le FC Etterbeek Armenia

Match à haute charge émotionnelle entre Arméniens et Turcs. Enfin, sur papier.

Des fois, sport, histoire et politique s’embrassent comme deux adolescents cachés dans un parc. Quand l’Iran joue contre l’Irak. Quand Israël défie l’Allemagne. Ou quand le FC Etterbeek Armenia reçoit Denizlispor Anderlecht, un match qui, sur papier, recelait une importante charge émotionnelle, les communautés turques et arméniennes étant toujours aussi divisées sur la question du génocide perpétré durant la Première Guerre mondiale : le gouvernement d’Ankara continue, près d’un siècle après cette tragédie, à contester le terme génocide. Lequel est pourtant entériné par divers acteurs majeurs des relations internationales, Etats-Unis, Russie et Europe en tête.

Autant dire qu’une rencontre de football entre Arméniens et Turcs n’a jamais rien d’anodin. Sauf qu’on est en 4e provinciale F. Et qu’en 4e provinciale F, en cherchant bien, on trouve toujours quelque chose d’anodin. Et pour cause, les gradins du stade Guy Thys n’ont strictement aucune utilité en ce dimanche : un grand pouf ou même deux chaises auraient suffi à contenir l’ensemble des supporters présents en début de partie. No man’s land. Ou presque. Près du banc de touche, un jeune homme au bonnet-pompon savoure les rayons d’un soleil partageur, une bouteille de vin rouge à la main. Ambiance pique-nique.  » Moi je n’aime pas trop regarder les matchs. Je suis venu, mais avec ma bouteille de vin, je réfléchis à autre chose en même temps, à des scénarios de films. Vous pouvez d’ailleurs me nommer Docteur McFly. C’est un personnage de film d’horreur. Qui n’existe pas encore. Mais je compte bien le créer un jour.  »

Surréalisme. Le seul supporter n’en était donc pas un. Ça tombe bien, l’entraîneur d’Etterbeek Armenia n’en est pas un non plus.  » Je suis le délégué en fait. On avait un entraîneur, mais là je crois qu’il est à un mariage « , confie Armenak, bien décidé lui aussi à téter de la bouteille, histoire de  » se préparer pour la soirée « . Avant d’enchaîner :  » Ça fait trois ans qu’on perd tous nos points à cause de problèmes d’affiliation, alors qu’on est chaque fois bien classés. Là, je crois qu’on est huitièmes ou neuvièmes.  » Et Armenak de vérifier l’info, criant  » On est quantième Haran ? » à son gardien, par ailleurs président du club.  » Troisièmes ou quatrièmes, je crois « , répond le gardien-président Haran Denirci. Vérification faite, Armenia occupe le siège d’antépénultième. Le président s’est donc quelque peu emballé…

Autant l’avouer tout de suite, même si vous l’aviez probablement anticipé : les joueurs d’Etterbeek Armenia n’ont pas fait le poids sur le terrain, six ou sept d’entre eux quittant même le pré, sourire aux lèvres, avant que l’arbitre ne siffle la fin du match !  » Le fait d’avoir perdu nos points nous a un peu coupé les jambes, ainsi qu’aux supporters, justifie après coup le gardien-président de ce club familial, Haran Denirci. On s’est retrouvés derniers en novembre, il n’y a plus d’enjeu, on est là pour s’amuser. « Même dans un match contre une équipe turque ?  » En général, quand on joue contre des Turcs, c’est un peu plus chaud qu’aujourd’hui, il y a plus de tension « , précise encore le gardien, qui s’est tout de même retourné sept fois ce dimanche-là. Mais dans la bonne humeur généralisée. ?

PAR GUY VERSTRAETEN – PHOTOS: IMAGEGLOBE

 » En général, quand on joue contre des Turcs, c’est un peu plus chaud qu’aujourd’hui.  »

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