne suis pas la star, ici, mais je veux le devenir un jour.  »

Gand se pare bel et bien des lauriers suprêmes mais la part du petit Nigérian (1m67) reste limitée, à cause de cette blessure. On revoit cependant son sourire contre le Standard, dans le match du titre, puisqu’il provoque un penalty qui permet à Renato Neto de marquer le 2-0.

RETARD PHYSIQUE

En guise de cadeau pour ce succès historique, Simon peut participer au Mondial U20 en Nouvelle-Zélande. Le coordinateur technique Gunther Schepens l’y accompagne. Il ne jouera que seize minutes. Ensuite, il dispose d’une semaine de vacances avant d’entamer la préparation, fatigué. HeinVanhaezebrouck tient compte de son état. Blessé aux ischiojambiers, Simon ne dispute quasiment aucun match complet durant la préparation. Il est victime de mystérieuses maladies et accuse un important retard physique.

En Supercoupe, contre le Club Bruges, il monte au jeu, en remplacement de son ami Nana Asare. Par contre, il est sur le banc contre Westerlo et son entrée en cours de jeu n’est pas concluante. Depuis, il ne s’exprime plus, ni des pieds ni des lèvres. Le joueur qui apportait un tel plus la saison passée semble avoir disparu de la surface de la terre.

Plus aucun défenseur ne redoute Simon, qui s’encastre généralement dans la double ligne défensive adverse. Il est titularisé lors de la deuxième journée, contre le KRC Genk, suite à la sanction extra-sportive frappant Benito Raman, coupable d’être sorti. Sa prestation est à nouveau lamentable et il est remplacé par Kenny Saief à la 65′.

La psychologue Eva Maenhout intensifie leur travail commun, dans l’espoir de lui rendre son assurance. Moses Simon est à nouveau titularisé lors du match à Waasland-Beveren – la première victoire en déplacement de Gand – mais il est délivré de ses souffrances sportives par Thomas Matton à l’heure.

 » Quand Simon renvoie plus souvent le ballon en arrière qu’en avant, c’est qu’il est mal dans sa peau. Il a été vraiment faible. Il n’est pas en forme « , tranche l’entraîneur.  » Pourtant, je ne lui confie jamais plus de deux missions fixes. Je n’ai pas l’intention de l’écarter car ça le ferait craquer mentalement. Simon possède assez de qualités pour faire la différence d’un ou deux dribbles. C’est pour ça que nous devons le ménager.  »

MINUIT MOINS CINQ

Louwagie et le président Ivan De Witte conservent leur calme : leur équipe se bat avec succès sur deux fronts, ce qui détourne l’attention, et ils savent aussi qu’un Simon frais peut constituer un atout particulier dans la suite du championnat et de la Coupe d’Europe. Il n’est évidemment plus question de transfert. Toutefois, la cellule sociale du club se penche sur le cas du joueur.

Moses vit seul dans un appartement. Le club a demandé un visa pour son amie mais l’affaire n’est pas simple. De Witte insiste pour qu’il bénéficie d’un suivi médical plus intense car d’après Vanhaezebrouck, Simon ne prend pas assez de repos, à cause de ses déplacements en équipe nationale.

Le premier véritable cri d’alarme résonne après le 2-2 à domicile contre Ostende.  » Son entrée au jeu a été dramatique « , estime Vanhaezebrouck.  » Il n’a pas conservé un seul ballon, n’en a pas récupéré, n’a exercé aucune pression vers l’avant, ce qui était pourtant sa mission. Il est maintenant minuit moins cinq. Il doit comprendre qu’il doit travailler davantage. Ce n’est pas une question de talent mais de mentalité et de condition.  »

Le lendemain, Simon et six autres joueurs du noyau A sont envoyés à Saint-Nicolas avec les espoirs, pour affronter Waasland-Beveren. Simon marque deux buts, contribuant largement à la victoire 0-3 mais il ne convainc pas vraiment.  » C’est à nous de retirer le maximum de lui « , commente Vanhaezebrouck.

Simon semble avoir atteint son plafond mais Gand le cache anxieusement. Le club espère que Simon jettera les bases d’une bonne condition physique pendant le stage hivernal, grâce à des matches supplémentaires. Le second tour et les PO1 constituent son examen de repêchage. La balle est dans son camp. Simon sait ce qu’il lui reste à faire : retrouver ses éclairs, ses dribbles rapides et son efficacité devant le but. Du début de l’année, il ne lui reste qu’une chose : son sourire. Il est beau mais il ne suffit pas.

PAR FREDERIC VANHEULE – PHOTO BELGAIMAGE

Le second tour et les PO1 constitueront son examen de repêchage.

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