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Le King cherche un nouveau trône

Pour la troisième fois, LeBron James, le principal protagoniste de la NBA, va décider où il jouera la saison prochaine. Comme The Clash, il se pose une question : should I stay or should I go ?

Les Cleveland Cavaliers viennent de perdre leur dernière manche de la finale de NBA. Dans le vestiaire, LeBron James (33) a les pieds dans un seau de glaçons, ses genoux sont enveloppés dans des poches de glaçons, sa main droite aussi. Un peu plus tard, en conférence de presse, il admettra qu’un métacarpien est fracturé.

Tout cela parce que, après la première défaite en finale, le King a passé sa colère sur un tableau-marquoir. Cette fois, il est très déçu et se cache le visage derrière une serviette. Pour la troisième fois en quatre ans, il a dû laisser sa couronne à Golden State. Cette fois, il a même perdu 4-0.

James est donc confronté à un choix : soit il tente de mener une nouvelle guerre pratiquement perdue d’avance face aux Warriors avec une nouvelle armée de Cavaliers, soit il se cherche un nouveau royaume.

Comme en 2010, lorsque LBJ a quitté Cleveland pour Miami – The Decision 1.0. Ou en 2014, lorsqu’il est revenu dans sa ville natale – The Decision 2.0. Le voici à présent à l’heure d’une troisième décision et c’est devenu le sujet de conversation favori des médias et des fans.

À Las Vegas, on peut même parier sur l’issue, tandis que les autres joueurs de NBA abordent ouvertement le sujet sur les réseaux sociaux. Après la quatrième manche de la finale, d’autres ont même lancé une offensive de charme sur Twitter avec des images retouchées de LeBron sous le maillot de leur club.

Au cours des derniers mois, dans certaines villes, des panneaux publicitaires financés par des entreprises locales ou des fans aisés ont vu le jour. Ce fut le cas à Miami ( » You’re welcome LeBron, Love Miami. « ), à Philadelphie ( » #PhillyWantsLeBron. Complete The Process. « ), à Los Angeles ( » Forget the process, we win banners. #LABron. « ), ou encore à New York ( » James 23. King of New York. Prove it. « ). Mais Cleveland n’a pas tardé à riposter ( » There’s no place like home. This is Home. « )

A Cleveland, dans un rayon d’un mile autour de la salle de basket, le business de l’horeca a progressé de 13 % et l’emploi de 24 % grâce au King.

Une méga-star susceptible de booster toute une ville

Ces campagnes ne sont pas le fruit du hasard. LeBron James est une méga-star qui peut booster tout un club mais aussi toute une ville. Lors de ses deux passages par Cleveland (2003/10, 2014/18) il a transformé une ville industrielle grise en une cool place to be.

Sa présence a attiré des investisseurs qui ont rendu un nouveau visage au centre-ville, en construisant notamment un nouveau palais des congrès d’une valeur de 400 millions d’euros. Dans un rayon d’un mile autour de Quicken Loans, la salle de basket, le business de l’horeca a fait un bond de 13 % et l’emploi a progressé de 24 %.

Les Cavs eux-même ont vu la différence : lorsque James est parti à Miami, en 2010, le nombre moyen de spectateurs est passé de 19.745 à 17.390. Après son retour, en 2014, il a grimpé à 20.562. En 2010, la valeur du club a chuté de 476 à 355 millions de dollars. Elle est désormais de 1,32 milliards de dollars mais un départ de LBJ lui ferait perdre 25 % tandis que son nouveau club pourrait s’attendre à une progression du même ordre.

Le tout est de savoir si James partira bel et bien. LeBron a quatre possibilités : 1) Dénoncer le contrat d’un an qu’il lui reste à prester chez les Cavaliers et devenir unrestricted free agent. Dans ce cas, il serait libre de signer ailleurs dès le 1er juillet ; 2) Lever sa players option à Cleveland, ce qui lui permettrait d’empocher 30 millions d’euros en un an ; 3) Prolonger de trois/quatre/cinq ans son contrat à Cleveland, ce qui est peu probable car le plafond salarial en NBA va probablement augmenter et, en 2019/20/21, James pourrait signer un max contract plus lucratif ; 4) Lever son option mais obliger Cleveland à l’échanger contre des joueurs de l’équipe qu’il souhaite rejoindre.

Les Cavs ne seraient donc pas les mains vides et cela offrirait plus d’options au King car peu de clubs ont des possibilités sous le plafond salarial. S’ils offrent un contrat de 30 millions d’euros à James, ils vont percer celui-ci et être obligés de payer une luxury tax. Un échange leur permettrait de se débarrasser de quelques gros contrats et d’engager James tout en restant sous le salary cap. Outre l’aspect financier,

3 autres facteurs peuvent jouer un rôle dans The Decision 3.0

1.Son épouse, Savannah, et ses trois enfants, LeBron jr. (10), Bryce (10) et Zhuri (3). James, fils d’une mère-célibataire très jeune, est un père très attentif et il a déjà dit que le choix de la famille serait déterminant. Son ex-équipier et meilleur ami Dwyane Wade confirme : LeBron optera pour le club/la ville où sa famille sera heureuse et où LeBron jr. (13), également très talentueux, pourra le plus évoluer. Le rêve de James, c’est de jouer un jour avec son fils. Pour cela, il faut qu’il joue jusqu’à 39/40 ans et que Bronny passe en NBA à l’âge de 19/20 ans, soit après la high school ou après un an d’université.

2.En plus du basket, The King construit un empire dans le monde du show-business. Sa firme, la SpringHill Entertainment Company, a même déjà produit plusieurs programmes de télévision. James n’en fait pas mystère : après sa carrière, il veut devenir propriétaire d’un club de NBA. Il est donc possible qu’il opte pour une big market city, ce qui lui permettrait de suivre de près tous ses projets actuels et futurs.

3.L’aspect sportif, à savoir l’ambition de dépasser un jour The Goat, The Greatest of All Time, Michael Jordan. LeBron est, certes, considéré comme le meilleur joueur de sa génération – il l’a encore prouvé lors des derniers play-off avec des moyennes extraordinaires de 34 points, 9 rebonds et 9 assists – mais beaucoup lui préfèrent encore Jordan. James a en effet perdu six finales et ne compte que trois titres en NBA (deux avec Miami, un avec Cleveland) alors que Jordan a remporté six finales sur six.

LeBron possède certes de nombreux records individuels en NBA – et la liste pourrait encore s’allonger avant la fin de sa carrière – mais pour être considéré comme The Goat, il lui manque des titres. Au moins trois pour égaler Jordan. Si, en plus de ses records individuels, il parvient à jouer au moins douze finales, la balance penchera en sa faveur. Ce n’est pas un hasard si, après la quatrième manche de la dernière finale, il a déclaré :  » I still want to be in championship mode. « 

Deux obstacles se dressent devant lui

LBJ aura 34 ans à la fin de l’année et une bonne partie de son avenir est derrière lui. Il doit donc pouvoir compter sur des stars plus jeunes qui lui permettent de souffler pendant la phase classique et d’arriver en forme au moment des play-offs.

Ces joueurs doivent lui permettre de vaincre le deuxième obstacle, les tout puissants Golden State Warriors, qui ont décroché trois titres en quatre ans. S’ils parviennent à conserver leurs Fab Four ( Stephen Curry, Kevin Durant, Klay Thompson et Draymond Green) – ce qui n’est pas du tout certain à moyen terme – James devra également veiller à construire une super-équipe autour de lui pour renverser la dynastie. Et même si les Warriors se désunissaient, Boston, Philadelphie (avec de jeunes stars) et Houston (qui a posé des problèmes à Golden State lors des derniers play-offs) sont toujours prêts à récupérer quelques joyaux de la couronne.

Les Cavaliers de James ne peuvent pas se le permettre. La saison dernière, suite au départ de Kyrie Irving à Boston – il voulait sortir de l’ombre du King et a demandé à être échangé – et aux prestations en dents de scie de Kevin Love, James s’est retrouvé plus seul que jamais et il n’a pas caché que ça l’énervait.

S’ils veulent conserver LeBron, les Cavaliers vont devoir faire le ménage. Or, leur marge de manoeuvre est très restreinte puisque, la saison dernière, ils avaient la plus grosse masse salariale de NBA (119 millions d’euros). Ils peuvent certes offrir à James un contrat plus important que ce qu’il gagnerait ailleurs mais s’ils ne l’entourent pas de bien meilleurs équipiers, ils ne parviendront pas à le convaincre de rester. De plus, Dan Gilbert, le propriétaire de la franchise, n’est pas son meilleur ami : en 2010, après son départ pour Miami, il l’avait traité d’égoïste.

A l’époque, plusieurs fans avaient aussi brûlé son maillot mais il ne leur doit plus rien. Lorsqu’il est revenu à Cleveland, en 2014, il a promis d’offrir le titre de NBA à sa ville, qui n’avait plus remporté de trophée dans un sport majeur depuis 1964. Et en 2016, il a tenu sa promesse. Ce n’est donc pas un hasard si LBJ a d’ores et déjà déclaré que sa décision serait  » plus facile à prendre qu’en 2010.  » Il semble donc que seuls sa femme et ses enfants, son attachement à sa ville et son projet d’école I Promise pourraient le retenir dans l’Ohio.

Trois clubs sur la balle

Un départ est bien plus probable. Mais vers où ? Trois clubs semblent actuellement jouer les premiers rôles dans ce Game of Thrones version NBA : les LA Lakers, les Houston Rockets et les Philadelphia 76’ers – vous trouverez leurs principaux atouts et points faibles dans l’encadré. Mais James pourrait surprendre tout le monde, comme il l’avait fait lors des Decisions 1.0 et 2.0 en 2010 et 2014 . Avec son sens du show, il est vraisemblable qu’il laissera encore longtemps les fans et les médias spéculer avant d’annoncer sa Decision 3.0. Car le King est vaniteux mais il reste le roi. Reste à savoir de quel royaume…

Le King cherche un nouveau trône
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Les destinations possibles

LA Lakers

+ C’est, avec les Boston Celtics, le club le plus fameux de NBA. Cela fait cinq ans qu’il attend un titre mais la présence de Magic Johnson plaît à James.

+ C’est le seul club qui puisse encore se permettre d’engager deux stars tout en restant sous le plafond salarial. Il pourrait même en engager une troisième s’il échangeait quelques joueurs comme Lonzo Ball, Kyle Kuzma ou Brandon Ingram. Paul George (qui joue à OKC mais est originaire de Los Angeles) et Kawhi Leonard (également originaire de Los Angeles et qui veut quitter San Antonio) figurent au premier rang. Tout dépendra de l’évolution de la dispute de Leonard avec les Spurs et d’un échange éventuel.

+ James serait proche de Hollywood et pourrait développer ses projets dans l’industrie du show-business. Il possède également deux villas à Los Angeles et, selon des rumeurs non confirmées, son fils Bronny serait déjà inscrit dans une high school locale. La qualité de vie qu’offre LA à sa famille constitue également un atout.

– Une immense pression. Si d’autres All-Stars l’accompagnent à LA, le titre sera un must. James devra faire aussi bien que Jerry West, Kareem Abdul-Jabbar,Magic Johnson, Shaquille O’Neal et Kobe Bryant. Ce dernier a arrêté en 2016 mais son ombre plane toujours sur les Lakers.

– Les Lakers évoluent en Western Conference et celle-ci est très compétitive puisqu’ils peuvent y affronter Golden State ou Houston avant la finale.

Houston Rockets

+ Chris Paul, qui est arrivé la saison dernière en provenance des LA Clippers, est un des trois meilleurs amis de James en NBA – ils sont même mutuellement parrains de leurs enfants respectifs. Paul a déjà sondé très souvent LeBron mais il aurait également reconnu que celui-ci préférerait aller aux Lakers.

+ Une équipe homogène qui a terminé en tête de la phase classique et a posé beaucoup de problèmes à Golden State lors des play-offs. Une formation capable d’être championne, c’est ce que James veut.

+ Houston est au Texas, un état où il n’y a pas d’impôt sur le salaire. En Californie, celui-ci est de 13 %.

– Il devra s’entendre avec James Harden et Paul, deux joueurs qui aiment avoir le ballon. Paul a déjà 33 ans et est très fragile. Et en présence de Harden (sans doute sacré MVP cette saison), James ne serait plus celui autour de qui toute l’équipe tourne.

– Houston n’a guère de marge de manoeuvre sous le plafond salarial et devrait négocier ferme avec Cleveland dans le cadre d’un échange.

– Le club et la ville ne sont pas aussi mythiques que LA. De plus, les Rockets évoluent aussi en Western Conference.

Philadelphia 76’ers

+ Joel Embiid (24) et Ben Simmons (21) sont deux des jeunes les plus talentueux de NBA et leur potentiel est énorme. De plus, James a le même agent que Simmons et est un peu son mentor.

+ Moyennant quelques aménagements, le club a une certaine marge de manoeuvre sous le salary cap et peut encore engager une autre All-Star. Ici aussi, on cite les noms de Paul George et Kawhi Leonard.

+ L’Eastern Conference est moins concurrentielle. Seul Boston pourrait empêcher James de disputer une dixième finale.

– James, Embiid et Simmons sont trois monstres physiques mais pourront-ils jouer ensemble ? La question se pose surtout pour Simmons, un meneur qui n’a pas de shot et doit avoir le ballon, tout comme James, même si certaines sources affirment que celui-ci voudrait s’écarter un peu.

– Le manager général, Jerry Colangelo, vient d’être limogé suite à une dispute sur Twitter. Cela pourrait aussi être positif si les 76’ers engagent DavidGriffin, le manager général dont le contrat à Cleveland n’a pas été prolongé à Cleveland la saison dernière, au grand dam de… James.

Les outsiders : Boston Celtics, Miami Heat, Washington Wizards.

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