Le Maldini gantois

Le jeune flanc gauche est arrivé de Sochaux, mais il est bien Belge. Il est Diablotin depuis les -19 ans.

Il est l’une des révélations de ce début de saison : MassimoMoia, 20 ans, débarqué à La Gantoise en provenance de Sochaux, n’est pas Français mais Liégeois. Voici 15 jours, cet arrière gauche a débuté dans l’équipe nationale Espoirs de JeanFrançoisdeSart à l’occasion du match amical face à la Suisse, à Courtrai. Auparavant, il avait déjà évolué en -20 et -19 (notamment lors du tournoi qualificatif au Championnat d’Europe organisé à Renaix, Tournai et Tubize voici deux ans).

Si on commence seulement à le découvrir en Belgique, c’est parce que ce jeune homme qui joua à La Préalle (Herstal) et à Visé durant ses plus tendres années a été essentiellement formé à l’étranger : d’abord au MVV Maastricht pendant une saison (de 15 ans et demi à 16 ans et demi), puis à Sochaux durant trois saisons.  » Maastricht n’est pas très éloigné de Liège, une trentaine de kilomètres à peine. C’est un bon club formateur où évoluent beaucoup de jeunes Belges. Mon père me conduisait tous les jours à l’entraînement et me ramenait à la maison le soir. C’est là que j’ai été repéré par des clubs français. D’abord par Montpellier, puis par Sochaux. J’ai finalement opté pour le club de Montbéliard. Là, mon mode de vie a changé radicalement. J’ai forcément dû quitter ma famille pour loger au centre de formation la première année, puis emménager dans un appartement lorsque j’ai intégré l’équipe Réserve qui évoluait en CFA (Championnat de France Amateur). Mes chances de devenir titulaire en Ligue 1 étaient minces. En France, on accorde beaucoup d’importance au positionnement défensif. Le jeu devient très fermé, et la priorité est de ne pas encaisser. J’ai l’impression que le catenaccio s’est déplacé de l’Italie vers la France. Dans ces conditions, on hésite à lancer un jeune défenseur inexpérimenté dans le grand bain. Personnellement, j’aspirais à rentrer au pays, à me faire connaître en Belgique et à me rapprocher de la famille. J’ai pris un manager belge : RogerHenrotay, dont MarouaneFellaini et JonathanLegear m’avaient dit le plus grand bien. Quatre clubs se sont intéressés à moi : le Germinal Beerschot, Charleroi, Mons et Gand. MichelDeGroote est venu me voir à Sochaux et le discours de MichelLouwagie m’a paru ambitieux. J’ai donc rejoint les Buffalos et je ne le regrette pas : je pourrai beaucoup apprendre d’un grand entraîneur comme TrondSollied, dont le style de jeu me convient bien. Mais je ne regrette pas non plus mes expériences aux Pays-Bas et en France. Sochaux figure parmi les trois meilleurs centres de formation de l’Hexagone. Ce que j’ai appris là-bas, je n’aurais sans doute pas pu l’apprendre en Belgique « .

 » Mon but au Brussels, c’est un peu mon style  »

Massimo a crevé l’écran lorsqu’il a inscrit un but exceptionnel au Brussels, lors de la troisième journée de championnat : il avait carrément traversé tout le terrain, ballon au pied, pour aller tromper PatrickNys. Ce but est-il l’illustration parfaite de son style de jeu ?  » Oui, on peut le dire. Lorsque je suis arrivé à Gand, j’ai d’abord observé comme cela se passait, et comme j’étais aligné en qualité de défenseur, je me suis surtout efforcé de remplir ma tâche défensive. Au fur et à mesure que la confiance montait, j’ai pris plus d’initiatives offensives. Au stade Edmond Machtens, lorsque j’ai récupéré le ballon, ma première intention fut d’aller de l’avant. Le coach avait demandé, à la mi-temps, de s’engouffrer dans les espaces qui se dessinaient. J’ai constaté que je progressais, ballon au pied, et j’ai continué. Le chemin du but s’est ouvert. Vous connaissez la suite « .

Comme son nom l’indique, Moia est d’origine italienne. Son grand-père, comme tant d’autres à l’époque, a émigré en Principauté pour travailler dans les mines. Son père est né en Belgique et a suivi une autre orientation : il est devenu un homme d’affaires, mais a gardé la nationalité italienne. Sa mère est Belge. Massimo, lui, est donc Diablotin. Mais il a connu à la fois la formation néerlandaise et française. Des différences ?  » A Maastricht, c’était très technique mais aussi très physique. A Sochaux, comme un peu partout en France, on insistait beaucoup sur la tactique et le mental. Mais c’est difficile de comparer, car je n’ai pas connu les deux écoles de jeunes dans les mêmes conditions. A Maastricht, je dormais encore tous les jours à la maison et je n’avais qu’un entraînement par jour. A Sochaux, j’avais deux entraînements par jour, plus l’école et les devoirs durant la soirée, et j’étais séparé de ma famille. La première saison fut dure, puis je me suis habitué. A la fin, j’ai parfois pu m’entraîner avec l’équipe Première, mais je n’ai pris place sur le banc qu’une seule fois, sans monter au jeu : c’était contre Dijon, en Coupe de France. Même en Réserve, je côtoyais souvent des stars qui étaient écartées ou revenaient de blessure. Lorsqu’on a affronté Monaco, j’ai croisé ChristianVieri. Il revenait de blessure et on lui avait demandé de retrouver le rythme en Réserve, mais il a refusé de monter au jeu. Face à Lyon, en quarts de finale de la Coupe Gambardella (la Coupe de France des jeunes), j’ai eu la chance d’affronter KarimBenzema et HatemBenArfa, qui cartonnent actuellement. Ils sont nés en 1987, comme moi « . Et comme SébastienPocognoli, son concurrent en équipe nationale Espoirs (et peut-être plus tard chez les Diables Rouges).

 » Difficile de me persuader que je pouvais défendre  »

La rivalité entre les deux arrières gauches risque donc de perdurer tout au long d’une carrière qui ne fait encore que débuter. A moins qu’ils évoluent ensemble pour former un flanc gauche composé de deux Liégeois d’origine italienne ? Face à la Suisse, Pocognoli a joué comme milieu gauche lorsque Moia est monté au jeu comme arrière gauche.  » Moi, j’aurais fait l’inverse, mais c’est le coach qui décide « , affirme Massimo.  » Je pense que Poco préfère le poste d’arrière gauche. Et moi, cela ne me dérange pas d’évoluer un cran plus haut « . Ce qu’il a déjà fait, autrefois.  » En fait, à Maastricht, j’évoluais comme… centre-avant. J’inscrivais pas mal de buts. A Sochaux, il a un jour manqué un latéral gauche, et comme je suis gaucher, l’entraîneur m’a essayé à ce poste. J’y suis resté. Depuis lors, j’ai alterné entre le poste de milieu gauche et celui d’arrière gauche. Un peu comme GuillaumeGillet, j’ai eu du mal, au départ, à me persuader que je pouvais remplir un rôle défensif. Tacler ne m’a jamais posé de problèmes, je le faisais déjà lorsque j’évoluais comme attaquant. Mais j’ai dû apprendre le positionnement, pour assurer la couverture du défenseur central ou me protéger contre les longs ballons expédiés dans mon dos. J’ai toujours conservé mes qualités offensives. A Sochaux, la saison dernière, j’ai encore inscrit sept buts alors que j’étais défenseur latéral « .

Massimo est tombé dans la marmite du football depuis qu’il est tout petit. Son père a joué en D3 (à Sprimont notamment) et a toujours été très actif dans le milieu du ballon rond.  » Il a présidé plusieurs petits clubs, comme La Préalle et Milanello. Ma voie était donc toute tracée. Je l’ai suivi au stade. Et aujourd’hui, c’est lui qui me suit. A Sochaux, il venait tous les 15 jours, lorsqu’on jouait à domicile. Cette saison, il est partout : à domicile comme en déplacement « .

Son plan de carrière ?  » D’abord, apprendre un maximum en Belgique. Mais je ne cache pas que je rêve d’évoluer, un jour, dans le pays de mes ancêtres. RobertoBaggio a toujours été mon idole, lorsque je jouais comme attaquant. Et, parmi les défenseurs, j’admire PaoloMaldini. Avant de passer en défense centrale, il a évolué comme latéral gauche. J’essaie de m’en inspirer. Sur le terrain, il est élégant tout en ayant un tempérament de guerrier. En plus, il a de longs cheveux, comme moi…  »

par daniel devos – photo: belga

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