Le mystère Capitalium

Mbo Mpenza a-t-il été escroqué ? Ou la vérité se situe-t-elle ailleurs ?

L’ancien footballeur MboMpenza a-t-il été victime d’une escroquerie de la part de la société CapitaliumConsult, dont le siège est situé à Lasne en Brabant wallon et qui se définit comme  » créatrice de sociétés patrimoniales sur mesure  » ? Il se serait vu proposer un investissement dans la conciergerie de luxe, ainsi que d’autres produits comme la gestion de patrimoine, et aurait confié une importante somme d’argent (dont l’intéressé ne veut pas révéler le montant, mais le chiffre de 340.000 euros a été avancé) qu’il tarde à revoir.

Une plainte a été déposée à la police fédérale de Nivelles. Une enquête a été ouverte pour blanchiment d’argent, escroquerie, abus de confiance, faux et usage de faux. Une perquisition a déjà eu lieu dans les locaux de la société. Des ordinateurs, dossiers et autres documents ont été saisis. VéroniqueVanAcker, l’administratrice de la société, continue à clamer son innocence. Elle va même plus loin :  » Mbo n’a pas d’argent bloqué au Luxembourg « , assure-t-elle.  » Il y a de l’argent bloqué au Luxembourg, mais il appartient à d’autres personnes, auxquelles on s’intéresse beaucoup moins qu’aux sportifs, plus médiatiques. Je suis toujours en très bons termes avec Mbo, tout comme avec les anciens dirigeants de l’Excelsior Mouscron. Mbo n’a d’ailleurs jamais fait aucune déclaration à la presse sur le sujet. Tout provient de Me Laurent Denis.  »

Si Madame Van Acker cite les anciens dirigeants de l’Excel, c’est parce que Capitalium Consult avait été appelé à la rescousse du club hurlu, alors qu’il était à l’agonie en novembre 2009.  » C’est simple : on a été convoqué au Canonnier un jeudi soir alors que le club allait perdre sa licence le vendredi « , se souvient-elle. Mbo Mpenza avait joué les intermédiaires.

Premières impressions favorables

 » C’est effectivement notre ancien joueur qui nous avait mis en contact avec cette société « , confirme JeanPierreDufermont, administrateur de l’Excel à l’époque et cousin du président PhilippeDufermont.  » Il semblait avoir une confiance aveugle en ces personnes, et je dois reconnaître qu’au premier contact, les impressions semblaient favorables. Ces gens disposaient d’un carnet d’adresses très intéressant. Ils allaient nous mettre en relation avec des investisseurs potentiels, dont un Français fortuné et un groupe d’investisseurs danois. Un groupe de soutien en faveur de l’Excel a même été créé, toujours à l’initiative de Mbo. Nous nous sommes rendus à trois ou quatre reprises au siège de la société, à Lasne, et là aussi, les impressions étaient favorables. Déjà, Lasne, c’est une commune huppée. Il y avait plusieurs personnes autour de la table, qui nous paraissaient crédibles.

J’ai même accompagné Madame Van Acker à l’émission Studio 1, un lundi soir. Elle y a répété qu’il y avait 70 ou 80 % de chances qu’une solution puisse être trouvée pour l’Excel. Je me suis gardé de trop intervenir, car je savais à quel point la situation du club était délicate. L’Excel était aux soins intensifs, il fallait un miracle pour qu’il s’en sorte. Mais bon, puisque cette dame était optimiste, je me suis efforcé de l’être également. La première piste qui nous a été proposée a débouché sur un feu de paille. Comme il fallait garder espoir, on s’est dit que cela ne pouvait pas réussir du premier coup. La deuxième piste n’a pas davantage débouché sur du concret. Il en fut de même pour la troisième, et là, j’admets qu’on a commencé à avoir de sérieux doutes. Mais Madame Van Acker continuait à insister. Deux heures avant qu’on ne décide de mettre la clef sous le paillasson, elle était encore au téléphone, à nous expliquer qu’elle avait déniché un nouvel investisseur potentiel. C’était de toute façon trop tard : Philippe ne pouvait plus avancer 100.000 euros de plus, pour tenir encore un petit moment, sous peine de mettre l’avenir de ses propres sociétés en péril. On a donc dû se résoudre à l’inéluctable.

On ne saura jamais si cette dernière piste proposée par Madame Van Acker avait plus de chances d’aboutir que les autres, mais j’ai mes doutes. Il y a deux ou trois mois, j’ai en effet reçu un appel d’un monsieur dont j’ai oublié le nom mais qui s’est présenté comme ayant été, en son temps, responsable commercial de Capitalium Consult. Il voulait me prévenir qu’il avait retiré ses billes de la société, car il avait l’impression que cela sentait mauvais, et m’a demandé d’avertir également Mbo Mpenza. Ce que j’ai fait. Je n’ai jamais eu de réponse de la part de Mbo et je n’ai pas insisté. Après tout, il est libre de placer son argent où il veut, je n’ai pas à intervenir dans ce domaine. Mais, après coup, je ne suis qu’à moitié étonné des déboires dont il est victime. « 

Charognards ou tentatives de survie désespérées ?

Michel Lecomte se souvient de l’apparition de Véronique Van Acker à Studio 1. Là aussi, Mbo Mpenza avait joué le rôle d’intermédiaire.  » C’est via son association SixièmeSens qu’il nous avait proposé d’inviter cette dame sur le plateau. Comme l’avenir de l’Excelsior intéressait beaucoup notre public à l’époque, nous avons estimé que c’était une bonne idée de lui donner la parole. Sur le plateau, l’optimisme était de rigueur. Madame Van Acker était accompagnée par Jean-Pierre Dufermont, qui a tenu des propos rassurants également, mais je ne sais pas s’il y croyait lui-même. J’avais l’impression qu’il essayait surtout de donner une image positive du club pour essayer, grâce à cette publicité qui lui était accordée à l’écran, d’intéresser d’autres investisseurs potentiels. La situation du club était à ce point désespérée que les dirigeants essayaient de s’accrocher au moindre espoir qui se profilait. J’ai appris durant mes vacances, en lisant la presse, que Mbo Mpenza se serait laisser abuser. Je n’en sais pas plus.  »

L’avocat Edward Van Daele, ancien président et ancien administrateur de l’Excelsior, n’a jamais cru à la crédibilité de Capitalium Consult.  » Il suffit de consulter le site internet de cette société (NDLR : actuellement  » temporairement clos pour des raisons administratives « ) pour se rendre compte qu’elle ne présente aucune garantie de sérieux « , affirme-t-il.  » Quel patrimoine a-t-elle déjà géré avec succès ? Je n’ai pas pris part aux négociations qui ont eu lieu entre Capitalium Consult et l’Excelsior Mouscron : j’avais déjà quitté le club à ce moment-là. Ce sont d’ailleurs les flirts successifs entre le club et différentes sociétés qui m’apparaissaient peu fiables qui m’ont incité à me retirer. Je me souviens d’avoir déclaré, lors d’une interview accordée à la chaîne régionale NoTélé : – L’Excelsiorestcliniquementmort, leclubn’intéresseplusquelescharognards ! Les faits m’ont, malheureusement, donné raison.  »

BenoîtRoul, qui était administrateur de l’Excelsior à l’époque et qui a aujourd’hui quitté Mouscron pour aller s’établir en Espagne, n’a pour sa part jamais eu l’impression d’avoir affaire à des escrocs dans le cas de Capitalium Consult.

 » Tout est parti d’un coup de fil de Mbo Mpenza « , se souvient-il.  » Il nous a demandé si cela nous intéressait de rencontrer des gens qui pouvaient nous venir en aide. Au point où nous en étions, nous étions prêts à écouter tout le monde. En outre, comme cela venait de Mbo, cela nous paraissait être un gage de sérieux. Personnellement, je n’ai pas à me plaindre du travail réalisé par Capitalium Consult. Je ne compare pas du tout ce cas-là avec celui d’ OlivierDeGrox (NDLR : qui s’est toujours défendu d’avoir voulu escroquer le club mais contre qui l’Excel a porté plainte). Ce monsieur-là nous avait dit, en résumé : – Je vais vous donner de l’argent et je vais reprendre l’Excelsior ! Avec Capitalium Consult, il n’a jamais été question d’argent. Cette société allait simplement nous mettre en rapport avec des investisseurs potentiels, en utilisant son carnet d’adresses bien fourni. Sur le plan juridique, cela a plutôt bien fonctionné puisqu’on a gagné tous les recours introduits face à l’Union belge pour retarder l’échéance. Sur le plan financier, je crois que ces gens ont fait ce qu’ils ont pu. Mais il n’y avait malheureusement plus rien à faire. En fait, l’Excelsior était déjà mort au moment où Philippe Dufermont l’a repris, mais on l’ignorait. On l’a su plus tard, lorsque l’Inspection Spéciale des Impôts (ISI) a ouvert une enquête pour des fraudes qu’auraient commises nos prédécesseurs à la tête du club. On aurait découvert une dette vis-à-vis du précompte qui datait encore de 1997 ! Il y avait un risque, pour Philippe, de devoir payer cinq millions à l’ISI, et ce risque, on s’est senti obligé de le mentionner auprès des candidats-investisseurs qui se manifestaient. C’est cela, et uniquement cela, qui a conduit à la mort de l’Excel. Sans cela, le club existerait encore.  » l

par daniel devos – photos: reporters

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