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LE LEGIA DANS TOUS SES ÉTATS

Il y a 21 ans que le Legia Varsovie ne s’était plus qualifié pour la Ligue des Champions. Il y est arrivé sous la direction de Besnik Hasi, avec le concours de Geert Emmerechts, Bart Meert, Steven Vanharen, Vadis Odjidja, Thibault Moulin et Steeven Langil. Visite au Stade de l’Armée Polonaise où se rendront bientôt le Borussia Dortmund, le Real Madrid et le Sporting Lisbonne.

Vendredi, 13 heures. Au premier étage du Stade de l’Armée, Besnik Hasi s’adresse à la presse en prévision du match de championnat qui doit opposer le Legia Varsovie à Termalica, le lendemain.

Hasi a l’air tendu. Il dit être satisfait des transferts et du fait d’avoir pu conserver le meilleur buteur, Nemanja Nikolics et surtout le capitaine, Jakub Rzezniczak.  » J’ai vu de bonnes choses et beaucoup d’engagement à l’entraînement cette semaine. J’espère que nous reproduirons cela en championnat car nous avons déjà perdu beaucoup de points.  »

On l’interroge surtout au sujet de ses choix. Ses réponses sont claires :  » Je sélectionne les 18 joueurs qui, à mes yeux, se battent le plus. Il y a de la concurrence et donc des déçus. Je ne compte que sur ceux qui sont prêts à tout donner pour le club. Les autres sont sur le banc ou dans la tribune. S’il y a des stars, c’est sur le terrain qu’elles doivent le montrer.  »

Hasi quitte la salle par une porte latérale et nous nous adressons à Kacper Ruszczak, qui écrit pour le site internet et les réseaux sociaux d’un club qu’il connaît forcément très bien.

TOUT EST DIFFÉRENT

La qualification du club pour les poules de la Ligue des Champions, ce qui n’était plus arrivé depuis 21 ans, a permis à Besnik Hasi de souffler un peu. Mais avant cela, il était très critiqué. Depuis le début du 21e siècle, jamais le club n’avait pris un aussi mauvais départ que sous sa direction. Il avait perdu la Supercoupe face à Lech Poznan (1-4), avait été éliminé en coupe par Gornik Zabrze, un club de D2, et n’avait remporté que deux de ses sept premières rencontres de championnat. Dur pour un club qui avait remporté cinq des six dernières éditions de la coupe et trois des quatre derniers championnats. Selon Kacper Ruszczak, Hasi a pourtant des circonstances atténuantes à faire valoir.

1. L’équipe qu’il avait à sa disposition en début de saison n’était même pas à moitié complète tandis que le programme était chargé.

 » La Super Coupe a eu lieu le 7 juillet, en plein Euro « , dit Ruszczak.  » Il n’y a qu’en Pologne qu’on voit ça ! Le championnat a repris une semaine plus tard, sans les cinq sélectionnés pour l’Euro. Nous avions un match tous les trois jours et Hasi n’avait pas le temps d’enseigner à ses joueurs ce qu’il voulait voir. L’objectif principal, c’était la qualification pour les poules de la Ligue des Champions et nous l’avons atteint. La mini-trêve pour cause de matches internationaux devrait avoir permis à Hasi de remettre certaines choses en place. Le jeu et les résultats devraient s’en ressentir.  »

2. Son prédécesseur, le Russe Stanislav Tcherchesov, était très différent de lui, en tant qu’entraîneur et en tant qu’homme. Il avait réussi le doublé l’an dernier et était très populaire.

 » Il est parti en raison de divergences de vues avec le club mais les fans l’adoraient. Il était jovial, drôle, transformait les conférences de presse en show et obtenait de bons résultats. Comme son prédécesseur, Henning Berg, il défendait toujours publiquement ses joueurs. Hasi est différent, il n’a pas peur de critiquer. Il vient par exemple de déclarer qu’il ne voulait que des battants. Les autres n’auraient jamais dit cela. Tout le monde doit donc s’habituer. Le style de jeu est totalement différent également. Avant, le Legia pressait l’adversaire dans sa moitié de terrain. Hasi, lui, veut construire. Cela demande une adaptation et des joueurs plus créatifs.  »

Il les a puisque Vadis Odjidja, Thibault Moulin et Steeven Langil l’ont rejoint.  » Moulin est arrivé très tôt et a déjà délivré cinq assists « , dit Ruszczak.  » C’est un joueur important et notre meilleur transfert jusqu’ici. Langil a montré qu’il était rapide et habile mais il doit être plus régulier. Odjidja est arrivé tard et en surpoids. Après dix jours, cela allait déjà mieux. Il est différent des médians que nous avions avant, des gars forts sur l’homme mais qui, offensivement, n’apportaient rien.  »

LE CHAGRIN DE VADIS

Avant l’entraînement, nous rencontrons Vadis Odjidja dans les loges. Quand on évoque son début de saison difficile, il laisse libre cours à sa peine.  » Peu de gens le savent mais ma mère est décédée d’un cancer le 13 juillet. Depuis cinq mois, je savais qu’il n’y avait plus rien à faire. Dès que j’avais un moment de libre, je rentrais en Belgique pour être à ses côtés. La dernière semaine, je ne l’ai pas quittée.  »

On sent bien qu’il n’a pas encore fait son deuil et il se raccroche à la foi. Don’t worry. God is always on time. Trust Him, peut-on lire sur sa page facebook. Cela l’aide à relativiser les problèmes et à retirer du positif de chaque situation.  » Sans cela, je ne serais pas ici, je pleurerais dans mon lit.

Ma mère était la personne la plus importante de ma vie. Je continue à prier et à lui parler matin et soir. Il y a cinq ans, ma belle-mère est décédée des suites de la même maladie. Cela rend les choses plus pénibles encore.  »

Il se raccroche aussi au football, ce qu’il fait de mieux et aime par-dessus tout dans la vie.  » Je suis heureux d’avoir retrouvé le terrain, cela m’aide à remettre les idées en place. J’essaye d’être le plus concentré possible et de donner le meilleur de moi-même. Je découvre un nouvel environnement et j’ai peu joué au cours des dernières saisons mais ça commence à aller mieux.  »

Son passage à Norwich City, en 2014, ne lui a pas apporté ce qu’il en attendait.  » C’est toute une histoire. J’ai souvent été blessé, un nouvel entraîneur est arrivé et a amené ses propres joueurs, plus chers. On m’a fait jouer sur le flanc, ce qui ne correspond pas à mes qualités et le jeu anglais est plus direct, même s’il me plaisait. Nous jouions le bas du tableau, nous devions subir le jeu. Ce fut difficile mais je me suis battu jusqu’au bout.  »

Le Standard est venu aux nouvelles par l’intermédiaire de Christophe Henrotay mais il a choisi de retrouver Besnik Hasi au Legia. Contre Dundalk, lors des barrages pour l’accès à la Ligue des Champions, il a délivré un assist. A 27 ans, il va découvrir cette compétition.  » Mais le plus important, c’est le championnat. Je suis dans la force de l’âge et je vais tout faire pour atteindre mon meilleur niveau. Je le dois à ma mère et aux autres membres de ma famille.  »

Besnik Hasi ne veut toujours pas accorder d’interview. Nous le lui demandons pourtant depuis qu’il a quitté Anderlecht. La saison dernière, il en a pris plein la figure au Parc Astrid mais son nouveau club est qualifié pour la Ligue des Champions tandis que le Sporting doit se contenter de l’Europa League. Il n’empêche qu’il préfère garder pour lui son passé en mauve et ne parlera pas non plus de sa nouvelle expérience. Il veut consacrer toute son énergie à son travail et limite ses communications avec la presse au strict minimum.

LE COACH QU’IL FALLAIT

Pas question non plus de nous adresser à ses adjoints belges, Geert Emmerechts, Bart Meert ou Steven Vanharen. Même pas pour faire une photo. Nous nous adressons donc au directeur sportif, Michal Zewlakow, qui fut l’équipier de Hasi à Anderlecht et le connaît forcément très bien.

 » Je pense que c’est quelqu’un qui encaisse facilement les coups mais qui n’est pas insensible à la critique « , dit-il.  » Je pense d’ailleurs que ça vaut pour tout le monde. Nous commettons tous des erreurs, surtout au début, mais ce n’est pas pour cela que nous sommes responsables de tout ce qui arrive et Besnik est quelqu’un qui croit en ce qu’il fait. Je crois que cela peut le rendre plus fort pour entamer une nouvelle aventure et démontrer ailleurs que ses idées peuvent fonctionner.  »

Il insiste sur le fait que l’engagement de Hasi a fait l’unanimité au sein du club.  » Il n’est pas le premier avec qui nous avons discuté mais les propriétaires et les dirigeants ont vite compris que c’était l’homme qu’il nous fallait. Besnik a du caractère mais il est flexible : il sait que ce club veut progresser pas à pas et il s’adapte. C’est un fédérateur, c’était déjà le cas dans le vestiaire.

Il s’entendait bien avec les joueurs des Balkans mais aussi avec les Flamands et les autres. Il est devenu entraîneur principal d’Anderlecht qui est un club sur lequel nous prenons exemple, surtout en matière de formation, d’intégration et de revente des jeunes. Il nous apporte son expérience en la matière. De plus, il parle cinq langues et est très correct. Le président l’a adoré dès la première réunion.  »

Depuis la qualification pour la Ligue des Champions, Hasi respire. Il n’empêche que ce samedi-là, le Legia doit battre Termalica. Le championnat a mal débuté mais rien n’est perdu. De plus, après la phase classique, on dispute des play-offs avec huit et les points sont divisés en deux.  » L’objectif principal, désormais, c’est le titre « , dit Zewlakow.

 » Tout ce que nous prendrons en Ligue des Champions sera du bonus. Nous n’avons plus d’excuse : l’équipe est au complet, nous comptons vingt joueurs de même niveau. Besnik voulait des joueurs créatifs et je pense qu’avec Moulin, Odjidja, Radovic, Kazaiszwilli et Guilherme, nous sommes parés. A lui de montrer ce qu’il peut faire avec eux. Ce n’est qu’à partir de maintenant que les supporters peuvent donner leur avis sur le coach.  »

En Ligue des Champions, le Legia est tombé dans un groupe avec le Borussia Dortmund, le Real Madrid et le Sporting Lisbonne. Ne risque-t-il pas de terminer avec zéro point, comme Anderlecht à l’époque de MichalZewlakow ?  » Le football a changé « , dit celui-ci.  » Si les Gallois s’étaient dit cela, ils ne seraient pas allés en finale de l’Euro. Tout ce que les supporters demandent, c’est que les joueurs se battent. J’espère que nous pourrons causer une ou deux surprises.  »

UNE SITUATION EXPLOSIVE

Samedi dernier, face à Termalica, le Legia a eu la possession du ballon sans parvenir à faire tomber le mur qui se dressait devant lui. Il a concédé deux penalties et n’a sauvé l’honneur qu’à la dernière minute (2-1). Avec neuf points sur vingt-quatre, il n’occupe que la douzième place, à sept points des leaders. Kacper Ruszczak se rend bien compte que la situation est explosive.

 » Les supporters sont fâchés, la presse est indignée. Tout le monde veut la tête de Hasi. Le jeu manque de qualité. Nous avons eu le ballon pendant 70 % du temps mais nous n’en avons rien fait. On dirait que rien n’a changé.  »

PAR CHRISTIAN VANDENABEELE À VARSOVIE – PHOTOS PG

 » L’objectif, c’est le titre. Tout ce qu’on prendra en Ligue des Champions, ce sera du bonus.  » MICHAL ZEWLAKOW, DIRECTEUR SPORTIF DU LEGIA

 » Peu de gens le savent mais ma mère est décédée d’un cancer le 13 juillet. Depuis cinq mois, je savais qu’il n’y avait plus rien à faire.  » VADIS ODJIDJA

 » Les fans sont fâchés, la presse est indignée : tout le monde veut la tête de Hasi . » KACPER RUSZCZAK, RESPONSABLE DU SITE INTERNET DU LEGIA

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