Le fils prodige

Le rejeton de Yannick effectue ses premiers pas chez les pros de façon un peu amateur parfois…

Bon sang ne peut mentir. Et Joakim n’en manque pas ! Avec un père – le célèbre Yannick – vainqueur de Roland Garros en 1983, un grand-père footballeur, Zacharie, qui a fait les beaux jours de Sedan dans les années 60 et une grand-mère, Marie-Claire, qui fut capitaine de l’équipe de France de basket. Et pour le look, on peut y ajouter quelques globules provenant de sa maman, Cecilia Rodhe, Miss Suède 1978. Le cocktail est détonnant : 2,11 m pour 105 kg, vitesse, détente, puissance, agilité… Et aussi beaucoup de passion, un sens du show, du culot, de l’exubérance qui, parfois dérangent.  » C’est comme ça « , confie-t-il.  » On ne se refait pas. Mais au moins, c’est naturel. Je ne force pas « .

C’est à prendre ou à laisser, en quelque sorte. Souvent ça passe, parfois ça casse. Comme à la mi-janvier, quand les Chicago Bulls l’ont suspendu pour deux matches parce qu’il s’était énervé sur un assistant coach qui lui reprochait de ne pas bien retenir les plays de l’équipe. Voilà qui fait un peu tache pour un débutant (voir encadré).

Doué, ce petit !

Joakim est né à New York le 25 février 1985. C’est dans cette mégapole que sa maman avait choisi de vivre et de travailler comme mannequin après avoir été recrutée par l’agence Ford Modeling. En 1987, les Noah émigrent à Neuilly. Un an plus tard, Yannick et Cecilia se séparent. Joakim et sa petite s£ur Yelena vont vivre une dizaine d’années partagés entre papa et maman. En 1997, Cecilia s’installe avec ses enfants de manière permanente à New York, à Hell’s Kitchen, un quartier de Manhattan.  » J’avais la conviction que leur permettre de vivre leur adolescence à New York était le cadeau suprême « , déclarait-elle récemment.  » Cette ville offre une formidable vie culturelle et un exceptionnel brassage de cultures. C’est très enrichissant !  »

Très tôt, Joakim se découvre une véritable passion pour le basket. Il s’inscrit dans la Police Athletic League – trouvée dans les pages jaunes ! – où il est pris en charge par Tyrone Green, un entraîneur qui le surnomme Stickman (l’homme bâton) en raison de sa morphologie filiforme. A 12 ans, Noah Jr. mesurait déjà 1,70 m.  » Je le faisais jouer avec des grands de 15 ans « , confie le coach.  » Dix fois, cent fois, il se faisait renverser et dix fois, cent fois, il se relevait, plus déterminé qu’avant « .

Une volonté congénitale ?  » Mon père m’a parlé de son redoutable service que les gens prenaient pour un don. Mais ils ne réalisaient pas qu’entre 14 et 18 ans, il était sur le court tous les matins à 6 heures pour le travailler. Ce n’est pas sorcier : ceux qui réussissent sont ceux qui travaillent le plus « .

Après une année à l’école secondaire des Nations Unies, Joakim intègre Poly Prep, une école privée de Brooklyn avec un curriculum académique aussi exigeant que le programme de basket dirigé par Billy McNally.  » Quand il est arrivé chez nous, à l’âge de 15 ans, Joakim mesurait 1,98m « , se remémore le coach.  » C’était plutôt un distributeur, très mince, qui adorait les tirs à distance. Contrairement à ce qu’on pense, il n’est pas seulement défensif. Grâce à lui, on a été deux fois champions en deux ans « .

Après une année – la rhétorique – passée à la Lawrenceville School avec laquelle il remporte le litre du New Jersey, Noah est recruté par l’Université de Floride.

Le doublé universitaire

Ses débuts à Gainesville, en 2004, ne sont pas à proprement parler spectaculaires. Il joue peu (10,3 min. en moyenne par match) et ses stats sont médiocres : 3,9 pts et 2,7 rebonds. La saison 2005-2006 est d’un tout autre tonneau. Noah est le meilleur marqueur (14,2 pts) et bloqueur (2,4) de son équipe. Mieux, il aide son alma Mater à décrocher le tout premier titre national de son histoire. Il est même élu meilleur joueur du tournoi final NCAA. Une distinction qui, habituellement, ouvre toutes grandes les portes de la NBA en qualité de N°1 de la draft. Mais le jeune joueur résiste aux sirènes. Avec ses meilleurs coéquipiers, Al Horford (maintenant chez les Atlanta Hawks) et Corey Brewer (Minnesota Timberwolves), il relève le défi de récolter un second titre consécutif. Pari gagné. Au printemps 2007, Noah et ses partenaires offrent le second trophée à leur coach Billy Donovan.

Cette fois cependant, l’appel de la NBA est le plus fort. Joakim abandonne ses études d’anthropologie pour les dollars.

Le 28 juin 2007, accompagné par son grand-père et par le coach McNally, il est nerveux comme une puce. C’est le jour du tirage au sort où les équipes choisissent leurs renforts.  » Jo m’a demandé de dire une prière pour qu’il aboutisse à Chicago « , explique le coach. Rejoindre les Bulls, c’était son désir le plus cher. Un voeu exaucé puisque John Paxson, leur manager, le sélectionne d’emblée.  » C’est un battant et un gagnant « , confia-t-il comme pour justifier son choix.  » Il peut couvrir toute la longueur du terrain, capter les rebonds, marquer. Son énergie et son enthousiasme nous seront précieux « .

L’intéressé est aux anges :  » Cette attente était la plus longue de ma vie, mais tout est bien qui finit bien. Tout jeune, j’étais tout naturellement supporter des New York Knicks et en particulier de Patrick Ewing. Je haïssais les Bulls, mais en même temps, j’avais beaucoup de respect pour eux. C’était l’équipe par excellence et maintenant j’en fais partie. C’est incroyable « .

Et maintenant ?

 » L’adaptation à la NBA n’a pas été trop difficile « , confie le joueur.  » Tout y est magnifié : la vitesse, la précision, la technique, la tactique… mais dans l’ensemble, ça va. Mes statistiques personnelles (4,5 pts – 3,4 rebonds – 0,9 assists en date du 16 janvier) ne sont pas transcendantes sur papier, mais elles sont acceptables pour un rookie « .

Quid de l’équipe nationale ? Ou plutôt d’une équipe nationale puisque le brassage dont il est issu lui offre un choix varié.  » Je suis américain, suédois, mais aussi français depuis le 11 avril 2007. Mais je penche vers l’équipe tricolore. Le cinq de France est quelques chose qui hante mes rêves depuis longtemps « . Où se voit-il dans quelques années ?  » Toujours en NBA « , sourit-il…  » A Chicago ou ailleurs. Peu importe. La NBA suffit amplement à mon bonheur « .

Tyrone Green, son tout premier mentor, le voit aller beaucoup plus loin :  » Je prédis que dans deux ans, il fera partie de l’équipe All-Star. Il va surprendre son monde, principalement grâce à ses qualités défensives. Il a beaucoup travaillé pour arriver où il est et il continuera à le faire pour monter plus haut « .

par bernard geenen, depuis washington dc

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