Le dernier salon où l’on hurle !

Bernard Jeunejean

C’est la zone, pas très neutre, des surfaces techniques (où les personnes présentes doivent, selon les Lois du Jeu, adopter un comportement responsable…) ainsi que l’espace les séparant, où ne poireaute hélas pas que le 4e arbitre : mais aussi toute une faune semi-officielle, dont le journaliste/télé chargé de rapporter ce qui s’y trame à ses collègues commentateurs. Chez nous, ça devient une zone de spectacle parallèle et râleuse, un lieu surpeuplé où se transfère l’électricité du terrain, un fameux foutoir qu’il serait temps de désengorger, pour tenter de calmer les MichelDury, FrankyLuzon, GuyMaes et autres PeterPreud’homme : leurs nerfs s’avivent avec les play-offs, le foot étant un sport où une subjectivité arbitrale peut décider d’un score en dépit de leur science tactique. Les pauvres, faut se mettre à leur place ! Alors, pour un retour au calme, du balai, du balai, du balai, du balai : quatre fois !

Primo, n’y allons pas par quatre chemins, virons le 4e arbitre : que les cinq autres se partagent le boulot (y’en a deux qui glandent à quasi rien foutre sur les lignes de but), ou que ce quatrième soit cloîtré bien à l’écart dans une cabine vitrée avec son chrono, sa petite télé, un micro pour annoncer les changements. Car ce 4e arbitre ne calme rien du tout, au contraire : à proximité, il fournit aux deux entraîneurs une présence pour mieux récriminer, un relais dans l’espoir de faire suivre leurs doléances à l’arbitre/terrain. C’est un fauteur de troubles à son corps défendant !

Deuxio, nettoyons les dug-outs des présences superflues ! Certes, je suis sensible aux concepts d’esprit de groupe, de staff technique ou de team building : je m’émeus même chaque fois de ce grand moment de solidarité télévisée, lorsqu’un joueur remplacé tope la main de tous les assis alignés. Mais faut quand même pas déconner, j’en ai compté jusqu’à douze par équipe ! Dans notre championnat, les quatre remplaçants, un adjoint, un médico avec un p’tit sac, ça devrait suffire pour être efficace sans proliférer. Faut croire que j’ai la nostalgie de ce qui a cessé d’être le banc des réserves, pour devenir la vision d’une armée de sbires vautrés dans des fauteuils clubs…

Tertio, une fois les dug-outs épurés, éloignons-les l’un de l’autre, disons de 50 mètres. D’une part parce qu’il faut bien ça pour que chaque banc soit bien sage en restant bien loin de ce qui se passe chez l’alter ego, vu le climat de contestation qui colle au foot comme les plumes au goudron. D’autre part parce que cela éclaircira l’espace à hauteur de la ligne médiane : ce qui amène ma dernière suggestion pour moins de confusion…et plus de spectacle !

Quarto donc, qui vous fera glousser tant cela semble paradoxal : on sépare les deux clans, SAUF LES DEUX ENTRAÎNEURS ! Ces deux-là, on les oblige à rester, rien qu’eux deux et debout, dans deux carrés ADJACENTS d’au maximum 2m sur 2m à mi-terrain : chacun du côté de son dug-out, pour pouvoir appeler le réserviste éventuel. Evidemment, la réalisation/télé nous renseignera, visuellement voire vocalement, sur le climat et les conséquences de cette promiscuité ! Les coaches s’immisçaient dans le spectacle sans qu’on leur ait demandé ? Eh bien, intégrons-les officiellement ! Obligeons-les à se fréquenter, voire à se causer, on verra ceux qui fraternisent et ceux qui se haïssent, ça pourrait amener de l’inédit ! Et au moins, s’ils se savent perpétuellement filmés côte à côte, ça les amènera à réfléchir onze fois plutôt qu’une avant d’en venir aux pognes… Et s’ils y viennent, tant pis pour eux et leur image.

Mais terminés les aboiements sur le quatrième arbitre. Finies les simagrées d’agents secrets avec une main devant la bouche, pour causer avec l’adjoint en empêchant notre espionnage labial. Faudra choisir entre le mutisme ou le coaching seul comme un grand : et en cas de consigne hurlée, possibilité pour l’autre de contre-coaching ! En cas de contestation par l’un, vision simultanée des deux réactions ! Imaginez Preud’homme et Luzon, isolés sur 8m2 durant 90 minutes, jetés en pâture aux télés, quel match dans le match ça ferait : de la télé-réalité haut de gamme ! Le foot me fera toujours rêver.

Bernard Jeunejean

 » Imaginez Preud’homme et Luzon isolés sur 8m2 durant 90′, jetés en pâture aux télés : ça ferait de la télé-réalité haut de gamme.  »

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